L'énoncé économique de la ministre des Finances du Québec, Monique Jérôme-Forget, n'aura servi qu'à confirmer quelques-unes des mesures promises par les libéraux lors de la récente campagne électorale. Compte tenu du budget fédéral qui sera présenté bientôt, Québec a raison d'attendre avant d'en faire plus. Mais alors, pourquoi cette session extraordinaire de trois jours?
C'est en invoquant l'urgence de la situation que le premier ministre Jean Charest a déclenché des élections, au début de novembre. Dès les premiers jours de la campagne, les partis ont fait connaître leur programme économique, ce qui nous a permis de comprendre que le seul vrai pari de M. Charest n'était pas de vaincre la crise, mais d'arracher la majorité à l'Assemblée nationale. Pari risqué, et gagné.
Pour ce qui est de la crise, le nouveau gouvernement s'en remet à son important programme d'infrastructures lancé longtemps avant la récession, au Pacte pour l'emploi, au programme d'aide à l'industrie forestière, et aux interventions de la SGF et d'Investissement Québec dont les budgets viennent d'être augmentés.
La plupart de ces programmes annoncés longtemps avant la récession étaient sans doute prémonitoires, mais compte tenu des derniers événements, ils se révèlent incomplets. La seule mesure originale, promise en novembre et confirmée par l'énoncé économique d'hier, concerne le crédit à la rénovation résidentielle. Voilà une initiative qui méritait d'être incluse dans un plan de stimulation économique. Le hic, c'est que les paramètres du nouveau programme sont trop restrictifs puisqu'il faudra dépenser plus de 7500 $ pour avoir droit à un crédit de 20 % sur la seule fraction excédentaire. Compte tenu de la paperasse administrative et du report de remboursement au moment de rédiger sa déclaration fiscale, ils sont nombreux ceux qui continueront de privilégier le travail au noir comme moyen d'économiser au lieu d'avoir recours au programme.
À ce jour, Mme Jérôme-Forget fait surtout confiance aux gouvernements américain et canadien pour relancer la machine. Ne soyons pas trop durs à son endroit puisque Québec doit attendre de connaître le contenu du budget fédéral avant de préparer le sien. En outre, sa marge de manoeuvre est à peu près nulle à cause de sa dette plus lourde que celle des autres provinces, et de toute façon, il serait illusoire de croire qu'un déficit élevé découlant de nouvelles mesures aurait un impact digne de mention sur l'activité économique.
À ce propos, le représentant de Québec solidaire, Amir Khadir, a réagi pour la première fois à titre de député, hier, en faisant référence au Prix Nobel et chroniqueur du New York Times, l'économiste Paul Krugman. Selon M. Krugman, le risque est moins grand pour l'État d'en faire trop que pas assez dans la présente crise. Il a parfaitement raison... en parlant des États-Unis, où la demande intérieure constitue le plus important facteur de croissance et dont le dollar est utilisé comme monnaie d'échange par tous les pays du monde. La situation est fort différente pour le Québec, qui ne contrôle ni sa monnaie ni ses taux d'intérêt, et qui dépend de ses exportations pour la moitié de son PIB. Si le Québec laisse croître son déficit et sa dette de façon excessive, les conséquences négatives sur les budgets consacrés à la santé, à l'éducation et aux autres missions de l'État seront catastrophiques, longtemps après la récession.
Demain, M. Charest et ses homologues des autres provinces rencontreront Stephen Harper. Voilà une étape beaucoup plus importante pour la suite des choses que la session bidon qui se tient cette semaine à l'Assemblée nationale.
Énoncé économique
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