Avec la fin des travaux parlementaires ce vendredi aux Communes s’amorce une longue campagne électorale dont le point d’orgue sera le scrutin du 19 octobre. S’y jouera la réélection du Parti conservateur. Bilan de quatre années du gouvernement de Stephen Harper.
Fatigué, ce gouvernement l’est. Après tout, il cumule tout près de 10 années à la tête du pays, dont les quatre dernières en situation majoritaire, ce qui lui a permis de faire tout ce qu’il n’avait pu réaliser les années précédentes alors qu’il était minoritaire.
Les axes de son action ont été restreints. D’abord la lutte contre la criminalité par la répression. Il a multiplié lois et politiques comme aucun gouvernement ne l’avait fait. Il a poursuivi avec l’adoption de mesures pour contrer le terrorisme avec le projet C-51 qu’il a prolongées par un engagement militaire en Irak.
Sur le plan économique, il a tout misé sur l’exploitation des hydrocarbures, cela, à contre-courant de ses obligations en matière de lutte contre le changement climatique. Autrement, peu ou sinon aucune intervention de soutien à l’économie, la priorité allant à l’équilibre budgétaire. Les premiers surplus dégagés ont vite été dissipés dans des mesures électoralistes.
La majorité dont ce gouvernement disposait aux Communes lui a permis de réaliser ses objectifs sans coup férir. Et même lorsque ce n’était pas nécessaire, il s’en est servi pour bulldozer l’opposition à coups de projets de loi mammouths. Mais, trop fort casse. Par un juste retour des choses, le scandale des allocations de dépenses des sénateurs lui a éclaté au visage. Un scandale dont les principaux protagonistes ont presque tous été nommés au fil des ans par Stephen Harper et dont plusieurs sont poursuivis pour abus de biens publics.
Le procès du sénateur Mike Duffy est un rappel quotidien que le parangon de vertu que prétendait être Stephen Harper ne l’était pas. Il avait promis de transformer le processus de nomination de sénateurs pour le dépolitiser. Il a fait pire que ses prédécesseurs par des nominations partisanes qui pourraient amener la disparition de la Chambre haute.
Le Parlement, dans son ensemble, est devenu dysfonctionnel. Durant ces quatre années de gouvernement majoritaire, Stephen Harper a réussi à déplacer une partie des pouvoirs du législatif vers l’exécutif. Déjà, les pouvoirs du premier ministre étaient jugés exorbitants. Ils sont devenus excessifs. Rares sont les ministres qui exercent de réels pouvoirs, ce qui a conduit au départ en cours de mandat du ministre des Finances Jim Flaherty. Les « raisons familiales » qui ont amené le retour à la vie privée du ministre de la Justice, Peter MacKay, ont aussi fait sourire bien des observateurs. Vendredi, James Moore ajoutait son nom à la liste de quelque 30 députés et ministres conservateurs qui ne se représenteront pas à cette élection.
Le mot qui traduit le mieux l’esprit de ce gouvernement est « autorité », qui trop souvent s’est manifestée par une volonté d’imposer ses vues, peu importe ce que pouvait prévoir la Constitution ou les règles parlementaires. À ceux qui craignaient qu’une fois majoritaire il fasse preuve d’autoritarisme, Stephen Harper avait répondu lors de la campagne électorale de 2011 que l’opposition, la fonction publique et les tribunaux feraient contrepoids. Il a réussi à museler les deux premiers, mais heureusement pas les tribunaux. La Cour suprême n’a cessé de corriger et de blâmer le gouvernement, qui a fini par la voir comme un adversaire politique.
Cet autoritarisme a néanmoins une certaine résonance dans l’opinion publique. Les attentats terroristes de Saint-Jean-sur-Richelieu et d’Ottawa l’automne dernier ont permis aux conservateurs d’exploiter le sentiment d’insécurité créé par ces événements. Le dépôt d’une série de projets de loi de dernière minute aux Communes sur la criminalité montre qu’ils n’ont aucun regret, tout au contraire. On persiste et signe, ce qui est cohérent avec la volonté déjà proclamée de Stephen Harper d’être assez longtemps au pouvoir pour changer durablement le Canada et les valeurs canadiennes. C’est le propre d’un parti doctrinaire dont les électeurs commencent à trouver qu’il est déjà allé trop loin. Du moins, en ce début de campagne, c’est ce que laissent croire les sondages. En 124 jours de campagne, bien des choses peuvent toutefois changer.
GOUVERNEMENT HARPER
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