Une tâche herculéenne que celle de Christopher Skeete? Pas vraiment selon ce dernier; un défi qu'il embrasse avec calme et détermination.
M. Skeete a hérité de la délicate tâche de défendre le projet de loi sur la laïcité de son gouvernement auprès des Québécois d’expression anglaise.
Vous connaissez Christopher Skeete? Si vous êtes un habitué de ce blogue, fort probablement. Au cours de la dernière campagne électorale, j’avais salué sa candidature.
À l’époque, je ne savais pas si Christopher allait gagner ses élections. Candidat de la CAQ à Laval, dans Sainte-Rose. Pas facile comme comté. Finalement, la CAQ n’aura arraché qu’un seul comté à Laval, le sien. Les autres sont demeurés libéraux.
Je suis d’avis que le Québec mérite des gens de valeur comme Christopher Skeete, peu importe leurs inclinaisons politiques. Politicologue – je l’ai connu d’abord par ses textes, très intéressants, dans le site ipolitics – et homme d’affaires, Skeete est un Québécois d’expression anglaise, parfaitement bilingue, et un authentique nationaliste.
Le premier ministre François Legault avait, dès lors, la personne idéale afin de faire le pont avec la collectivité québécoise d’expression anglaise. Christopher Skeete a, logiquement, hérité du poste d’adjoint parlementaire du premier ministre, responsable des relations avec les Québécois et les Québécoises d’expression anglaise.
Défendre la laïcité en terrain miné... en apparence!
Le député de Sainte-Rose a hérité de la délicate tâche de défendre le projet de loi sur la laïcité de son gouvernement auprès des Québécois anglophones. Mais quand on lui demande s’il trouve la tâche ardue, Skeete s’en défend. Il accueille le défi à bras ouverts! Il s’est porté volontaire pour appuyer son collègue Simon Jolin-Barrette dans les communications auprès des anglophones du Québec.
Si on ne se fie qu’au bruit ambiant et à l’image qui est envoyée par la plupart des médias de ce que pense la collectivité anglophone de la laïcité, il se pourrait bien qu’on passe à côté de l’essentiel.
Et ça, le politicologue Skeete tient à le rappeler : « il y a un clivage évident entre ce que l’on entend sur le terrain, quand on cause avec les Québécois et les Québécoises d’expression anglaise, et ce que l’on projette dans les médias. La collectivité anglophone du Québec est loin d’être un bloc monolithique! Plusieurs anglophones sont en faveur de la laïcité, tant au Canada qu’au Québec! »
En visite à Blanc-Sablon, à l’autre bout de la Côte-Nord, le député de Sainte-Rose raconte qu’il a rencontré plusieurs citoyens anglophones, dont l’un, de manière non sollicitée, qui l’a abordé afin de lui rappeler qu’il était en faveur du projet de loi sur la laïcité!
« N’abandonnez pas ce projet de loi là! »
La fin de la polarisation du vote des anglophones?
Lucide, Christopher Skeete aborde son rôle de responsable des relations avec les Québécoises et les Québécois d’expression anglaise en sachant fort bien que la situation qui a prévalu au cours des 50 dernières années pourrait bien être appelée à changer :
« Avec l’émergence du mouvement souverainiste, il y a une cinquantaine d’années, il y a eu polarisation du vote au Québec. Les anglophones de la province, en réaction à ce mouvement, ont systématiquement appuyé un seul parti politique, à partir d’un seul enjeu, celui de leur appartenance au Canada, pour faire échec au mouvement indépendantiste. »
Au cours de cette période, du point de vue de la collectivité anglophone rappelle le député Skeete, le Parti libéral est devenu « un parti politique d’une cause unique » (single issue party), celui de l’échec à l’indépendantisme.
Ce qui a nui, en quelque sorte, à l’implication de cette collectivité à la vie politique québécoise. Beaucoup se sont sentis exclus des affaires de l’État. Un vote captif, en fonction d’un seul sujet, qui a été néfaste selon Skeete :
« Enclavé dans un seul parti, le citoyen anglophone votait toujours en fonction du même sujet; ce faisant, il avait moins son mot à dire sur tous les autres, comme l’éducation, les routes, etc. La fin du bipartisme permettra à la collectivité anglophone de réinvestir le débat public sur autre chose que le débat constitutionnel. »
Et Christopher Skeete, dans sa ronde d’entrevues récentes au sein des divers médias anglophones du Québec, était armé des derniers sondages à propos de la laïcité. Tant au Québec qu’au Canada.
Car il est important pour lui, pour le gouvernement Legault aussi, de rappeler que la collectivité anglophone du Québec n’est pas un bloc monolithique et que l’appui au principe de la laïcité est plus important qu’on ne le croit au sein de la population anglophone.
Skeete rappelle qu’en moyenne, plus de 40% des Canadiens appuient le principe de laïcité, une proportion qui est sensiblement la même au Québec.
Surtout, on doit admettre que François Legault a eu la main heureuse en confiant cette délicate tâche à Christopher Skeete. Politicien ouvert, tout sauf polarisant, ce dernier travaille inlassablement, enfile les entrevues les unes après les autres, fait face à des animateurs parfois hostiles, mais pas toujours. Et toujours, celui-ci défend la position du gouvernement de manière posée.
À coup sûr, ce député rapproche les deux solitudes. Même quand il s’agit de causer laïcité.