L’auteur est avocat constitutionnaliste
J’ai été invité à faire une présentation au dernier Congrès de l’Association québécoise de droit constitutionnel en décembre dernier (1). Le thème du Congrès était le 15e anniversaire du Renvoi sur la sécession du Québec, un jugement majeur de la Cour suprême du Québec sur la légalité en droit canadien et en droit international de la démarche d’accession à l’indépendance du Québec. Stéphane Dion, Bernard Landry et le consul des États-Unis étaient présents.
Après ma présentation, Stéphane Dion m’a posé quelques questions et nous avons engagé un débat improvisé devant l’assistance. Il a beaucoup insisté sur l’obligation juridique qu’aurait le Québec d’obtenir une modification de la Constitution canadienne même après un OUI référendaire à la souveraineté.
Ainsi, pour monsieur Dion (ancien et peut-être futur ministre fédéral chargé du dossier constitutionnel), la formule d’amendement imposée au Québec en 1982 deviendrait une prison qui empêcherait la sortie du Québec de la fédération canadienne même si tel était le choix clairement exprimé du peuple québécois.
Je ne pouvais évidemment pas laisser passer une telle affirmation sans réagir. Je lui ai fait remarquer qu’il pourrait être dans l’intérêt du gouvernement canadien (un intérêt économique, par exemple, ou sous une pression internationale), de reconnaître le Québec souverain même si une entente avec ce dernier n’avait pas obtenu l’appui de chacune des provinces, ou même d’une majorité d’entre elles.
Il m’a répondu que le gouvernement fédéral devrait alors se présenter devant la Cour suprême pour faire valider sa reconnaissance du Québec.
Je lui ai répondu que tel n’était pas l’état du droit canadien. En droit canadien (ou britannique), la décision de reconnaître un nouvel État souverain appartient exclusivement au pouvoir exécutif, qui sera en l’occurrence le gouvernement fédéral.
De plus, il est bien établi que cette décision lie les tribunaux (dans des précédents qui concernaient la Rhodésie, aujourd’hui le Zimbabwe, notamment), car cette décision relève de la prérogative royale en matière de relations internationales.
Dans l’état actuel du droit, aucun recours ne sera donc possible devant les tribunaux canadiens pour contester une décision du gouvernement fédéral de reconnaître le Québec souverain même si la formule d’amendement de la Loi constitutionnelle de 1982 n’est pas respectée.
Monsieur Dion n’avait rien à ajouter.
L’aut’journal vient de publier cet important texte d’André Binette dans un carnet sous le titre : La Cour suprême, le droit international et l’indépendance du Québec. On peut se le procurer au coût de 5 $ aux bureaux de l’aut’journal ou en cliquant ici.
Pour la présentation du carnet, cliquez ici.
Le Canada pourrait reconnaître un Québec indépendant sans l'accord des provinces
Dion s’en fait boucher un coin
André Binette38 articles
Avocat, l'auteur a été conseiller du Conseil exécutif du gouvernement du Québec pendant l'année référendaire en 1995. Il est l'auteur d'Indépendance et liberté: une vision du Québec souverain
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