Le mur à la frontière mexicaine que Donald Trump a promis à ses électeurs de construire ne cesse de détériorer les relations entre le Congrès et la Maison-Blanche, surtout après que le Président a décrété l’«urgence nationale» pour débloquer des fonds supplémentaires afin de financer ce chantier. Un analyste a commenté la situation pour Sputnik.
Le pouvoir exécutif essaie de contourner les règles qui gèrent l'établissement des lois et du budget fédéral des États-Unis, a déclaré à Sputnik Arturo Lopez-Levy, professeur au Gustavus Adolphus College, dans le Minnesota.
L'interlocuteur de l'agence l'a dit notamment au sujet d'un nouveau chapitre qui s'ouvrait de toute évidence dans l'affrontement entre Donald Trump et ses opposants politiques après que le Président a recouru à une procédure d'urgence pour financer la construction d'un mur à la frontière mexicaine.
«En vertu de la Constitution, c'est le Congrès qui tient les cordons de la bourse. C'est lui qui, par la loi, doit autoriser toute dépense publique à l'exception des situations d'urgence», a-t-il expliqué.
Et de rappeler qu'incapable de faire voter par la Chambre des représentants et le Sénat les crédits budgétaires pour le mur, Donald Trump avait décidé de contourner la branche législative en recourant à une procédure d'urgence.
D'après l'expert, cette procédure était destinée à rediriger environ huit milliards de dollars (plus de sept milliards d'euros) de fonds fédéraux déjà alloués, notamment au Trésor et au Pentagone, vers le chantier du mur.
«Le Président possède somme toute des compétences suffisamment larges pour pouvoir décréter des situations d'urgence, et quelques Présidents en ont usé par le passé. Notamment en politique étrangère, les exemples n'en manquent pas, et l'état d'urgence qui limite les relations avec Cuba ou l'Iran est toujours en vigueur. À l'intérieur des États-Unis, la situation d'urgence déclarée après les attentats du 11 septembre 2001 est maintenue. On parle même d'abus de la notion de situation d'urgence», a poursuivi l'analyste cubain.
Selon ce dernier, les États américains qui ont porté plainte contre le Président afin de contester sa décision affirment que rien ne justifie à présent l'«urgence nationale» dans le pays. Aussi, le pouvoir législatif peut-il bien adopter une résolution sur le rejet de l'état d'urgence.
«Nul n'ignore qu'il y a même au sein du Parti républicain un groupe qui ne digère tout simplement pas Trump», ainsi Mitt Romney, ex-candidat à la présidence, a déclaré être contre ce qu'il qualifiait d'un «abus de la part du Président», a relevé M. Lopez-Levy.
L'universitaire a toutefois souligné que le mur était la principale promesse de campagne de Donald Trump.
«Se livrant à une démagogie, Trump disait que le Mexique financerait lui-même le mur, mais fait tout pour le moment pour le construire et se plaît manifestement dans son aura d'homme politique hors du commun» et ce même s'il ne fait rien pour s'attaquer aux origines des problèmes effectifs des migrations, de la sécurité et du narcotrafic, a-t-il noté.
Et de supposer qu'alors que l'échéance de l'élection de 2020 se profilait, la construction du mur garantirait à Donald Trump l'approbation de l'essentiel de son électorat, constituant entre 35 et 38% des électeurs et plus de la moitié du Parti républicain.
D'après Arturo Lopez-Levy, bénéficiant du soutien de l'essentielle de la base électorale et brandissant la menace d'autres candidats au sein des Républicains ou parmi leurs rivaux, Donald Trump influe sur le choix de cette base qui «craint une éventuelle alternative démocrate».
«Ainsi, ce que Trump fait est efficace et fait partie de sa stratégie électorale pour 2020», a résumé l'interlocuteur de Sputnik.
Après que Donald Trump a déclaré l'«urgence nationale» pour débloquer des fonds supplémentaires et construire un mur à la frontière mexicaine, 16 États américains avec à leur tête la Californie ont porté plainte contre le Président états-unien afin de contester sa décision.
Les observateurs constatent qu'après le shutdown le plus long dans l'Histoire des États-Unis, on assiste sans doute à présent à un nouvel affrontement, cette fois, judiciaire, entre le Président et ses opposants politiques.