Le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (FTQ) a vécu ces 12 derniers mois une profonde crise. Alors qu’il était malmené par le gouvernement Harper qui lui a retiré les avantages fiscaux dont il jouissait depuis sa création, la commission Charbonneau exposait pour sa part dans le menu détail les liens mafieux entretenus par certains de ses dirigeants. Il lui fallait réagir. Il le fait avec une détermination qui l’honore.
Une réforme en profondeur s’imposait pour restaurer la confiance en cette institution. Le Devoir avait souhaité un aggiornamento, sans trop croire que les leaders de la FTQ aient le courage de remettre en question le contrôle qu’ils exercent sur cette institution. On se souvient des hésitations de Michel Arsenault, l’ancien président de la FTQ, à reconnaître la nécessité de dissocier la présidence du conseil du Fonds de celle de la FTQ. Cette réforme, ils la font, certes à leur corps défendant, sous la pression des partis et de l’opinion publique, mais l’important est qu’ils la font.
Le geste le plus important est l’arrivée d’un président du conseil « indépendant » en la personne de Robert Parizeau. Sa longue carrière dans le monde des affaires et le respect et l’autorité dont il jouit contribueront à rétablir la crédibilité du Fonds. Il aura à mettre en oeuvre une gouvernance instituant un nouvel équilibre entre administrateurs indépendants et administrateurs syndicaux qui déplacera une large partie du pouvoir décisionnel des mains des représentants de syndicats vers celles d’administrateurs indépendants.
Le conseil d’administration sera désormais composé de 19 membres, dont 7 administrateurs indépendants. Les comités de gouvernance et d’éthique, de ressources humaines et de gestion des risques seront composés en majorité d’administrateurs indépendants. Il en sera de même des divers conseils d’investissement qui approuveront les projets d’investissements jusqu’à un montant de 25 millions. Les représentants de la FTQ auront un droit de parole, mais les indépendants auront le dernier mot. On adopte ainsi les meilleures pratiques en matière de gouvernance.
En contrepartie de ce délestage de pouvoir, la FTQ se garde une forte présence au sein du conseil. Sept sièges lui reviendront d’office, auxquels pourront s’ajouter les quatre sièges d’administrateurs élus par les actionnaires. Le Fonds comptant 60 % d’actionnaires syndiqués, la FTQ pourra facilement faire élire les siens et obtenir une majorité au sein du conseil. Le rôle de celui-ci se limitera toutefois aux enjeux stratégiques.
À 31 ans, le Fonds est un adulte qui a tardé à quitter la maison familiale. Cette proposition de réforme lui permettra de prendre ses distances tout en gardant un lien étroit avec la FTQ. Qu’il en soit ainsi est on ne peut plus normal puisqu’il s’agit d’un fonds de travailleurs, créé pour favoriser l’épargne et le maintien d’emplois. Ce sont des syndiqués qui se sont investis et s’investissent toujours pour recruter de nouveaux actionnaires. Il ne faut pas que cette institution perde sa personnalité et devienne un fonds d’investissement comme les autres.
Il reviendra aux élus d’inscrire dans la loi constitutive du Fonds ces changements. Ils pourront vouloir aller plus loin. Par exemple, en remettant en cause cette majorité potentielle de sièges au conseil que pourrait détenir la FTQ. La question se pose, mais il faut aussi respecter l’exercice fait par le Fonds et la FTQ, qui ont trouvé un équilibre fonctionnel entre les pouvoirs des uns et des autres. La formule est certes perfectible, mais elle a l’avantage de « réformer sans briser », selon les mots du président de la FTQ, Daniel Boyer. À nouveau, les Québécois peuvent avoir confiance en cette institution.
Le Fonds FTQ est un des actionnaires de Le Devoir inc.
FONDS DE SOLIDARITÉ FTQ
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