Le premier ministre François Legault reste sourd aux arguments de plusieurs groupes d’employeurs qui militent pour une hausse importante des seuils d’immigration.
Qui plus est, il a renvoyé la balle aux entreprises, mercredi, en leur disant qu’elles pouvaient contribuer à régler le problème du manque de personnel en rendant les postes vacants plus attrayants pour les Québécois.
M. Legault fait face à une pression énorme du Québec inc., qui souhaite que l’on augmente ces seuils à au moins 60 000 personnes par année, afin de combler la pénurie de main-d’oeuvre.
Le Conseil du patronat, la Fédération des chambres de commerce du Québec et l’Association Restauration Québec ont notamment défilé devant les députés cette semaine.
Mercredi, à son arrivée à la première réunion du Conseil des ministres après la relâche estivale, M. Legault a encouragé les entreprises à améliorer leurs conditions de travail afin de rendre plusieurs postes plus attrayants pour les Québécois.
Le gouvernement, a-t-il assuré, est prêt à fournir sa part d’efforts. « On va aider ces entreprises-là à améliorer leur productivité, être capables d’avoir plus de valeur ajoutée dans leurs emplois et être capables d’offrir de meilleurs salaires pour attirer les Québécois », a-t-il déclaré en mêlée de presse.
Selon l’analyse du premier ministre, dans tous les pays industrialisés, il est de plus en plus difficile de pourvoir aux emplois « où il y a moins de valeur ajoutée, qui sont moins bien payés, qui sont à temps partiel, par exemple, seulement pour la portion de l’été ».
« Il faut comprendre que si on demande à un Québécois : “Est-ce que vous préférez un emploi à 15 $ l’heure ou à 30 $ l’heure ?” c’est certain qu’il aime mieux un emploi à 30 $ l’heure. Donc, ceux qui offrent des emplois à 15 ou même à 12 $ l’heure, ils vont avoir de la difficulté. »
Le Conseil du patronat fait une tout autre lecture de la situation. Son président, Yves-Thomas Dorval, affirme que les entreprises québécoises font face à un problème qui est démographique.
Ce n’est pas en améliorant les conditions de travail « que ça va créer tout à coup de la population », a-t-il ironisé lors d’une entrevue , mercredi.
« Il y a une mathématique incontournable, dit-il. On a moins de personnes qui entrent sur le marché du travail que de gens qui le quittent. Il y a 1,4 million de postes à pourvoir pour les dix prochaines années. Ce ne sont pas les chiffres du Conseil du patronat, ce sont les chiffres du gouvernement du Québec, des fonctionnaires, des spécialistes, des experts. »
M. Dorval affirme que le Québec a besoin d’un minimum de 60 000 immigrants par année pour combler les besoins du marché du travail. « Vous savez, il y a 250 000 entreprises au Québec, et il y en a 90% qui disent qu’il y a des problèmes de main-d’oeuvre. Il doit y en avoir quelques-uns là-dedans qui ne doivent pas être à côté de la track. »
Il se demande si le gouvernement est vraiment à l’écoute des groupes qui ont présenté leur avis en commission parlementaire. « Si le gouvernement a déjà fait son nid, alors là, on ne devrait pas faire une consultation, ça ne donne rien », a-t-il renchéri.
De son côté, le porte-parole libéral en matière d’immigration, Monsef Derraji, affirme que le premier ministre est « complètement déconnecté de ce qui se passe sur le terrain ».
« Depuis le début des consultations, ce que j’ai entendu, c’est que la main-d’oeuvre n’existe pas au Québec, et on part la chercher à l’international. Il n’y a personne qui m’a dit que la main-d’oeuvre existe au Québec et qu’on va la former », a-t-il déclaré en entrevue.