David Cameron n'avait pas besoin de cela. Le premier ministre britannique doit gérer une situation économique des plus difficiles : réduction drastique d'une dette publique gigantesque sur fond de récession durable.
Voilà maintenant le chef du gouvernement conservateur singulièrement affaibli par l'affaire Murdoch. C'est un scandale à ramifications multiples qui ébranle nombre des institutions du Royaume-Uni. Et dont nul ne se risquerait aujourd'hui à prévoir l'issue.
Revenu plus tôt que prévu d'une tournée en Afrique, M. Cameron a convoqué une session d'urgence de la Chambre des communes. Elle doit avoir lieu mercredi 20 juillet, au lendemain de la comparution, ce mardi, de Rupert Murdoch et de son fils James devant une commission parlementaire à Westminster.
Pourquoi ce coup de tonnerre ? Au départ, il y a les révélations de notre confrère The Guardian sur ce qui aurait pu rester un fait divers : la pratique d'écoutes téléphoniques illégales de la part d'un des fleurons du groupe Murdoch - l'hebdomadaire News of the World, aujourd'hui fermé.
Mais l'affaire a mis au jour un "système Murdoch" inquiétant pour la démocratie. Il y a d'abord la complicité de certains responsables de la police - corrompus d'une façon ou d'une autre -, qui semble avoir longtemps fermé les yeux sur les pratiques de la presse Murdoch. Le chef de Scotland Yard et l'un de ses adjoints ont démissionné cette semaine.
Il y a ensuite cette proximité que les milieux politiques ont cultivée avec un groupe de presse dont ils avaient peur. Avec le Times, le Sunday Times, le Sun, News of the Word et la chaîne Sky News, Murdoch disposait à Londres d'une puissance de feu capable de faire et de défaire bien des réputations, voire de peser sur les élections.
Dans un récent éditorial, le Financial Times écrivait : "La manière dont les responsables politiques ont eu une attitude de soumission à l'égard de Murdoch, au point d'être bien timides dans la poursuite d'enquêtes criminelles sur son groupe, est l'un des aspects les plus troublants de l'affaire des écoutes."
Conservateurs et travaillistes, tous ont soigné leurs relations avec Murdoch. David Cameron est-il allé plus loin que les autres ? C'est ce qu'on lui reproche aujourd'hui.
Il a, un temps, employé, comme responsable de la communication à Downing Street, Andy Coulson, ancien rédacteur en chef de News of the World. Il entretient des relations d'amitié avec Rebekah Brooks, ex-responsable des opérations du groupe à Londres.
Comme par hasard, il a tranché en faveur du groupe Murdoch quand il a fallu l'autoriser à prendre le contrôle du bouquet de chaînes de télévision BSkyB (opération aujourd'hui annulée).
Autant qu'un groupe de presse, le plus grand du monde, ce qui s'effondre aujourd'hui - et il faut s'en féliciter -, c'est le système Murdoch : une façon brutale et sans scrupule de mêler business et politique. M. Cameron en sera peut-être la dernière victime.
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