PKP : derrière «l’éthique», une tentative d’exécution politique

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L'irresponsabilité criarde de ceux qui dénigrent PKP

PKP est donc candidat péquiste. Le PLQ panique et s’adonne à des publicités négatives qui frisent le délire. La CAQ panique autant, même si son chef a d’abord exprimé sa déprime: il aurait bien aimé l’avoir à bord. Mais très rapidement, une stratégie commune s’est imposée chez ceux qui ont peur de se faire nucléariser par la candidature PKP : il faut la détruire à tout prix. Cela fait partie de la vie politique, répondront les esprits désenchantés. En ruinant sa réputation, s’il le faut. Ou encore, en le décourageant le plus vite possible de la vie politique, en le forçant à liquider son empire, qui est aussi, dans son cas, faut-il le rappeler, un héritage familial et un fleuron du Québec économique.
La stratégie est donc trouvée : on entend créer un «problème éthique» qui détournera l’attention de la population de la signification véritable de cette candidature. On ne discutera plus de la renaissance de la grande coalition souverainiste. On ne discutera plus de la caution économique à nulle autre pareille que Pierre-Karl Péladeau vient d’apporter au projet d’indépendance. On ne parlera plus des effets électoraux anticipés de cette candidature dans des catégories de l’électorat qui faisaient la grève du souverainisme depuis longtemps. On parlera encore moins de l’effet de désinhibition que cette candidature risque d’avoir chez les entrepreneurs qui censuraient leurs convictions souverainistes.
Non. On cherchera à transformer cet immense événement politique en «problème éthique». Les partis d’opposition s’accrochent à cela comme à leur seule bouée de sauvetage et ils entendent en faire un enjeu électoral. Québec solidaire a décidé de frapper autrement, en diabolisant PKP, comme si un voyou venait de s’introduire dans la cité. On croit comprendre que l’homme serait à ce point infréquentable que le simple fait de souhaiter la même chose que lui – par exemple un pays – suffirait à rendre indésirable ce qu’on prétendait désirer quelques jours plus tôt. Le sectarisme idéologique de ce parti est fascinant.
Ce n’est pas qu’il n’y a pas de considérations «éthiques». Évidemment, PKP possède un empire de presse et il faut s’assurer qu’il n’en contrôle pas encore la direction s’il parvient aux affaires de l’État. Mais Pierre-Karl Péladeau y a répondu très correctement et la solution de la fiducie semblerait raisonnable pour tous si certains ne trouvaient pas avec cette campagne l’occasion pour chercher à en finir avec un candidat majeur et régler de vieux comptes avec une entreprise que bien des gens se font une fierté de dénigrer.
Comment, dès lors, attirer vers la vie politique des candidats provenant de l’univers économique, s’ils doivent renoncer à ce qu’ils ont bâti pour s’investir dans la cité? À moins de soutenir qu’il faut tenir à l’écart de la cité les hommes d’affaires, comme s’ils devaient se délivrer de leur existence préalable pour renaître à la vie politique? Celui qui fait le choix de la cité devrait-il du coup sacrifier l’œuvre de son existence? Il faut rappeler l’évidence : en invitant PKP à vendre ses actions, on veut tout simplement le chasser de la vie politique aussi rapidement qu’il y est entré.
J’ajoute qu’on affiche un mépris grossier pour les médias qui appartiennent à Québecor et ceux qui y oeuvrent. Les responsables de Québecor ont répété que les chroniqueurs et blogueurs du Journal de Montréal représentent une palette d’opinions très élargie. Je ne me ferais pas un devoir de le dire à mon tour si cette évidence à elle-seule ne suffisait à relativiser grandement les craintes ceux qui s’imaginent d’un coup Québecor se mettre au service du Parti Québécois. Alors qu’il maîtrisait pleinement ses journaux, PKP a refusé d’en faire des organes de propagande. Pourquoi le deviendraient-ils, alors qu’il ne les maîtrise plus? L’imagine-t-on vraiment revenir aux commandes de son entreprise, dans cinq ou dix ans, et s’adonner à une purge chez ceux qui l’auraient malmené?
Surtout, on assiste ici à une forme d’irresponsabilité économique ahurissante : peut-on vraiment envisager que Québecor passe sous contrôle étranger? Imagine-t-on les conséquences graves d’un tel transfert de propriété sur la vie collective? Imaginons que les parts de PKP soient rachetées par un acteur majeur du Canada anglais. Cette considération est-elle secondaire? On se dit ici que l’absolutisme éthique affiché de manière ostentatoire depuis dimanche témoigne d’une pensée économique et politique terriblement appauvrie ou relève de l’hypocrisie pure et simple : on maquille une tentative d’exécution politique derrière les protestations de la vertu.
J’y reviens: nous parlons ici d’une instrumentalisation grossière de l’éthique pour en finir avec un candidat qui pourrait contribuer à redessiner en profondeur la carte politique québécoise. Cette campagne, on l’aura remarqué, est d’une brutalité extrême: les fédéralistes, en état d’alerte maximale, attaquent la légitimité même du projet souverainiste. Quand cette campagne sera terminée, et elle finira d’ici moins d’un mois, ils seront nombreux à éprouver une certaine gêne en voyant jusqu’où la partisanerie politique les a amenés à dériver, contre les exigences de la décence et du bon sens.


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