En janvier 2020, l'éditeur français Gallimard annonce l'arrêt de la commercialisation du journal de l'écrivain Gabriel Matzneff, visé par une enquête pour « viols sur mineur » et mis en cause dans le livre de Vanessa Springora Le consentement dans lequel elle raconte l'emprise qu'a exercée l'auteur âgé de 50 ans sur elle alors qu’elle n’a que 14 ans, évoquant une relation qui l'a dévastée et lui a laissé des blessures profondes.

Par ailleurs, dans la foulée de la publication du récit autobiographique de Vanessa Springora, le parquet de Paris fait savoir qu’il procède à l’ouverture d’une enquête préliminaire contre Matzneff pour viols sur mineur, une décision qui survient après l’analyse du livre Le consentement.

De son côté, dans un entretien accordé au journal Le Parisien, Gabriel Matzneff se dit « chagriné » par le récit de Vanessa Springora qui vient, selon lui, dénigrer les « lumineuses et brûlantes amours qu’ils ont vécues à l'époque ».

Or, aujourd’hui, après avoir été temporairement retirés, les exemplaires du journal de l’auteur Gabriel Matzneff, reviennent sur les tablettes de la Grande bibliothèque, son directeur général alléguant que la Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) a pris cette décision parce qu’elle « adhère aux grands principes sur la liberté intellectuelle énoncés et mis de l'avant par les organismes internationaux et les principales associations œuvrant dans le domaine documentaire ».

À la rigueur, je pourrais comprendre qu’un auteur pédophile puisse répondre aux critères de la « liberté intellectuelle ». Toutefois, je demeure perplexe quand cette même liberté intellectuelle ouvre les portes à un journal qui raconte avec moultes détails ses fantaisies « amoureuses » avec des mineurs… Là, je crois que la limite de la décence est outrageusement dépassée!

Notes biographiques (Source : Wikipédia)

Gabriel Matzneff a décrit ses activités pédophiles et de tourisme sexuel dans plusieurs de ses livres ainsi que sur son site officiel, et ces activités ont été mentionnées à la télévision nationale. Néanmoins, il est resté à l’abri de toute poursuite pénale tout au long de sa carrière littéraire et a bénéficié d’un large soutien enthousiaste au sein du monde littéraire Français — tout cela malgré le fait que ses livres ne se vendent pas bien au grand public. 

Le 11 février 2020, Français procureurs ont annoncé qu’une enquête criminelle avait été ouverte. Matzneff a été convoqué devant le tribunal de Paris le lendemain. 

Carrière littéraire

En octobre 1962, le directeur de la publication de Combat, qui avait remarqué son travail, lui demande d’écrire une chronique pour son quotidien. Au cours des décennies suivantes, Matzneff sera chroniqueur régulier ou occasionnel pour plusieurs journaux et magazines de toutes allégeances politiques. 

En octobre 1964, il participe au congrès fondateur du Comité de coordination de la jeunesse orthodoxe, où il rencontre la lycéenne Tatiana Scherbatcheff, « une adolescente aux cheveux hirsutes, un visage légèrement triangulaire, de vastes et magnifiques yeux noirs, un ensemble de princesses et des volailles ». Il l’épouse le 8 janvier 1970 à Londres avant de divorcer le 3 mars 1973. Ce divorce lui causa une crise de foi qui l’éloigna de l’Église; il quitte ensuite le Comité et cesse la coproduction de l’émission de télévision Orthodoxie qu’il a contribué à créer en mai 1965.

Son premier livre, Le Défi, un recueil d’essais, a été publié en 1965. L’année suivante, il publie son premier roman, L’Archimandrite , qu’il commence à écrire pendant son service militaire. Au cours des années 1970, il a fait un certain nombre de voyages au Moyen-Orient ainsi qu’en Pologne et en Union soviétique. Au cours des années 1980, il a fait plusieurs voyages aux Philippines où, comme il l’a décrit dans l’un de ses livres, il s’est livré à des relations sexuelles avec des garçons pré-adolescents qu’il avait ramassé à Harrison Plaza, le principal centre commercial de Manilla. 

En 1990, Matzneff rejoint Gallimard avec l’aide de Philippe Solers, qui l’a publié dans sa collection " L’Infini « Gallimard a versé des redevances mensuelles à Matzneff jusqu’en 2004. 

Gallimard, premier groupe d’édition et éditeur historique de Matzneff depuis 30 ans, a brusquement cessé de commercialiser les livres de l’auteur début janvier 2020 et a rappelé ses livres dans les librairies, moins de deux mois après avoir publié L’Amante de l’Arsenal, le dernier opus de son journal. Le 12 février 2020, la police fouille le siège des Éditions Gallimard à la recherche, entre autres, de manuscrits inédits détaillant les activités pédophiles de Matzneff. 

Pédophilie et hébéphilie (1)

Bien qu’il ait décrit des actes de pédophilie et d’hébéphilie, Matzneff est resté longtemps à l’abri de toute poursuite pénale et a bénéficié d’un large soutien au sein du monde littéraire Français. Fin 2019, l’une de ses anciennes victimes, Vanessa Springora , la réalisatrice des Éditions Julliard publie le livre Le Consentement décrivant l’effet que Matzneff a eu sur elle à l’âge de 14 ans. Son livre a déclenché une vive controverse sur la tolérance du milieu littéraire envers un pédophile présumé. Cette controverse a d’abord conduit Éditions Gallimard à retirer leurs services marketing pour certaines de ses œuvres, en particulier Carnets.

Le journal de Matzneff Un Galop d’Enfer, publié en 1985, disait que pendant qu’il était aux Philippines, il avait régulièrement des relations sexuelles avec des garçons mineurs. Il a écrit que « parfois, je vais avoir jusqu’à quatre garçons - de 8 à 14 ans - dans mon lit en même temps, et je vais m’engager dans l’amour le plus exquis avec eux ».

(1) Attirance sexuelle éprouvée par ou une adulte pour les jeunes adolescents de 12 à 15 ou 16 ans

Henri Marineau, Québec