Le gouvernement Charest a cumulé plusieurs points auprès des électeurs par son attitude ferme sur la hausse annoncée des droits de scolarité. Ce regain de popularité l’a certai- nement convaincu qu’il avait raison de ne rien céder aux étudiants. En corollaire, il lui faut maintenant montrer que sa fermeté produira le résultat escompté, c’est-à-dire le retour en classe des étudiants et la fin de l’agitation sociale.
La séance de négociation qui a eu lieu avec les fédérations étudiantes vendredi et samedi n’a pas été convaincante à cet égard. Quarante-huit heures plus tard, un fort doute s’installe sur le succès de cette opération. Les fédérations étudiantes contestent le libellé de l’entente intervenue tandis que plusieurs associations d’étudiants la rejettent par des votes qui ne laissent aucune ambiguïté sur le sentiment de leurs membres.
Dès la sortie de la salle de négociation samedi, le vocabulaire employé par les uns et les autres montrait bien que l’on n’avait pas la même compréhension de l’entente intervenue. Pour le gouvernement, il s’agissait bel et bien d’une entente alors que pour les étudiants, c’était une offre du gouvernement que l’on s’engageait à soumettre aux assemblées étudiantes, sans recommandation de l’entériner.
Objectivement, il n’y a pas de la part des étudiants de raisons de s’enthousiasmer. La ministre de l’Éducation, Line Beauchamp, a raison de dire que le gouvernement n’a pas bougé. Essentiellement son offre consiste à dire aux étudiants que s’ils peuvent démontrer qu’il y a des économies possibles dans la gestion des universités, elles leur seront retournées sous forme de réduction des frais afférents. Ce n’est ni plus ni moins qu’un billet de loterie qu’on leur a donné.
Le gouvernement ne devait pas récompenser l’agitation sociale en annulant les droits de scolarité. Ce n’était pas le but de la négociation du week-end. Il s’agissait de trouver une sortie honorable aux étudiants pour retourner en classe et, dans cet esprit, de donner à leurs leaders les atouts pour y arriver. Or, ceux-ci n’ont pas de poids auprès de la base.
Si sortie de crise il y a, elle se fera dans le désordre. Le retour en classe ne sera que partiel et, lorsqu’il se fera, ce sera avec résignation et mauvaise humeur. Bref, le retour à la normale n’est pas pour demain.
Le gouvernement Charest fait le pari que le temps fera son oeuvre et que, d’ici quelques semaines, la situation peu à peu se sera apaisée. C’est ce qu’il avait pensé déjà à quelques reprises sans que cela se révèle. Difficile de croire qu’il en sera autrement cette fois. Ce conflit l’a dépassé dès le départ et il n’est pas certain qu’il le comprenne mieux aujourd’hui. Comment lire autrement les déclarations de Line Beauchamp et de Jean Charest sur la portée de l’entente. Pas difficile de décoder qu’ils ont la satisfaction d’avoir roulé les leaders étudiants dans la farine. Ils ne comprennent pas qu’ils sont leurs meilleurs alliés pour régler ce conflit et qu’avec de tels discours ils leur rendent la tâche impossible.
Personne n’a intérêt à ce que cette crise se prolonge. Elle doit se régler par les acteurs qui sont directement concernés, les fédérations étudiantes et le gouvernement. Le premier ministre Charest semble avoir compris qu’il aurait été illusoire de faire appel aux électeurs pour trancher à l’occasion d’une élection à la mi-juin. Dans le climat actuel, la campagne électorale aurait été perturbée par des manifestations en série. Les électeurs, après lui avoir donné raison de maintenir la hausse des droits de scolarité, auraient pu lui reprocher d’avoir fait preuve d’un excès d’autorité alors qu’il aurait suffi d’un peu de souplesse pour régler ce conflit. Car ici, contrairement à d’autres grèves, l’autorité a ses limites. Les lois spéciales ne sont d’aucun secours.
Grève étudiante
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