Tous les yeux des Québécois préoccupés par les droits des peuples à vivre
dans la dignité et la liberté sont présentement tournés vers la Chine,
alors qu’il y a péril en la demeure, ici même au Québec. Le Tibet et la
Chine ont fait la première page de tous nos journaux quelques jours après
la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo, alors qu’il existe au
Québec un tiers-monde bien à nous, maintenu dans un état de
sous-développement chronique par le gouvernement fédéral et qui ne soulève
que peu d’émotions et de sympathie de notre part, comme l’ont si bien
démontré Richard Desjardins et Robert Monderie dans leur film «Le Peuple
invisible». Si les Québécois et leur gouvernement ne se réveillent pas
bientôt, il se pourrait bien que, pour les mêmes raisons que la communauté
internationale a appuyé la déclaration unilatérale d’indépendance du Kosovo
et appuie actuellement les revendications du Tibet à l’endroit de la Chine,
la souveraineté du Québec sur de nombreux territoires au Nord du Québec
soit menacée.
Parce que nous n’avons pas la juridiction sur les populations autochtones
qui occupent nos territoires, nous risquons d’être mis devant le fait
accompli d’une situation que nous avons contribué à laisser perdurer par
notre silence et notre mutisme. Notre ignorance de ces populations ne sera
plus une excuse lorsque les autochtones du Québec revendiqueront le droit à
l’autodétermination sur certains territoires qu’ils occupent depuis des
temps immémoriaux ; lorsque ces Autochtones invoqueront les mauvais
traitements subis dans les pensionnats catholiques, les enfants violés et
battus par nos bons ecclésiastiques québécois ; lorsque les Autochtones
souligneront l’état d’extrême pauvreté, de sous scolarisation et de sous
développement dans lequel vivent de nombreuses communautés. Lorsque les
Autochtones auront fait la démonstration de notre négligence à les aider
quand nous aurions pu le faire, ils apporteront aux ennemis du Québec les
bonnes raisons pour partitionner le territoire québécois. Ce territoire sur
lequel nous n’avons jamais pu totalement exercer notre souveraineté en
raison de l’existence d’une constitution qui nous prive des outils
fondamentaux pour le faire. Nous ne pourrons alors blâmer d’autres que
nous-mêmes, puisque nous serons les seuls responsables de notre retard à
quitter le Canada quand il était temps, laissant la Cour Suprême éroder
inexorablement les pouvoirs du Québec jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien à
gruger.
Il sera peut-être trop tard pour réagir lorsque le gouvernement du Québec
réalisera que le Québec aurait du quitter le giron constitutionnel du
Canada bien avant que l’irréparable arrive, parce que le gouvernement
fédéral ne s’opposera pas à la partition ethnique du Nord du Québec, même
si c’est en raison de sa propre turpitude, de son incurie et de son
incapacité à bien administrer les populations autochtones sous sa
juridiction que cela se produit; parce que le reste de la planète sera
témoin du tiers-monde qui existe au Québec et nous tiendra responsable à la
place du Canada, puisqu’il s’agit de population habitant notre territoire;
parce que ce sera l’intérêt manifeste du Canada de voir le Québec affaibli
face à la communauté internationale.
Le jour où le reste du Canada applaudira parce que la politique raciste de
son gouvernement à l’égard des autochtones du Québec aura insidieusement
contribué à affaiblir la souveraineté du Québec sur les territoires occupés
par des Autochtones, il sera trop tard. L’eau et l’énergie du Nord ne
seront plus sous la juridiction du Québec ; les projets d’harnachement des
grandes rivières du Nord nous échapperont et le Québec aura encore été
floué et affaibli par ses bons amis canadiens, comme il l’a été tout au
long de son histoire depuis la conquête de 1760.
Que ceux qui appuient la partition ethnique du Kosovo et sont outrés par
le traitement de la Chine à l’égard du Tibet se rassurent, les Canadiens ne
seront pas les seuls à applaudir lorsqu’on morcellera notre territoire pour
des raisons ethniques et humanitaires. Tous ceux qui ont des velléités sur
l’eau du nord, en particulier nos voisins du sud, y verront une occasion
d’échanger d’importants capitaux privés contre le droit d’y exploiter les
nombreuses ressources naturelles qui y regorgent. Les Autochtones n’auront
alors aucune raison de lever le nez sur d’importants moyens financiers qui
leur ont toujours fait défaut et qui seront alors mis à leur disposition.
Ce jour-là, il n’y aura plus aucun traité qui subsistera, l’argent aura
tout acheté. Nos tentatives de réconciliation, trop tardives pour paraître
honnêtes, n’y changeront rien, elles seront toutes repoussées. Money talk
!
Le jour où les Québécois prendront conscience que l’intégrité de leur
territoire est menacée à cause de l’incompétence d’Ottawa à bien
administrer les Autochtones, il n’y aura pas que les indépendantistes pour
s’en inquiéter, il y aura également beaucoup de fédéralistes en affaires ou
à la tête de sociétés d’État impliquées dans le développement du Nord, les
capitaux fuiront le Québec. Le jour où de nombreux Québécois habitant
Westmount - ingénieurs, comptables ou avocats - se rendront compte qu’ils
n’auront plus un accès privilégié à la richesse du Nord parce que ces
territoires ne seront plus sous la juridiction du gouvernement qui leur
accordait jadis de lucratifs contrats, il y aura peut-être plus de
personnes au Québec pour réaliser que l’indépendance n’a rien à voir avec
l’ethnie, que c’est tout simplement une question de citoyenneté, de
richesse et de prospérité. Ils oublieront vite la loi 101 et leurs
mesquineries à l’endroit de la majorité francophone, parce que leur survie
financière sera menacée. Ils réaliseront alors que parler français au
Québec n’est vraiment pas un obstacle à faire de l’argent. Money talk !
Qui appuiera le Québec lorsqu’il sera seul face au jugement des plus puissants
pays de la planète ? Tous se souviendront alors de la Serbie et du Kosovo,
et ce ne sera pas dans notre intérêt !
Voilà pourquoi le Québec doit ouvrir avec les autochtones un dialogue dépassant
les questions territoriales et menant à des mesures concrètes visant à
considérablement améliorer le sort de ces populations, même si cela doit
conduire à un empiétement sur la juridiction fédérale, puisqu’il en va de
la souveraineté du Québec sur son territoire et les populations qui
l’habitent. Le Québec pourra toujours expliquer son intervention par
l’extrême urgence de la situation, alors qu’un attentisme béât ne saurait
se justifier compte tenu des conditions auxquelles les Autochtones du
Québec sont confrontés. Ainsi, notre gouvernement ne pourra être trouvé
complice du gouvernement fédéral dans l’abandon de ces populations à
elles-mêmes.
Enfin, le gouvernement du Québec, même s’il est fédéraliste, doit
surmonter ses préjugés à l’endroit de l’option indépendantiste en
l’abordant comme une solution au péril qui nous guette au-delà de toute
partisanerie politique. En raison des intérêts supérieurs de la Nation, le
gouvernement du Québec doit dorénavant voir l’indépendance comme l’outil
privilégié de l’expression de sa souveraineté sur l’ensemble de son
territoire et sur toutes les populations qui l’habitent, peu importe leurs
origines ethniques. Il en va de l’intégrité des limites territoriales de
l’État du Québec et de la prospérité de l'ensemble de ses citoyens!
***
Sur le même sujet:
Pierre Corbeil, le choix des Cris?
Il n’y a que deux conditions gagnantes : débattre collectivement et voter majoritairement
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
1 commentaire
Archives de Vigile Répondre
28 octobre 2015L'histoire des peuples est l'histoire de la trahison de l'unité. • Antonin Artaud
Vous avez parfaitement raison. J'ai voyagé dans toutes les provinces du Canada et travaillé dans persque toutes les provinces. Le constat que vous faites de la situation difficile des premières nations est exacte et le sort de ces nations est même pire dans le ROC. La question nationnal au Québec, la subversion politiques de nos adversaire prévus au plan "B" , aidé par des tensions linguistiques rend le Québec très vulnérable. Votre scénario est très plausible et probablement déjà en marche, comme il est possible de la constater dans l'établissement detrimentale pour le Québec des frontières nord du territoire.