Se sentant temporairement affranchi de la tutelle canadienne, notre Premier ministre a récemment déclaré dans une grande entrevue à la télévision internationale TV5 que le Québec avait les moyens d'être un pays indépendant. Il n'en fallait pas plus pour que les pages d'opinions des lecteurs se couvrent d'éloges de la soumission, de la dépendance sinon du misérabilisme, parlant même d'« éloge de la liberté ». Pour certains, les vieux réflexes de porteur d'eau sont toujours près de se manifester.
On se souviendra qu'au cours de la dernière campagne électorale fédérale, une candidate du parti de Jean Chrétien et du « scandale des commandites » de la région de Québec s'est fait remarquer en déclarant que le Québec était « une province très pauvre » et que nous vivions essentiellement aux crochets du Canada. Oh! misérabilisme, quand tu nous tiens, pas facile d'en sortir ! Or, nous savons tous que c'est faux : si nous ne somme pas aussi riches que nous devrions l'être (loin de là), nous ne sommes pas pauvres. Divers experts sont d'accord sur ce point, dont le directeur du département d'économie de l'Université Harvard, Alberto Alesina, tel que rapporté dans Le Soleil du 13 novembre 2004 : « Grâce au libre-échange, l'argument économique contre la souveraineté du Québec ne ferait pas le poids dans un nouveau référendum (...). Le fait de participer à une vaste zone de libre-échange permet aux pays de prospérer, à la condition évidente de demeurer très ouverts aux autres économies (...) Sur un plan strictement économique, soutient M. Alesina, il ne serait pas tellement difficile pour le Québec de devenir indépendant. Cela peut se faire à un coût très bas pour tout le monde et je ne vois pas pourquoi il ne réussirait pas. La décision est strictement politique et si le Québec veut se séparer pour des raisons linguistiques, par exemple, l'économie ne sera pas un facteur dans la décision » dit-il. Or, c'est précisément et surtout pour des raisons culturelles et linguistiques que le Québec doit être libre dans tous les domaines.
Parmi d'autres, le Pr Pierre Fortin, économiste de l'UQAM, révélait récemment que « le Québec n'est pas pauvre. Statistique Canada a estimé qu'en 2004 le revenu moyen par habitant en Ontario était de 41 700 dollars; au Québec, de 35 100 dollars. Si on tient compte du fait que la vie coûte moins cher au Québec, ces 35 100 dollars équivalaient à un pouvoir d'achat de 39 600 dollars en Ontario. Le Québec est donc 5% moins riche que l'Ontario. Mais il n'est pas pauvre. Au classement mondial des niveaux de vie, il occuperait le 18e rang parmi les 191 pays membres des Nations unies. Il fait moins bien que les États-Unis et l'Angleterre, mais aussi bien que la France, l'Allemagne et le Japon.» clic
Mais le territoire du Québec est surtout UN DES PLUS RICHES AU MONDE. Nous le savons aussi ! Or, le problème très grave est que, depuis plus de deux siècles ses immenses ressources naturelles profitent très largement, sinon essentiellement, à de grands intérêts étrangers qui gèrent et exploitent nos mines et nos forêts à notre place : une situation coloniale inimaginable dans les pays les plus prospères au monde tels que les É.U.A, la Norvège, la Suède, la Finlande, ces trois derniers étant beaucoup plus petits et plus prospères que le Québec [ ]. Il est clair que ces ressources doivent nous rapporter bien davantage en ayant un système de redevances équitable et en les développant en partenariat avec diverses entreprises d'ici et d'ailleurs.
Forcément, cette longue tradition d'exploitation coloniale et de gagne-petit nous a marqués et affecte encore assez fortement les mentalités malgré des succès remarquables dans quelques domaines, à chaque fois qu'on a pu balayer ces vieux réflexes coloniaux : comme dans celui de l'hydroélectricité, à cause d'une forte volonté politique s'appuyant sur la volonté populaire (René Lévesque, Lionel Boulet -fondateur du Centre de recherche d'Hydro-Québec-...). C'est aussi le cas des finances, par exemple, avec le Mouvement Desjardins. Des réussites remarquables et essentielles, grâce à la détermination, à la solidarité et à la coopération. Mais il nous reste encore plus à faire pour développer des traditions de réussite dans divers secteurs industriels : des traditions de compétence, de propriété, d'appartenance forte et partagée, des traditions d'excellence, de coopération et de concertation pour le bien-être de tous. C'est le fait des nations prospères.
Notre dépendance historique de la grande entreprise étrangère a trop fait de nous des revendicateurs et des quémandeurs. Une révolution dans les attitudes et comportements s'impose sans aucun doute si nous avons la moindre volonté d'agir par nous-mêmes comme près de 200 nations dans le monde. Et cela passe nécessairement par la pleine maîtrise sur notre territoire, par une solide prise de conscience de nos capacités, et par un système d'éducation de langue française aux compétences et ressources considérablement renforcées permettant à TOUS les talents de s'épanouir de la maternelle à l'université : il y en a trop qui se perdent. Il faut donc se mettre au travail et ne pas espérer que d'autres vont régler nos problèmes à notre place.
Jean-Luc Dion, ing. Trois-Rivières
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