«Le gouvernement ne met pas en cause la sécurité nationale. Elle n’est pas
à risque (Julie Couillard). Je dois simplement dire que la véritable et la
plus grande menace à la sécurité du Canada est la séparation que propose le
Bloc québécois» : Lawrence Cannon, ministre des Transports.
Cette étonnante déclaration de Lawrence Cannon, rapportée dans la Presse
du 16 mai 2008, est passée totalement inaperçue et n’a suscité aucune
réaction de la part des partis d’opposition à Ottawa. Il ne s’agit pourtant
pas d’une déclaration anodine, je dirais même qu’elle est plutôt lourde de
conséquences, de la nature d’une grosse nouvelle qui devrait normalement faire la
manchette de tous les journaux canadiens et québécois. Ce n’est pas rien :
la séparation du Québec est la plus grande menace à la sécurité nationale
canadienne, pas la deuxième, pas la troisième, la plus grande et personne
n’en parle! Probablement parce que tout le monde a béatement conclu que le
ministre avait exagéré. Personne n’a voulu saisir la balle au bond, quel
professionnalisme de la part de nos journalistes et politiciens! Pourtant,
cette déclaration suscite une foule d’interrogations qui ne devraient
normalement pas nous laisser indifférents dans une présumée société de
droit.
Nous avions tous cru, au lendemain des évènements du 11 septembre 2001,
que la pire menace pour la sécurité canadienne était les extrémistes
musulmans : Al Quaïda, Ben Laden et compagnie. Et bien non, contre toute
attente, c’est encore la séparation du Québec qui remporte le titre de pire
menace. Est-ce à dire que la GRC et le SCRS ont toujours pour principale
cible les militants séparatistes du Bloc, du PQ, du PI, de QS, ainsi que
tous les groupes qui font la promotion de l’indépendance, comme la SNQ, la
SSJB, l’IPSO, de même que des organes d’information comme le Québécois et
Vigile? Est-ce à dire que ces partis et groupes seraient objectivement plus
dangereux que les extrémistes musulmans et qu’ils sont en conséquence
l’objet d’un suivi continu et secret de la part de la GRC et du SCRS? Le
moins que l’on puisse dire c’est que Lawrence Cannon doit s’expliquer
publiquement à ce sujet!
Les indépendantistes québécois sont-ils encore l’objet d’infiltrations
comme ils l’étaient dans les années 60 et 70 par la GRC et plus tard par le
SCRS, avant l’adoption de la Charte de Trudeau - celle qui devait protéger
nos droits et libertés - au même titre que les groupes terroristes le sont
actuellement au Canada, ceux-ci étant moins dangereux pour la sécurité
nationale que les séparatistes québécois, selon les dires du ministre
Lawrence Cannon?
Même Maxime Bernier, qu’on accuse des pires péchés, n’a jamais été aussi
loin dans ses propos et ses agissements. En fait, que lui reproche-t-on au
juste? Quelques Jos-Louis distribués aux militaires, des vérités sur le
régime afghan et des relations avec une ex-conjointe d’un motard
criminalisé, probablement une agente très spéciale qui le suivait, Maxime
Bernier étant lui-même un ancien péquiste, la pire menace! Il me semble que
la dernière déclaration de Lawrence Cannon est beaucoup plus lourde de
conséquences que tout ce qu’a pu dire ou faire Maxime Bernier dans sa
courte vie de ministre. Elle attaque directement les droits et libertés de
millions de Québécois qui pensaient qu’ils pouvaient librement militer pour
l’indépendance du Québec et défendre leurs opinions dans le présumé
meilleur pays au monde!
Est-il illégal d’être séparatiste au Canada? Les lois adoptées au
lendemain du 11 septembre 2001 visent-elles subsidiairement les
indépendantistes, comme plusieurs analystes le craignaient à l’époque? Le
gouvernement fait-il indirectement ce que pourraient autoriser les lois sur
la sécurité nationale? L’ancien gouvernement libéral de Jean Chrétien et
l’actuel gouvernement conservateur de Stephen Harper ont-ils pris prétexte
des évènements tragiques survenus aux États-Unis au début de la décennie
pour agir délibérément en sous-main contre les séparatistes du Québec?
Dans un pays où les libertés d’opinion et d’expression sont supposées être
protégées par les chartes, il serait peut-être temps que le Bloc et les
autres partis d’opposition à Ottawa, qui ont encore à cœur les droits et
libertés des Québécois, demandent au premier ministre combien d’argent est
consacré chaque année à espionner illégalement les séparatistes québécois.
Combien d’opérations illégales visant des séparatistes québécois ont été
accomplies ou sont en cours au SCRS et à la GRC ?
Si les indépendantistes sont véritablement la plus grande des menaces à la
sécurité nationale, comme le dit explicitement Lawrence Cannon, cela ne
doit pas être sans conséquence. Le gouvernement de Stephen Harper doit donc
s’expliquer ! À moins que le gouvernement se donne le droit de ne pas
répondre à cette question en raison de la sécurité nationale, parce que les
indépendantistes québécois n’ont tout simplement pas les mêmes droits et
libertés que les autres Canadiens, du fait qu’ils constituent justement la
plus grande menace à la sécurité du Canada.
On ne serait pas étonné d’apprendre que la sécurité nationale a primauté
sur les chartes, cette suprématie serait même enchâssée dans la
constitution canadienne suivant la règle « paix, ordre et bon gouvernement
». Comment ne pas conclure que cette règle d’interprétation serait la
source constitutionnelle et la justification légale de toutes les
irrégularités commises par le camp fédéraliste et les autorités fédérales
en particulier lors du référendum de 1995! La Charte canadienne des droits
serait d’abord un outil pour affaiblir le Québec, pour protéger les
Canadiens contre les Québécois séparatistes, une tâche dévolue à la Cour
Suprême.
Si la séparation du Québec est la plus grande menace à la sécurité
canadienne, comment ne pas conclure que les méchants séparatistes
requièrent au moins le même traitement que les groupes terroristes? En
fait, s’il est illégal d’être séparatiste au Canada, tout ce qui peut-être
fait pour contrecarrer les objectifs visant à séparer le Québec du Canada
est donc parfaitement légal, une logique toute canadienne. Voilà
probablement ce que signifie la déclaration de Lawrence Cannon!
Louis Lapointe
Brossard,
le 20 mai 2008
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
21 mai 2008Mais bien sûr que la séparation du Québec est la plus grande menace de sécurité pour le Canada !
Pourquoi ? Tout simplement parce que l'Indépendance du Québec, qui ne saurait tarder, est la destruction du Canada.
Pourquoi ? Tout simplement parce le CAnada ne peut vivre identitairement (hymne national, drapeau, bilinguisme le distinguant des USA...) sans le QUébec.
Grâce à qui ? À un certain Trudeau et le French Power.
Aussi bien dire que comme le ROC est IDENTITAIREMENT DÉPENDANT du Québec, le Québec est aujourd'hui en 2008 INDÉPENDANT. Vous me suivez M. Lapointe ?
" L'Indépendance du QUébec serait un crime contre l'histoire de l'humanité. " - Trudeau
Trudeau avait raison : notre Indépendance du Québec tuera la prétention d'une supériorité raciale bien cachée de ces gentlemen qui ont les moyens de se cacher à Toronto.
N'ai-je pas raison M. Lapointe ?
Je crois que nous avons besoin immédiatement de réfléchir en termes de politique internationale et non plus en termes de politique interprovinciale ... pour la sécurité intérieure et extérieure du QUébec et du Canada.
Continuez votre bon travail.
sebastien_harvey1@hotmail.com
Archives de Vigile Répondre
20 mai 2008Vos questions sont tout à fait pertinentes, Monsieur Lapointe. Elles méritent certainement d'être posées à M. Harper aux Communes.
Archives de Vigile Répondre
20 mai 2008Le fédéral s'autorise tous les abus dans son combat contre la marche du Québec vers sa souveraineté, et personne ne semble s'en offusquer: http://www.vigile.net/La-STASI-canadienne-Le-silence-des
JCPomerleau