L’auteur, qui évite soigneusement d’évoquer le rôle de la Russie, voit à travers la prise d’Alep en décembre 2016 une « victoire importante » pour Damas et ses alliés iranien et russe sans pour autant se rendre à l’évidence : « Bien que les acquis militaires de Damas ne cessent de se multiplier depuis décembre 2016, la guerre, elle, devrait, en toute logique se poursuivre “à petite dose” ».
« C’est l’intervention de l’Iran et de la Russie en 2013 qui a en réalité changé la donne, les frappes aériennes et les tirs d’artillerie des alliés d’Assad ayant joué le rôle de levier de dissuasion face aux rebelles. » Pour l’auteur, ce qui fait réellement la différence entre les terroristes d’une part et l’armée syrienne et les milliers de combattants libanais, irakiens et iraniens qui l’aident de l’autre, reste ceci : « L’armée syrienne opère suivant une vision très large qui implique les déplacements des troupes et de l’aviation, ce dont sont privés les rebelles. » C’est cette vision d’ensemble qui a permis aux forces alliées de « reprendre le contrôle des régions perdues les unes après les autres ».
L’analyste israélien reconnaît deux « mérites » à l’État syrien, « l’autorité d’Assad » et « le soutien populaire » dont il jouit : toutes les institutions étatiques se sont rangées derrière Assad dès le début du conflit, notamment l’armée, l’appareil sécuritaire et le renseignement. Cet état des choses a accordé à Assad une puissance de frappe inattendue et une durabilité à toute épreuve. Le stratégiste, qui reconnaît ainsi à demi-mot la défaite israélo-américaine face à l’État syrien, souligne « l’emprise de Damas sur les régions stratégiquement utiles que sont Deraa (Sud), Damas, Homs, Hama (Centre) et Alep (Nord), ainsi que les côtes syriennes ».
« C’est là où vit plus de la moitié de la population syrienne (soit 13 millions sur 25 millions d’âmes), qui bénéficie de l’appui ferme de l’État, car Damas n’a jamais cessé de payer ses fonctionnaires, ni de leur offrir services et soins. Les boutiques n’ont jamais manqué de vivres. L’État syrien contrôle l’est de la Syrie tandis que Daech se trouve complètement encerclé dans le nord de l’Irak et l’est de la Syrie. »
L’auteur pose ensuite avec inquiétude la question suivante : « Qui de la Syrie ou des USA parviendra à reprendre Raqqa, Deir ez-Zor et le désert de Syrie ? » Pour le stratège israélien, les USA ont jusqu’ici perdu la bataille de l’Est. Le fait de capitaliser sur les Kurdes syriens pour s’emparer de Raqqa ou d’Idlib risque de ne pas aboutir puisque « les alliés locaux de Washington ne sont jamais parvenus et ne parviendront probablement jamais à s’unir ».
La fin de l’article est consacrée à l’étude des quatre scénarios qui pourraient se produire, une fois Daech éliminé, bien que l’auteur prévoie la « survie des terroristes sans qu’ils soient encore capables de créer leur émirat ». Les quatre scénarios sont les suivants :
« La victoire totale de l’État syrien ; la défaite de Damas qui signifierait la disparition de cet État ; un état de guerre perpétuelle où les terroristes survivraient ; et enfin le démembrement de la Syrie en quatre régions : Syrie orientale (pro-USA) ; Syrie méridionale (pro-Jordanie et USA) ; Syrie occidentale (pro-Assad) ; Syrie septentrionale (pro-Turquie). »
Mais l’auteur évoque ce dernier scénario sans trop y croire :
« Le démembrement de la Syrie se solderait certes par un affaiblissement organique de l’État syrien, mais cette perspective est difficile à imaginer puisque dans les provinces importantes que sont Damas, Hama, Homs et Alep, la population vit dans un brassage ethno-confessionnel total. Idem pour les côtes syriennes où les ethnies et les confessions coexistent depuis des siècles. »
Pour le reste, l’auteur ne croit pas non plus à ce que Daech ou d’autres groupes takfiristes puissent « créer un jour un État en Syrie ».