Les nationalistes corses rêvent d’obtenir la majorité absolue lors d’élections locales dimanche sur l’île méditerranéenne pour augmenter un peu plus la pression sur Paris, à qui ils réclament plus d’autonomie.
Fort de son score triomphal au premier tour (45,36 % des suffrages exprimés), la liste Pè a Corsica (« pour la Corse ») est idéalement placée pour s’imposer largement au second tour de ce scrutin visant à fusionner les trois entités administratives préexistantes en une « super région ».
Dimanche dernier, l’alliance entre les indépendantistes et les autonomistes, au pouvoir sur l’île natale de Napoléon depuis 2015, a nettement devancé les trois autres listes encore en course, dont celle du parti présidentiel d’Emmanuel Macron, la République en marche, cantonnée à un décevant 11,26 %.
Au milieu d’une marée de drapeaux corses et de chants traditionnels, le leader autonomiste Gilles Simeoni a appelé mercredi lors d’un grand rassemblement à Ajaccio les 234 000 électeurs corses à « amplifier le score » du premier tour.
« Nous avons besoin de tout le monde parce que nous avons un pays à construire », a-t-il martelé.
L’indépendantisme est dans l’imaginaire collectif, mais la volonté actuelle des Corses est d’avoir davantage d’autonomie.
Thierry Dominici, spécialiste de la Corse à l’Université de Bordeaux
Si la question de l’indépendance n’est pas à l’ordre du jour, la coalition nationaliste espère bien pouvoir avancer en cas de victoire sur ses trois principales revendications : amnistie pour les « prisonniers politiques », coofficialité de la langue corse et statut de résident pour combattre notamment la spéculation immobilière dans cette île réputée pour sa beauté.
Ces questions sont éminemment sensibles en Corse, qui a été pendant des décennies le théâtre de violences avec plus de 4500 attentats revendiqués par les militants du Front de libération nationale de la Corse (FLNC). Leur décision, en 2014, de déposer les armes a ramené le calme sur l’île.
L’indépendance, l’objectif ultime
« Il faut que nous ayons suffisamment de force pour imposer ces sujets », insiste Jean-Guy Talamoni, que certains surnomment « le Puigdemont corse », du nom du dirigeant séparatiste catalan.
Si l’indépendance reste l’objectif ultime de M. Talamoni, il n’a cessé ces dernières semaines de répéter que ce n’était pas là l’enjeu de ce scrutin.
L’opinion publique sur cette île de 330 000 habitants, qui vit beaucoup du tourisme saisonnier et dépend largement des subsides de l’État, est d’ailleurs majoritairement défavorable à un divorce avec Paris. Et même les plus optimistes des indépendantistes ne rêvent pas d’un éventuel référendum d’autodétermination avant 15 ans.
L’ancien ministre de la Justice François Bayrou estime ainsi infondé « pour 10 000 raisons » le parallèle avec la Catalogne. « La Corse, c’est 300 000 personnes ; la Catalogne, c’est 7,5 millions. La Corse, économiquement, a beaucoup de difficultés ; la Catalogne au contraire, économiquement, est très puissante », a-t-il fait valoir jeudi.
« L’indépendantisme est dans l’imaginaire collectif, mais la volonté actuelle des Corses est d’avoir davantage d’autonomie », tranche auprès de l’AFP Thierry Dominici, spécialiste de la Corse à l’Université de Bordeaux.
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