Le plus touchant
La commission a entendu, à la fin de ses audiences, l'un des témoignages personnels les plus émouvants qu'elle a entendus, à donner la chair de poule. Il s'agit de celui d'une femme, Tan Thi Cuc, venue parmi les «boat people» en 1979.
Ses parents l'ont laissée partir, sur la plage, avec ses cinq frères et soeurs, à bord d'un bateau, pour qu'ils aient une vie meilleure que la leur. Elle a tout fait, au fil des ans, pour éviter d'être séparée de ses frères et soeurs, respectant ainsi la promesse faite à ses parents.
Elle a d'abord occupé un emploi de plongeuse. Elle a ensuite repris ses études au
Québec, partageant ses prêts et bourses avec ses frères et soeurs pour vivre.
Aujourd'hui, elle est ingénieure, depuis 20 ans. Ses frères et soeurs sont
informaticiens ou ingénieurs.
Remplie de gratitude pour l'accueil qu'elle a reçu à Granby, elle a tenu à remercier tous les Québécois pour leur hospitalité, leur gentillesse, leur ouverture.
Plus tard, elle a réussi à faire venir ses parents, qui ont été acceptés au Québec, bien qu'ils ne parlent ni le français ni l'anglais, afin que la famille soit reconstituée.
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Extrait de La réalité multiculturelle dans les CPE devant Bouchard-Taylor
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Récit touchant d'une immigrante
Bouchard ému
Valérie Dufour
Le Journal de Montréal 01/12/2007
Sur une plage du bord de la mer de Chine, Tan Thi Cuc a fait une seule promesse à ses parents, celle de prendre soin de ses frères et soeurs dans leur nouvelle vie. Et elle l'a fait.
Cette ingénieure de l'Estrie a livré un poignant témoignage hier devant la commission Bouchard- Taylor. Celui d'une immigrante partie de rien, qui a réussi un second départ et qui est aujourd'hui reconnaissante envers sa terre d'accueil.
«Vous savez, c'est très dur de quitter un pays où on vous a mis à la mer. Nous avons été accueillis à bras ouverts par les Québécois. C'est là que le mot Bienvenue prend tout son sens», a souligné la dame d'une quarantaine d'années.
Heureuse plongeuse
Originaires de Saigon, Tan Thi Cuc et ses cinq frères et soeurs ont débarqué au Canada en 1979, après avoir séjourné dans un camp de réfugiés. Ils faisaient partie de la vague des boat people vietnamiens.
«Nous sommes arrivés au Québec avec comme seul bagage ce que nous avions sur notre dos et 28 $ que le gouvernement nous a donnés avant de nous conduire à Granby.»
Mme Tan Thi a raconté avec humour avoir rapidement décroché un emploi de plongeuse. «Je leur ai dit que j'avais failli me noyer en traversant l'océan. Lorsque j'ai compris que c'était pour faire la vaisselle, j'étais aux anges!»
Dans la jeune vingtaine, elle a profité de modifications apportées au programme de prêts et bourses par le gouvernement de René Lévesque pour entrer à l'université et décrocher un diplôme en génie. «Ça n'a pas été facile, cet argent servait à faire vivre toute ma famille.»
Tan Thi Cuc s'enflamme contre ceux qui se moquent de la crise identitaire des Québécois. «Ils ont des valeurs -- des valeurs qui sont les miennes -- et ils ont raison de les défendre!», a-t-elle martelé.
Uncle Ben's
«Les Québécois forment un grand peuple qui a beaucoup changé. À mon arrivée, j'avais du mal à trouver du vrai riz. J'ai dû manger du riz de l'oncle Ben pendant longtemps. Ce n'est plus le cas aujourd'hui», souligne en riant Tan Thi Cuc.
«Je viens d'une culture où l'égalité homme-femme ne va pas de soi. [...] Ici, j'ai été capable d'exercer un métier majoritairement masculin. Le Québec m'a donné une chance. [...] La majorité de ma famille est aujourd'hui ingénieur ou informaticien», a-t-elle raconté.
«Le jour où mes deux jeunes soeurs ont réussi leur diplôme est le plus beau jour de ma vie. Plus que le jour où j'ai réussi mon bac à l'École Polytechnique. J'ai rempli une promesse faite à mes parents lorsqu'ils nous ont bénis sur la plage avant qu'on prenne le départ.»
Les parents de Mme Tan Thi sont arrivés bien plus tard. «Ma mère ne pouvait pas apprendre le français, même si je lui faisais écouter des cassettes le soir. Mais le gouvernement a accepté de lui donner la citoyenneté. Ça a été extraordinaire de nous offrir un pays et de nous accepter.»
Visiblement ému, Gérard Bouchard a remercié la dame d'avoir pris le temps de venir témoigner. «Votre histoire est tragique et magnifique.»
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De «boat people» à ingénieure
Laura-Julie Perreault
La Presse 1er décembre 2007
Montréal - Problème de reconnaissance de diplôme. Chômage. Rêves brisés. Au cours de la dernière semaine, la commission Bouchard-Taylor a entendu plusieurs récits d'immigrés déçus par leur expérience au Québec. C'est donc comme un baume au coeur qu'elle a reçu hier après-midi le témoignage de Thi-Cuc Tan.
Hier matin encore, la Québécoise d'origine vietnamienne ne pensait plus se présenter devant la Commission. «Mais je suis venue pour remercier tous les Bovet, les Larivière, les Dumoulin de Granby qui m'ont accueillie en 1979», a-t-elle raconté.
Elle n'avait que 18 ans quand, sur une plage du Vietnam, elle a dit adieu à ses parents en leur faisant la promesse de voguer vers une vie meilleure avec ses cinq frères et soeurs cadets. Le plus jeune n'avait que 6 ans.
«Quand nous sommes arrivés au Québec, nous n'avions que nos vêtements sur le dos et 28$ que le gouvernement nous a donnés», a raconté Mme Tan, hier, dans un français impeccable. Dans l'hôtel où ils ont été logés à Granby, les Tan ont découvert le Québec par l'entremise de familles québécoises venues leur offrir soutien et amitié. «Nous avons été mis à la mer et nous avons trouvé au Québec un pays aux bras ouverts.»
Quand on lui a d'abord offert un travail de plongeuse, elle a eu la peur de sa vie. La traversée de l'océan lui avait enlevé le goût de l'eau. «Mais quand j'ai su que c'était pour faire la vaisselle, j'étais vraiment très contente.»
Grâce aux prêts et bourses, Thi-Cuc Tan a réussi à retourner aux études.
Elle est ingénieure depuis 20 ans. Ses frères et ses soeurs sont aujourd'hui soit informaticiens, soit ingénieurs comme elle.
«Le jour où ils ont eu leur diplôme a été le plus beau de ma vie. J'ai rempli la promesse que j'ai faite à mes parents», a raconté Mme Tan. Dans la salle du Palais des congrès, on aurait entendu voler un papillon.
Selon cette battante, le Québec est toujours une terre d'accueil exceptionnelle. «Je veux dire aux nouveaux immigrés prenez possession de ce que vous avez ici, grandissez! Épanouissez-vous. C'est un pays qui vous le permet. Je serais très malheureuse de retourner dans mon pays et de marcher derrière un homme», a tranché celle, qui, depuis, a pu retrouver ses parents.
Gérard Bouchard n'a pu cacher son émotion à la suite de ce témoignage. «S'il y a 10 minutes que nous ne regrettons pas, ce sont celles que nous vous avons accordées», a lancé le sociologue.
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