Le Canada compte deux langues officielles, mais le bilinguisme étatique ne se reflète pas équitablement dans la population comme le démontrent de nouvelles données publiées par Statistique Canada. Si le bilinguisme progresse au pays, c’est d’abord et avant tout une affaire de Québécois et de manière plus large, une affaire de francophones.
Selon ce que vante le gouvernement fédéral sur sa page officielle traitant de langues officielles et de bilinguisme, son principal objectif en la matière est de : « Promouvoir le français et l’anglais dans la société canadienne ».
Toutefois, les données dévoilées jeudi par Statistique Canada, dans un rapport intitulé « Le bilinguisme français-anglais chez les enfants et les jeunes au Canada », semblent confirmer que la promotion de l’anglais chez les francophones est beaucoup plus efficace que la promotion du français chez les anglophones.
Les chiffres, tirés du plus récent recensement réalisé en 2016, indiquent que le Québec est responsable de 74 % de toute la croissance du bilinguisme au Canada au cours des dix années précédentes.
Dans la population générale, le taux de bilinguisme français-anglais en 2016 s’élevait à 44,5 % au Québec et à 33,9 % au Nouveau-Brunswick. Il s’agit de loin des taux les plus élevés parmi les provinces alors qu’ailleurs, en Ontario (11,2 %), en Colombie-Britannique (6,8 %) et en Alberta (6,6 %), les personnes bilingues demeurent pratiquement marginales.
Et ces taux marginaux sont majoritairement attribuables aux communautés francophones d’un océan à l’autre. En dehors du Québec, 85 % des Canadiens francophones sont bilingues, contre sept % des anglophones.
À ce titre, les Québécois se démarquent une fois de plus puisque les anglophones du Québec affichent un taux de bilinguisme de 69 %. Un taux par ailleurs plus élevé que celui des francophones du Québec, à 40 %
Une tendance de longue date
Dans son rapport, Statistique Canada remonte jusqu’à 1961 pour analyser la progression du bilinguisme au Canada et les données confirment qu’on observe la même tendance depuis plus d’un demi-siècle.
La proportion de Canadiens pouvant converser dans les deux langues officielles est passée de 12,2 % en 1961 à 17,9 % en 2016.
Sur la même période, le taux de Québécois pouvant soutenir une conversation dans la langue de Michel Tremblay ou celle de Margaret Atwood est passé de 25,5 % à 44,5 %, un bond de 19 points.
Dans le reste du pays, l’apprentissage de la langue de l’autre solitude n’a gagné que trois maigres points, passant de 6,9 % à 9,8 %.
Un fossé qui se creuse
Toujours d’après le rapport de l’agence fédérale de la statistique, le portrait de l’avenir du bilinguisme au pays ne paraît pas très encourageant.
En se basant sur les taux de rétention du bilinguisme, c’est-à-dire le nombre de jeunes ayant appris les deux langues et réussissant à en conserver l’usage, les experts ne prévoient aucune progression du bilinguisme chez « la population de langue maternelle anglaise du Canada hors Québec » au cours des 20 prochaines années.
« Les projections linguistiques permettent d’envisager un écart grandissant entre le taux de bilinguisme français-anglais au Québec, lequel est à la hausse, et les taux de bilinguisme français-anglais observés dans les autres provinces, qui sont stagnants ou à la baisse », peut-on lire dans le document disponible en ligne.