Le gouvernement Couillard a récemment réactivé le projet phare de l’ancien premier ministre Jean Charest, c’est-à-dire le Plan Nord. Malgré la grande pompe entourant l’annonce du gouvernement, un vide et une imprécision — qui n’ont jamais été éclairés depuis que les gouvernements tant péquistes que libéraux ont développé une rhétorique sur le Nord — persistent : où est la frontière du Québec dans le nord ?
Jean Charest se plaisait, dans ses discours officiels sur le Nord, à mentionner, avec un élan nationaliste surprenant, que le Québec bâtirait dans le Nord des ports en eaux profondes. Il est maintenant reconnu par ceux qui s’intéressent aux questions nordiques que ce projet est impossible : en raison d’une loi archaïque de 1912, l’ensemble des eaux nordiques, au-delà de la rive, appartient au Nunavut. Si on venait à bâtir les ports si chers au gouvernement libéral, ceux-ci se trouveraient en dehors du Québec.
Nous avons pris la liberté d’appeler un agent de la ligne d’information du Plan Nord, récemment mise en fonction par l’actuel gouvernement afin de répondre aux questions des citoyens. Notre question était bien simple. Le gouvernement actuel endosse-t-il le régime frontalier actuel ? Après avoir discuté avec deux préposés, on nous a demandé de soumettre notre requête par écrit. Depuis, nous n’avons eu aucune réponse ni même un accusé de réception de la part de l’organisation du Plan Nord.
Une telle situation est non seulement navrante, mais profondément inquiétante. Il s’agit d’une question fondamentale. Où s’arrête le Nord ? Le gouvernement accepte-t-il que la frontière septentrionale du Québec soit dictée par une loi plus que centenaire qui ne tient compte d’aucun développement en droit maritime effectué depuis ? Comment peut-on parler du Nord sérieusement si on est incapable de le définir ?
Ce qui est désolant de ce gouvernement est qu’il pourrait facilement agir s’il faisait preuve d’un peu d’audace, ce qui semble malheureusement être une denrée plutôt rare en ces temps. Le Québec n’est pas le seul à avoir une frontière qui s’arrête à la rive : l’Ontario et le Manitoba vivent la même situation. Il serait facile d’adopter une approche qui respecte les droits des Premières Nations, en accord avec les autres provinces concernées pour mettre fin au monopole du gouvernement canadien sur les eaux nordiques qui est de nos jours complètement caduc. Sans oublier que Terre-Neuve-et-Labrador et la Colombie-Britannique possèdent la juridiction sur leurs eaux nordiques. Il y a une profonde iniquité au sein de la fédération canadienne entre, d’un côté, ces provinces et, de l’autre, le Québec, l’Ontario et le Manitoba, lesquelles ne pourraient même pas bâtir un quai dans le Nord!
Cette situation est dramatique et nous ne comprenons pas ce que les gouvernements attendent pour la dénoncer et prendre les initiatives nécessaires afin de la corriger. Pouvons-nous pour une fois avoir une administration dans l’action et non la réaction ? Attendrons-nous collectivement que des richesses considérables soient découvertes dans le Nord et que le gouvernement fédéral prenne une position ferme afin d’exclure toute forme de révision de frontière ? Nous n’aurons que nous-mêmes et notre silence à blâmer si un tel scénario se produisait. Nous aurons tout simplement regardé passer le bateau.
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