La directrice générale du CPE Gamin Gamine, à Terrebonne, s’inquiète vivement de l’inversion du pipeline 9B d’Enbridge, qui fera bientôt couler 300 000 barils par jour vers Montréal. Et pour cause. Cet oléoduc traverse directement la cour de l’établissement, qui accueille des enfants de moins de cinq ans.
« On ne sait pas ce qui va arriver. Il n’y a même pas de plan d’urgence. Qu’est-ce qui va arriver s’il y a une malchance ou un bris ? On ne sait pas, mais le danger est là », fait valoir au Devoir Josée Bourbonnière, au nom du CPE situé sur le boulevard de la Pinière, au sud de l’autoroute 640.
La directrice générale souligne ainsi qu’Enbridge n’a jamais pris contact avec l’établissement au cours du processus devant mener à l’inversion du flux dans le pipeline, construit en 1975. « Ils ne nous ont jamais contactés. Ça ne semble pas faire partie des préoccupations de cette entreprise. Pourtant, nous avons une clientèle vulnérable, soit des enfants de 0 à 5 ans. Nous sommes inquiets. »
Mme Bourbonnière juge d’ailleurs la situation pour le moins paradoxale. En effet, le CPE est tenu, en vertu de la législation québécoise, de se doter d’un plan d’évacuation en cas de situation d’urgence. Celui-ci doit d’ailleurs être approuvé par les services d’incendie. Mais à l’heure actuelle, ce plan n’a toujours pas été adapté pour tenir compte du passage prochain de 300 000 barils de brut à moins de 15 mètres de la porte d’entrée.
« Il serait important, pour notre établissement, mais aussi pour les commerces du secteur, de mettre en place un plan d’urgence, explique Mme Bourbonnière. Il ne faudrait pas se dire, après une catastrophe, qu’on aurait dû mettre quelque chose en place. » Un peu à l’ouest du CPE, toujours sur le boulevard de la Pinière, l’oléoduc passe notamment dans la cour du centre d’amusement L’Astuce. Cette entreprise propose notamment des forfaits pour des fêtes d’enfants ou de groupes scolaires.
Écoles inquiètes
La direction du CPE Gamin Gamine n’est pas la seule à manifester des inquiétudes en lien avec l’inversion du flux dans le pipeline 9B. La Commission scolaire de Laval (CSDL) a écrit au début du mois de février à l’Office national de l’énergie pour lui faire part de ses craintes. « Considérant les risques associés au transport de pétrole, nous avons de sérieuses craintes pour la sécurité de nos élèves et de notre personnel », écrit sa présidente, Louise Lortie.
Le pipeline d’Enbridge traverse en effet des zones résidentielles densément peuplées de l’est de Laval. Chemin faisant, il passe à environ un kilomètre de l’école primaire Hébert, et à moins de 500 mètres des écoles Fleur-Soleil et L’Escale. Un total de 1450 élèves fréquentent ces écoles. Et à Terrebonne, l’oléoduc passe à une cinquantaine de mètres du terrain de l’école primaire Bernard-Corbin (675 élèves).
Le Devoir a contacté l’Office national de l’énergie pour obtenir une réaction. « Nous ne trouvons pas la lettre du 5 février 2015 de Madame Louise Lortie, présidente de la Commission scolaire de Laval. Je ne peux donc pas faire d’autres commentaires sur ce point », a répondu une porte-parole de l’organisme fédéral chargé de réglementer les pipelines au Canada.
Enbridge a aussi reçu une copie de la lettre de la CSDL. Son porte-parole, Éric Prud’Homme, a souligné vendredi que l’entreprise entend y donner suite sous peu. « Si une école devait être évacuée, cela relèverait de la Ville, et non d’Enbridge, a-t-il en outre précisé par courriel. Par exemple, c’est aux autorités locales et non à une entreprise privée de délimiter un périmètre de sécurité ou de décider de l’évacuation de personnes. »
« Notre rôle, a-t-il ajouté, est de s’assurer qu’ils ont l’information et de les soutenir au moyen de nos ressources humaines, matérielles et financières. Enbridge réalise régulièrement des exercices avec les premiers répondants, et des exercices ont eu lieu à Laval dernièrement. »
Du côté de la Communauté métropolitaine de Montréal, on estime néanmoins qu’il reste des questions sans réponses, notamment concernant les plans d’urgence. Enbridge souligne toutefois que des rencontres avec les premiers intervenants des municipalités concernées doivent avoir lieu dans les prochaines semaines.
Selon les plans de la pétrolière, l’inversion du flux dans le pipeline 9B devrait devenir réalité d’ici au mois de juin. Enbridge fera du même coup passer la capacité quotidienne de transport de 240 000 à 300 000 barils. La ligne 9B transportera différents types de pétrole de l’Ouest.
Le projet d’Enbridge inquiète un CPE
L’établissement déplore le flou autour de l’inversion de la ligne 9B, qui passe dans sa cour
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