Avenue Robert-Bourassa

La soupe chaude

Tribune libre



Certaines coïncidences ne trompent pas. Alors que les élus de l’UCIM sur le Plateau viennent de passer tout l’automne à se faire clouer au pilori sur la question très sensible du changement de nom de l’avenue du Parc pour celui de Robert-Bourassa, même à trois ans des élections municipales, les boîtes aux lettres de l’arrondissement ont été inondées toute la semaine de dépliants partisans de l’«Équipe Tremblay-Fotopulos Team». Même si l’article 1 de la Charte de la Ville stipule que «Montréal est une ville de langue française», les luxueux dépliants sont aussi intégralement bilingues qu’une publication fédérale et affichent les sept sourires de politiciens et politiciennes sentant soudainement l’urgent besoin de nous vanter leur bilan. C’est ce qu’on appelle communément sentir la soupe chaude.
Parmi les réalisations énumérées figure paradoxalement le «réaménagement du carrefour des Pins–du Parc». Ladite infrastructure a beau être une réussite technique, compte tenu de la colère noire qui gronde toujours dans le Mile End, on a peine à imaginer madame Fotopulos et son équipe revenir dans un an ou deux nous rappeler les nouvelles vertus du «carrefour des Pins–Robert-Bourassa». Qui donc parmi ces messieurs-dames écopera de la tâche ingrate de nous expliquer, de deux choses l’une, soit que la station de métro Parc gardera le nom d’un espace vert situé à trois kilomètres de là, soit qu’il n’y aura aucun inconvénient à ce que la future station Robert-Bourassa soit aussi rapprochée de l’actuelle station Henri-Bourassa. Plus on y pense, plus on se surprend à leur souhaiter un providentiel sauvetage politique en provenance de la Commission de toponymie du Québec, seule instance à pouvoir encore contrecarrer cette très impopulaire décision de nos élus du Plateau.
Car disons-le bien, si ces derniers s’auto-congratulaient cette semaine d’avoir établi une «première démarche significative vers l’établissement d’un budget participatif», à l’opposé, le changement du nom de l’avenue du Parc s’est décidé très, très haut par-dessus la tête des citoyennes et citoyens les plus concernés. Absolument personne n’a été dupe lorsque le maire Tremblay a prétendu qu’il y aurait consultation dans la mesure où les membres du Conseil municipal, de Pointe-aux-Trembles à L'Île-Bizard, prendraient le pouls de leurs commettants sur le sujet avant le vote du 27 novembre dernier. Les Fotopulos, Labrecque et Prescott savaient parfaitement que leurs trois tardifs mea culpa, même additionnés aux votes de l’Opposition, seraient largement submergés par le «rubber stamping» des dizaines d’autres membres de la majorité du parti du maire au Conseil. Ceux-là mêmes dont les dépliants soutenaient cette semaine qu’ils formaient «une administration qui honore ses engagements» n’ont pas cru bon y citer leur Charte montréalaise des droits et responsabilités tout récemment adoptée et qui promettait d’être un instrument de vie démocratique au service des citoyens. Encore lundi, une rugissante foule d’opposants se réunissaient dans un café de l’avenue du Parc pour poursuivre la mobilisation. Un journal, le très militant «Park Avenue Gazette», est même vendu de portes en portes et dans les commerces.
De toute évidence, le prochain appel aux urnes montréalaises a beau être lointain, il faudra plus que des jolis dépliants, fussent-ils en papier glacé, pour refroidir la soupe.
Christian Gagnon

Mile End

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CHRISTIAN GAGNON, ing.
_ L’auteur a été président régional du Parti Québécois de Montréal-Centre d’octobre 2002 à décembre 2005





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