Les députés démissionnaires du Bloc québécois perdent des appuis au sein même de leurs exécutifs de circonscription. Deux autres associations locales se montrent tièdes devant le virage de leur député vers le nouveau parti Québec debout. Toutes deux confirment auDevoir qu’elles restent fidèles au Bloc et que leur élu se retrouve ainsi orphelin.
Dans le lot : le chef intérimaire des démissionnaires bloquistes, Rhéal Fortin. « M. Fortin n’a pas d’exécutif », tranche Louis-David Bénard, le président de l’association bloquiste de Rivière-du-Nord, au sujet de son député.
Rhéal Fortin et six de ses collègues avaient quitté le caucus du Bloc québécois avec fracas l’hiver dernier, en rejetant le leadership de l’ancienne chef Martine Ouellet. Deux d’entre eux ont depuis renoué avec le Bloc (Michel Boudrias et Simon Marcil). Mais cinq autres élus annonçaient, en juin, qu’ils reniaient le Bloc pour de bon avec leur projet de fonder un nouveau parti nationaliste nommé Québec debout.
« Nous, on reste au Bloc. Pour l’instant, on va travailler à la refondation et on va travailler à bâtir des ponts. Et l’objectif, ultimement, c’est de présenter un seul parti aux élections d’octobre 2019 », fait valoir M. Bénard au Devoir.
Le président de l’exécutif du Bloc à Joliette, Thomas Grégoire, est du même avis depuis que son élu Gabriel Ste-Marie a quitté le giron bloquiste. « M. Ste-Marie n’est plus au Bloc québécois. On est l’exécutif du Bloc québécois. On ne travaille pas pour lui », résume M. Grégoire. Il nie que l’association a désavoué son député. C’est plutôt ce dernier qui a changé de parti.
Reste que ces deux exécutifs avaient appuyé au départ l’idée de leur député de créer Québec debout, mais les présidents disent désormais espérer le retour de leur élu au Bloc québécois. Et cette décision est unanime au sein de leur association.
Idem dans Bécancour, chez Louis Plamondon. « On espère vraiment le retour de notre député au Bloc. Et on ne voit toujours pas la pertinence d’un Québec debout », indique le président, Martin Lajeunesse, qui avait déjà exprimé des doutes en juin. « Ça ne mènera nulle part, insiste-t-il. Il faut que tout le monde apprenne à mettre de l’eau dans son vin. Il faut y aller pour les intérêts du Québec. Et en ce moment, je ne crois pas qu’il y ait de la place pour deux partis qui se disent souverainistes. »
On espère vraiment le retour de notre député au Bloc. Et on ne voit toujours pas la pertinence d’un Québec debout
— Martin Lajeunesse
À Repentigny, chez l’élue Monique Pauzé, la présidente de l’exécutif, Hélène Trudel, s’est faite laconique. « La décision n’est pas encore prise pour l’instant. » En juin, Mme Trudel avait toutefois assuré que l’exécutif avait choisi « de continuer d’appuyer [sa] députée ».
Au Bloc québécois, on assure que les cinq associations de circonscription des députés démissionnaires ont prêté allégeance au Bloc.
La présidente de la circonscription de Montcalm, Monique Gagné, fait cependant bande à part et martèle qu’elle appuie encore pleinement son député Luc Thériault. Libre à lui de décider s’il réintégrera ou non le Bloc québécois, souligne-t-elle. L’exécutif de Montcalm n’a cependant pas encore pris de position officielle. Certains ont apposé leur signature à la demande d’enregistrement de Québec debout auprès d’Élections Canada, a reconnu Mme Gagné au Devoir.
Bris de confiance
Monique Gagné attend de voir, comme ses collègues des autres circonscriptions, la teneur des débats au conseil général du Bloc prévu à Montréal le 18 août. Ce sera l’occasion de jauger, selon eux, si la formation est prête à ajuster le tir pour accueillir de nouveau les députés démissionnaires, mais aussi les militants de la mouvance qui avait rejeté le leadership de Martine Ouellet. L’ancienne chef avait voulu faire du Bloc un outil de défense de la souveraineté avant tout, sur toutes les tribunes. Plusieurs bloquistes souhaitaient plutôt continuer d’en faire un organe de défense des intérêts du Québec, de même que de l’indépendance.
« La confiance, il faut qu’elle revienne », explique Monique Gagné. « Et pour qu’elle revienne au bureau national, ça prend des actions, et les actions, ce sera de nouvelles personnes. »
Le conseil général de la mi-août servira surtout à débattre de l’idée de refondation du Bloc québécois. Les délégués y décideront aussi des dates de la course à la chefferie pour choisir un successeur à Martine Ouellet — le parti proposera une course au printemps 2019, a apprisLe Devoir.
Mais les bloquistes seront en outre appelés à élire quatre membres du bureau national (sorte d’exécutif du parti).
Les meneurs de la fronde contre Mme Ouellet, au printemps dernier, tenteront de se faire élire pour réinvestir le coeur du Bloc québécois. Yves Perron et Valérie Tremblay, des exécutifs de Berthier-Maskinongé et de Chicoutimi-Le Fjord, avaient coordonné la campagne contre la chef lors du vote de confiance et ils brigueront chacun un poste au bureau national.
Des 13 postes que compte cette instance, 7 sont occupés par un membre qui appuyait Martine Ouellet et sa vision du Bloc québécois.
Si les nouveaux venus sont élus, Martin Lajeunesse ne voit « pas comment les anciens députés du Bloc pourraient ne pas revenir au parti après ».