1. Sur la pertinence du Bloc québécois
Qu’est-ce qu’ils ont, tous ces «ex», à exiger la dissolution du Bloc québécois parce que celui-ci ne serait plus utile à la cause de l’indépendance ou parce que les enjeux auraient changé entre-temps, comme s’il y avait un temps pour revendiquer un pays et un temps pour passer à autre chose! «Tant que l’indépendance n’est pas faite, elle reste à faire», clamait sans cesse Gaston Miron. Cette phrase est d’une évidence criante.
Se souvient-on seulement de ce qu’il y avait avant la création du Bloc québécois, il n’y a pas si longtemps pourtant? Se souvient-on des discussions interminables sur la nécessité d’annuler son vote ou de s’abstenir tout simplement, en espérant bien naïvement qu’au lendemain des élections, on allait annoncer en grandes pompes qu’un fort pourcentage de Québécois s’était abstenu de voter ou avait annulé leur bulletin de vote comme s’il s’agissait d’un mouvement concerté significatif?
Bien sûr, il y avait toujours le Parti Rhinocéros qui venait brouiller les cartes, mais si peu. Non, c’était le grand vide, on ne se sentait pas concerné par ce spectacle venu de l’autre côté de l’Outaouais et qui constituait une manne pour les élites locales. Point.
Puis, il y a un peu plus de 15 ans, le Bloc québécois est venu à son tour modifier totalement l’échiquier et chambarder les règles du jeu en disputant le monopole des élections fédérales aux deux partis traditionnels, en les forçant à se prononcer sur les véritables intérêts du Québec. Du coup, les vieux partis se sont sentis menacés, au sein même de leur château fort, le Parlement d’Ottawa, et ils ont dû rajuster leur tir en conséquence et tenir compte de la nouvelle voix du Québec. Le Bloc québécois s’installa à Ottawa comme un chien de garde de nos intérêts.
En alléguant la caducité du Bloc, ou sa non-pertinence, ou même sa mort imminente, ces anciens ténors veulent nous ramener 17 ans en arrière, à l’époque des couleuvres qu’on voulait nous faire avaler avec une petite tape dans le dos et une promesse vite faite. D’autres, en affirmant faussement que le Bloc s’est dénaturé petit à petit en ne prônant plus la nécessité d’un pays pour le Québec, ne font que le jeu des tenants du statu quo. Comme si les élections fédérales constituaient un référendum. C’est certainement, par la bande, un test pour que chaque camp compte ses forces, mais c’est surtout une excellente tribune pour réaffirmer qu’on ne peut gouverner ce Canada sans tenir compte du Québec et de ses exigences. Et qui donc peut le faire de façon aussi assidue, aussi désintéressée que la députation du Bloc québécois?
Parce qu’ils ne seront jamais au pouvoir, les députés du Bloc savent qu’ils ne pourront jamais graisser la patte aux petits amis, qu’il n’y aura jamais de retour d’ascenseur payant, qu’on ne les prendra jamais la main dans le sac, comme lors du triste scandale des commandites où ce sont des Québécois qui s’en sont mis honteusement plein les poches avec la complicité du Parti libéral du Canada. Parce qu’ils n’ont pas besoin de faiseurs d’images pour faire passer leur message, parce qu’ils travaillent à longueur d’année dans l’adversité, en terrain miné, à revendiquer une meilleure place au soleil pour le Québec face à un appareil d’État extrêmement hostile, ils méritent toute notre gratitude. Allez-vous placer avec une pancarte qui dit, ni plus ni moins, «Vive le Québec libre!» devant un auditoire unilingue anglais à Ottawa ou en Ontario et vous comprendrez ce qu’il en faut de courage pour s’afficher fièrement sans baisser pavillon et faire fi des railleries et des menaces. Faut être fait fort, pas à peu près!
2. Sur le pessimisme ambiant
Je comprends les arguments de Josée Legault dans sa chronique du 18 septembre dans Voir. Mais je suis loin de partager son pessimisme. Je n’ose pas croire qu’une majorité de la population du Québec tombera dans les pièges du Parti conservateur, se laissera berner par toute cette opération de maquillage, par ces fausses promesses, par les cadeaux de pacotille que papa Harper offre au bon petit peuple comme dans le bon vieux temps où on promettait un bout de route asphaltée ou la construction d’un pont, quand ce n’était pas d’une rivière pour permettre au pont d’exister. J’ose croire le peuple québécois, dans sa majorité, plus lucide et plus aguerri. Nous avons fait un bon bout de chemin depuis la Révolution tranquille et ce n’est certes pas pour revenir en arrière ou pour faire du surplace.
Je comprends aussi le cri du cœur de Gilles Vigneault que je partage entièrement, mais je ne comprends pas que ses compagnons de route, auteurs, compositeurs, interprètes et musiciens soient demeurés silencieux. Je ne comprends pas qu’ils ne l’aient pas défendu devant les attaques personnelles qui ont suivi, qu’ils ne l’aient pas appuyé en répercutant de mille façons son cri d’amour et ses craintes.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé