Hélène Buzzetti - Ottawa — Paul Sauvé, cet entrepreneur disant avoir dû verser 140 000 $ à un intermédiaire pour obtenir un contrat de réfection du parlement à Ottawa, n'est pas le seul à avoir assisté par la suite à un cocktail de financement du Parti conservateur. Le Bloc québécois a retrouvé trois autres entreprises dont des membres ont assisté au même cocktail montréalais et ayant elles aussi obtenu un contrat fédéral.
Ainsi, Norman Glouberman, d'Arcop Group, a versé à l'association conservatrice montréalaise de Bourassa 500 $ le 22 janvier 2009. Arcop a obtenu le contrat d'expert-conseil pour le projet de rénovation et d'aménagement de l'édifice de l'ouest, sur la colline parlementaire, soutient le Bloc. Julia Gersovitz, de Fournier Gersovitz, Moss et associés, a versé elle aussi 500 $ à la même date. Son groupe a obtenu un contrat de sous-traitance dans la conception du projet de réfection de l'édifice de l'ouest. Joseph Broccolini, enfin, de Broccolini Construction, a versé 500 $ le 22 janvier 2009 lui aussi. Cet important groupe en construction a obtenu divers contrats fédéraux, dont un de 150 millions de dollars décroché le 28 mai 2009 pour la construction d'un édifice gouvernemental à Ottawa. Le Bloc soutient qu'au moment du don au Parti conservateur, l'entreprise était encore en négociations avec Ottawa pour décrocher le contrat.
«Le ministre admettra-t-il qu'il s'agit bien d'un système où l'on donne des contrats en échange de dons partisans pour la caisse du Parti conservateur?» a lancé hier Pierre Paquette, le leader en Chambre bloquiste.
Une vérification effectuée par Le Devoir permet de constater que ces trois individus n'ont rien versé à aucun autre parti politique depuis 2007.
C'est ce fameux 22 janvier 2009 qu'a eu lieu un cocktail de financement conservateur, auquel le ministre Christian Paradis a assisté. L'entrepreneur Paul Sauvé soutient qu'il s'est fait recommander d'organiser ce cocktail partisan pour «remercier» le gouvernement d'avoir obtenu un contrat de 9 millions de dollars. Il soutient également qu'à cette occasion, M. Paradis l'a félicité d'avoir décroché le contrat.
Paradis dément
Le ministre dément catégoriquement cette histoire. «Le contrat en question a été signé le 30 mai 2008. Je suis devenu ministre des Travaux publics le 25 juin 2008. La réception en question a eu lieu en janvier 2009. J'espère que l'opposition peut lire un calendrier», a-t-il lancé hier. Il nie avoir discuté de contrats lors du cocktail. «Jamais je ne parle de contrats avec les individus en question lorsque je suis en public. Lorsqu'ils me disent qu'ils font affaire avec le gouvernement fédéral, je peux les féliciter, je peux leur dire que c'est tant mieux pour eux, mais je suis clair, dans ce cas-là, comme dans tout autre cas, je ne parle jamais de contrats.»
Pour le Bloc québécois, il est évident que ce cocktail était «un retour d'ascenseur». Mais quelles preuves le Bloc québécois a-t-il que les élus conservateurs ont joué de leur influence pour que ces donateurs décrochent des contrats gouvernementaux? «Je vous retournerais la question, a répondu M. Paquette en point de presse. Qu'est-ce qui nous prouve qu'il n'y a pas un système étant donné qu'il y avait quatre personnes qui représentaient des entreprises en construction ayant reçu des contrats substantiels du gouvernement fédéral? Ce n'est quand même pas un hasard! Nous, on plaide qu'il y a un système qui est en place qui est peut-être en train de s'élargir et il faut faire la lumière sur ces choses-là.»
Comparution de témoins
Le Bloc québécois croit qu'une «enquête publique indépendante» sera nécessaire, mais d'ici là, il déposera une motion en comité parlementaire pour faire comparaître des témoins, notamment les quatre entrepreneurs, l'intermédiaire Gilles Varin ainsi que le ministre Christian Paradis.
Cette histoire a émergé cette semaine quand Radio-Canada et le Globe and Mail ont révélé que l'entreprise LM Sauvé fait l'objet d'une enquête de la Gendarmerie royale du Canada concernant ce contrat de 9 millions de dollars. L'entreprise aurait versé 140 000 $ à Gilles Varin, un militant conservateur, pour faciliter l'obtention du contrat, ce dernier soutenant avoir de proches amis au ministère des Travaux publics.
Contrats gouvernementaux
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