Le gouvernement conservateur a tenu à réaffirmer récemment qu'il ne comptait pas reculer sur son projet de loi C-12, déposé en avril dernier, en dépit de rumeurs à l'effet qu'il serait tabletté. Le projet de loi garantit que le Québec conservera ses 75 sièges à la Chambre des communes, mais prévoit la création de 30 nouvelles circonscriptions. Notre poids démocratique passerait de 24,3% à 22,4% des sièges de la Chambre des communes.
Historiquement, au fil de ses différentes constitutions, les Canadiens français ont eu droit à une représentation égale lorsqu'ils formaient le peuple majoritaire. Lorsque leur nombre est devenu inférieur à celui des Canadiens anglais, leur statut de minoritaire a été enchâssé dans la Constitution de 1867. À l'époque, les Canadiens français détenaient 36% des sièges à la Chambre des communes.
Depuis, les mutations démographiques des deux peuples fondateurs se sont faites largement au détriment de notre nation.
Sans nier l'importance de la question démographique, il importe de rappeler une évidence: même une autre revanche des berceaux serait insuffisante. Avec un peu plus de 7 millions de Québécois et plus de 23 millions d'habitants dans le reste du Canada, l'écart est insurmontable et les francophones ne redeviendront jamais plus nombreux que les anglophones au sein de l'ensemble canadien.
Le projet de loi conservateur est à l'image de l'évolution démographique du Québec, et il constitue une mesure fondamentalement démocratique: il s'agit d'accorder à la majorité la place qui lui revient au sein de son Parlement. Cependant, ce serait oublier que cette Chambre a reconnu officiellement que les «Québécois forment une nation dans un Canada uni», faisant suite à son engagement électoral de réaliser un «fédéralisme asymétrique» avec le Québec. Si Ottawa souhaite que cette motion quitte le domaine du symbolique et se traduise en reconnaissance réelle, le gouvernement canadien devra poser des gestes concrets.
Qu'il accorde une représentation non pas proportionnelle (et encore moins réduite) mais accrue à la nation québécoise à la Chambre des communes, laquelle défend adéquatement, selon les porte-paroles fédéralistes, les intérêts du Québec. Voilà qui constituerait une excellente mesure allant dans le sens d'un véritable fédéralisme d'ouverture asymétrique dans ses rapports avec la nation québécoise, laquelle est et sera de plus en plus minoritaire au sein de l'ensemble canadien. Qu'il respecte, de ce fait, les consensus québécois émanant de son Assemblée nationale, seule chambre où les Québécois détiennent 100 % des sièges, laquelle s'oppose unanimement au présent projet de loi. Si exiger moins frôle l'irresponsabilité la plus totale, nous imposer moins s'inscrit dans un irrespect flagrant.
Si Ottawa fait le choix contraire, celui de se consacrer uniquement (et légitimement) à sa majorité démocratique, le peuple canadien, les Québécois pourraient bien en venir à la conclusion que cette Chambre ne les représente guère, et choisir de former une nation «en dehors d'un Canada uni».
Les deux peuples ne pourront qu'en sortir gagnants.
Simon-Pierre Savard-Tremblay
Président du Forum Jeunesse du Bloc Québécois
Le déclin démographique du Québec : un argument fondamental en faveur de l'indépendance
Indépendance - le peuple québécois s'approche toujours davantage du but!
Simon-Pierre Savard-Tremblay179 articles
Simon-Pierre Savard-Tremblay est sociologue de formation et enseigne dans cette discipline à l'Université Laval. Blogueur au Journal de Montréal et chroniqueur au journal La Vie agricole, à Radio VM et à CIBL, il est aussi président de Génération nationale...
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Simon-Pierre Savard-Tremblay est sociologue de formation et enseigne dans cette discipline à l'Université Laval. Blogueur au Journal de Montréal et chroniqueur au journal La Vie agricole, à Radio VM et à CIBL, il est aussi président de Génération nationale, un organisme de réflexion sur l'État-nation. Il est l'auteur de Le souverainisme de province (Boréal, 2014) et de L'État succursale. La démission politique du Québec (VLB Éditeur, 2016).
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