Le Québec «doit se réveiller»

Un auteur et professeur explique dans un nouveau livre que la province est paralysée par ses élites

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« Nouveau racisme, le multiculturalisme confine des générations d’immigrants à leur quétainerie minoritaire »





Inévitablement, les Québécois ne parleront qu’en anglais d’ici quelques décennies, prédit l’auteur et professeur Maxime Blanchard, qui a pour cette raison choisi d’écrire en anglais les derniers chapitres de son plus récent livre, Le Québec n’existe pas. Mais loin de n’être qu’un prophète de malheur, ce Québécois exilé à New York se décrit plutôt comme un patriote, qui dit tout haut ce que plusieurs pensent peut-être tout bas. Provocateur, nostalgique et fier souverainiste, il espère ainsi réveiller son peuple, qu’il trouve paralysé par ses élites culturelles et intellectuelles, pour qu’il défende sa langue et sa culture.




Pourquoi Le Québec n’existe pas comme titre ?


Parce que [c’est s’en faire] accroire [que] de dire qu’il existe s’il n’est pas indépendant, parce qu’il va disparaître. Le titre est inspiré de quelque chose de très trivial. C’est que, quand on voyage, on se rend compte que le Québec n’existe pas. Si on dit qu’on est Québécois, les gens ne savent pas de quoi on parle, sauf dans quelques pays francophones. Il faut l’expliquer et les gens nous disent: «Ah, vous êtes Canadien.» [...] Ça peut paraître banal, mais, même à l’intérieur des frontières, pour plusieurs, l’identification au Québec est minimale ou ­inexistante.











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Photo courtoisie





Dans votre livre, vous montrez du doigt l’immigration. Pourquoi ?


Il faut montrer de l’empathie à ceux qui doivent fuir leur pays, et être accueillants. Ce que je déplore, c’est que le multiculturalisme canadien nous transforme en tribu. Je voudrais que les gens s’intègrent et se mélangent, mais ce n’est pas ce qui se passe. C’est une cohabitation silencieuse où l’on se regarde en chiens de faïence et on ne se parle pas.


Faudrait-il alors fermer nos frontières ?


En immigration, il y a deux discours. Celui, raciste et intolérant, dont je me moque dans mon livre et que je refuse. Mais il y a aussi celui des élites bienpensantes, qui disent aux classes populaires: «Vous êtes racistes.» Il ne faut pas parler d’immigration ou exprimer des inquiétudes, parce que, sinon, vous êtes aussitôt taxé de racisme. Il y a une forme de silence et de censure qui s’établit et, si on ne parle pas d’un sujet, des gens, comme Donald Trump aux États-Unis, vont s’en emparer.


Que reprochez-vous d’autre à ces mêmes élites ?


Il y a une espèce de fétichisme de l’immigration, parce qu’on n’a pas l’air de se demander pourquoi les gens viennent ici, on trouve juste ça le fun d’avoir des restaurants ethniques dans son quartier. On manque de sobriété, c’est presque obscène de trouver ça le fun, la diversité culturelle, car il y a un drame à l’origine de ça. Les guerres et l’exploitation économique, c’est en partie la faute des pays occidentaux.


Comme le président américain Donald Trump, vous critiquez les élites. Vos discours se ressemblent-ils ?


Je n’ai rien à voir avec Trump (rires), mais je pense qu’il faut critiquer la gauche à partir de la gauche. Je trouve les élites intellectuelles et culturelles très complaisantes et elles se définissent contre les classes populaires. Les intellectuels portaient les préoccupations des ouvriers et des paysans, si on se rappelle les luttes des années 60, par exemple. Ils se sentaient liés à la majorité de la population. Les élites défendent plus leurs privilèges, car elles se définissent contre le peuple, les régions ou les banlieusards, par exemple.


Vous dénoncez aussi la mondialisation, dans votre livre. Pourquoi ?


On ne peut qu’être contre la mondialisation si on n’est pas un banquier [...] C’est devenu une forme de colonialisme. Avant, on envoyait des armées dans les pays; aujourd’hui, ce sont des capitaux qui circulent. J’en vois les effets au Québec. La mondialisation, c’est la fin de l’histoire et de la culture de chez nous.


Extrait


À ce Québec «tricoté serré», on ne peut ni s’allier ni s’intégrer; les adhésions restent à jamais impossibles. Personne d’autre ne peut partager les combats pour une nation francophone d’Amérique, libre et juste; ces luttes n’appartiennent qu’aux Gaulois linguistiques et chouans catholiques du ghetto pure laine. Le Québécois de souche et l’immigrant insensible ne peuvent se rencontrer qu’en devenant canadian: citoyenneté neutre, passeport rassembleur et langue anglaise. Nouveau racisme, le multiculturalisme confine des générations «d’immigrants» à leur quétainerie minoritaire. À coup de «cuisine typique» et de costumes exotiques, chacun se pétrifie dans un musée de cire clanique.


Le Québec n’existe pas de Maxime Blanchard est publié par les Éditions Varia.




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