L'appui que les Québécois semblent prêts à donner à un nouveau parti de centre droit, pas encore né, surprend. Qu'il puisse déjà être en tête avec 30 % des intentions de vote est aussi irréel que spectaculaire. Est-ce une simple poussée de fièvre qui pourrait retomber une fois que l'on connaîtra mieux la nature de cette nouvelle formation politique... si jamais elle voit le jour? Il y a tout de même un peu plus que cela.
Ce que souligne le sondage Léger Marketing, dont les résultats ont été publiés hier dans Le Journal de Montréal, c'est d'abord la très grande volatilité de l'électorat. Que tout près d'un électeur sur trois soit disposé à changer d'allégeance sur la simple évocation d'une idée confirme la perte de confiance des Québécois envers l'ADQ, le PLQ et le PQ, les trois partis qui depuis 1994 ont déterminé le programme politique du Québec.
Ce n'est pas la première fois que les électeurs manifestent leur désabusement envers leurs politiciens. Ainsi, à l'automne 2002, ils avaient éprouvé un intérêt soudain pour l'ADQ. Cette poussée de fièvre ne dura toutefois pas. À l'élection de 2007, ils manifestaient à nouveau leur insatisfaction en faisant de ce parti l'opposition officielle, un statut qu'ils se dépêchèrent de lui enlever quelques mois plus tard.
Encore une fois, le Québec se cherche. De nouveau, il semble prêt à se faire courtiser par quiconque lui dit ce qu'il veut entendre. Or, notons-le, ce qu'il veut entendre est un propos davantage de droite que de gauche, comme le montrent ces poussées de fièvre récurrentes à droite depuis 2002. On ne peut ignorer le fait qu'un nombre important de Québécois est réceptif à un discours qui valorise davantage les valeurs individuelles que collectives, lesquelles constituaient depuis les années 1960 le principal ferment idéologique des partis qui ont occupé le pouvoir.
Le groupe qui gravite autour de François Legault s'affiche ouvertement de centre droit, tant par conviction que par opportunisme pour profiter de l'intérêt à l'égard de ce discours. Néanmoins, on peut soupçonner que l'attrait principal que représente cet éventuel nouveau parti est ailleurs. Il est plus dans le renouveau du personnel politique que représentent les noms de ceux qui pourraient se joindre à l'ancien ministre péquiste. À l'heure de la commission Bastarache, il ne peut en être autrement. Il est aussi dans cette rupture proposée avec le binôme souveraineté-fédéralisme qui polarise le débat politique depuis des décennies. Il est dans la capacité de changement qu'il peut représenter par rapport aux partis existants réfractaires à tout aggiornamento.
Cette troisième voie qu'attend depuis des années une partie de l'électorat québécois ne s'est jamais matérialisée. L'émergence d'un nouveau parti dans un système politique fait pour deux partis est une longue affaire. Il reste à François Legault à proposer un programme, puis à trouver des candidats, de l'argent et surtout des militants, ces bras indispensables au travail politique. On verra alors ce que les Québécois en penseront. Puis, il n'est pas dit que les autres partis ne réagiront pas. Les choses pourraient se présenter tout autrement dans deux ans si Pauline Marois réussissait à refaire du Parti québécois la coalition droite-gauche qu'il a déjà été et si le Parti libéral se donnait un nouveau chef. La troisième voie espérée pourrait s'avérer illusoire.
Nouveau parti de centre droit
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