«Dans la mesure où ces discussions-là portent sur des choses intéressantes, touchent les gens, vous allez voir, la ferveur va revenir, le goût de changer les choses va revenir.», a lancé Parizeau sous les applaudissements. Photo Robert Skinner, La Presse
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Lia Lévesque et Rémi Nadeau - La ferveur souverainiste va revenir et les Québécois seront même très nombreux à vouloir leur pays, prédit Jacques Parizeau.
L'ancien premier ministre péquiste a ainsi officiellement lancé son livre «La souveraineté du Québec hier, aujourd'hui et demain», lundi soir, devant une salle bondée d'admirateurs, d'anciens collaborateurs et de souverainistes convaincus réunis au Monument national à Montréal.
«Dans la mesure où ces discussions-là portent sur des choses intéressantes, touchent les gens, vous allez voir, la ferveur va revenir, le goût de changer les choses va revenir. Et on va être très nombreux à vouloir avoir notre pays», a-t-il lancé sous les applaudissements.
Et à ceux qui disent que les électeurs, plus particulièrement les jeunes, sont devenus cyniques, las de voter, dégoûtés de la politique, M. Parizeau a tenu à répliquer.
«Qu'on ne me parle pas de cynisme ou d'inertie de l'électeur. L'électeur est cynique, il est inerte quand ce qu'on lui présente n'est pas intéressant ou à plus forte raison douteux», s'est-il exclamé, rappelant que 94,5 pour cent des électeurs inscrits avaient exercé leur droit de vote lors du référendum de 1995.
Comme dans son ouvrage, l'ancien premier ministre péquiste a fait un plaidoyer en faveur de la souveraineté, encore plus pertinente et nécessaire, selon lui, en cette ère de mondialisation.
«Il n'y a pas de pays vraiment trop petit, en termes de population, pour être indépendant et prospère, à une condition: qu'il appartienne à un grand marché. Nous, c'est fait, notre grand marché c'est l'Amérique du Nord», a conclu M. Parizeau.
Le lancement de l'ouvrage a eu lieu en présence des chefs péquiste et bloquiste Pauline Marois et Gilles Duceppe ainsi que de l'ancien chef péquiste André Boisclair.
L'ancien premier ministre péquiste Lucien Bouchard, avec qui M. Parizeau a mené la bataille référendaire de1995, n'était toutefois pas présent.
Un autre ancien premier ministre péquiste, Bernard Landry, interviewé plus tôt dans la journée, a exprimé son accord complet avec M. Parizeau. Il devait toutefois prendre l'avion pour Avignon, après avoir pris la parole lors d'un congrès en début d'après-midi, et n'a donc pu être présent.
Réactions
Mme Marois a soutenu que le Parti québécois sous sa gouverne s'affairait justement à élaborer les programmes de gouvernement d'un Québec indépendant avant même de prendre le pouvoir, comme le suggère M. Parizeau dans son essai.
«Nous avons adopté un plan de match sur la souveraineté le printemps dernier, dans lequel nous avons mis de côté la date d'un référendum, et nous nous sommes concentrés sur le projet de pays lui-même», a dit Mme Marois en entrevue à La Presse Canadienne avant le lancement officiel du livre.
«Quand M. Parizeau dit qu'il faut renouveler les idées, parler du pays, c'est ce que nous faisons, avec l'aboutissement de cette démarche au congrès de juin 2011, qui nous permettra de parler de souveraineté à la prochaine élection», a-t-elle continué.
Tout comme M. Parizeau, elle affirme qu'un troisième référendum sur la souveraineté est nécessaire, mais répète qu'il n'est pas question pour le parti de s'engager à tenir cette consultation dans un délai précis.
«Je ne me piégerai pas dans une stratégie qui ferait ensuite qu'on soit tenu de le faire et que ce ne soit pas le moment pertinent. Mais les gens sauront qu'en nous élisant, oui, il est possible qu'il y ait un référendum», a dit Mme Marois.
Le chef bloquiste Gilles Duceppe, quant à lui, a défendu la même vision de la nécessaire souveraineté du Québec en cette ère de mondialisation. «De nos jours les frontières politiques ne sont plus des frontières et l'identité nationale est d'autant plus importante», a-t-il dit.
Bien qu'il puisse paraître étrange, à prime abord, qu'un homme de l'âge de M. Parizeau parle de la nécessité de renouveler le discours souverainiste, M. Duceppe trouve au contraire que cela est justifié, compte tenu de l'importance du personnage. «Peu de personnes pouvaient écrire le livre qu'il a écrit, puisqu'il en a été témoin et acteur. Est-ce que ça veut dire que c'est un messie? Il serait le premier à vous dire que non.»
De son côté, l'ancien premier ministre péquiste Bernard Landry a renchéri, affirmant qu'un autre référendum sera bel et bien nécessaire et que oui, le discours souverainiste doit être modernisé pour s'adapter au contexte de la mondialisation.
«La conjoncture et l'évolution planétaire nous forcent à le renouveler. C'est une de mes thèses d'ailleurs depuis longtemps: la mondialisation rend plus importante et nécessaire l'indépendance des nations. Et ce n'est pas pour rien qu'il y a 30 nouvelles nations indépendantes depuis 30 ans ou à peu près.»
M. Landry estime que M. Parizeau a raison de remettre maintenant dans l'actualité le débat sur la souveraineté.
«Il y a des décisions qui ne peuvent plus être prises au plan national parce qu'elles touchent l'ensemble de l'humanité, alors elles seront prises par des institutions internationales. Et, dans international, il y a nation», a-t-il affirmé, citant le cas de l'environnement et des grands accords internationaux dans ce domaine.
Un autre ancien chef péquiste, André Boisclair, que l'on n'a jamais identifié à l'aile pure et dure du parti, a tenu à être présent au lancement du livre. «M. Parizeau a toujours été une référence, un allié et, avec le temps, il est devenu un ami, pour qui j'ai le plus grand respect», a-t-il dit.
«Parizeau a encore une fois raison», selon M. Boisclair, quand il soutient qu'il est possible d'intéresser les jeunes à la politique et à l'option souverainiste.
De son côté, le premier ministre libéral Jean Charest a indiqué qu'il n'avait pas lu le livre mais qu'il pouvait déjà en dire, après avoir lu les reportages à ce sujet, que les péquistes «vont encore se dévorer à nouveau sur cette question-là de la souveraineté».
Selon le premier ministre, le phénomène de la mondialisation rend au contraire le système fédéral «encore plus pertinent».
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