Les minorités visibles sont souvent reléguées aux emplois précaires à la Ville de Montréal, même si en engager davantage est une « priorité stratégique » de l’administration Plante.
En novembre, la Ville de Montréal a engagé ou rappelé 678 employés temporaires affectés au stationnement pendant les opérations de déneigement. Près de la moitié d’entre eux, soit 322, font partie d’une minorité visible, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas la peau blanche.
La Ville comptabilise ces employés dans ses données annuelles sur la diversité.
Pourtant, ces travailleurs sur appel n’ont du boulot que quelques semaines par an.
Les gens de minorités visibles représentent aussi près du quart des personnes engagées pour un emploi d’été ou étudiant cette année, selon les données fournies par la Ville.
Emplois moins bien payés
Les minorités sont donc surreprésentées dans ces emplois précaires, alors qu’elles ne comptent que pour 13,9 % de tous les fonctionnaires municipaux.
« Trop de gens des minorités sont confinés aux emplois temporaires les moins bien payés, se désole le conseiller municipal indépendant Marvin Rotrand. Ça démontre un manque d’effort [de l’administration] à s’attaquer à un problème systémique. »
« Comme cols blancs ou cols bleus, 85 % des employés qui entrent à la Ville sont des temporaires, alors c’est normal de voir [des gens des minorités] là, plaide le président du comité exécutif et responsable des ressources humaines, Benoit Dorais. L’important c’est d’avoir des mesures pour qu’ils accèdent à des emplois permanents. »
Lorsque des postes réguliers s’ouvrent à l’interne, la Ville dit embaucher 50 % de minorités si les conventions collectives le permettent.
Pompiers et cadres blancs
Après les pompiers, c’est chez les cadres que la Ville a embauché le moins de personnes issues des minorités dans la dernière année.
« Il y a beaucoup de gens issus de communautés diverses qui ne postulent pas pour les postes de cadre. On fait de l’affichage externe [pour aller les chercher], mais ils ne postulent pas en assez grand nombre », soutient M. Dorais.
Il explique avoir doublé le budget consacré au mentorat des personnes issues de communautés culturelles et mettre « efforts et argent » dans les salons de l’emploi pour favoriser le recrutement.
En 2016, sous l’administration de l’ex-maire Denis Coderre, Montréal se dotait d’un plan d’intervention pour s’approcher de la représentativité montréalaise, dont la population est composée à 33 % de minorités visibles, selon Statistique Canada. Aucun objectif clair ni aucune échéance n’avaient alors été fixés.
Ça change lentement
Trois ans plus tard, le nombre d’employés issus des minorités visibles a augmenté de 2 %.
« Malgré les efforts, nous avançons encore trop lentement vers l’atteinte des cibles de représentation », déplore le chef de l’opposition à l’hôtel de ville, Lionel Perez.
« À ce rythme, il nous faudra vingt ans pour faire de vrais progrès », calcule Marvin Rotrand.
Le fait que la Ville de Montréal soit plutôt en mode de réduction de ses effectifs explique la difficulté à donner un coup de barre, avait reconnu la directrice adjointe aux ressources humaines, Josée Lapointe, lors de l’étude du budget en novembre.
« Ça va tranquillement parce que ça va en fonction des embauches. Pour diversifier davantage, il faut embaucher », avait-elle indiqué.
► Qu’est-ce qu’une minorité visible ?
La définition de minorité visible est établie par la Loi sur l’équité en matière d’emploi : « Il s’agit de personnes, autres que les Autochtones, qui ne sont pas de race blanche ou qui n’ont pas la peau blanche ».
► Minorités visibles travaillant à la Ville
♦ Janvier 2017 : 12,4 %
♦ 31 Décembre 2017 : 13 %
♦ 31 Décembre 2018 : 13,9 %