L’idée du gouvernement Couillard de faire du secteur de Cacouna une « zone industrialo-portuaire » clé de la stratégie maritime suscite de « vives inquiétudes » chez les spécialistes du béluga du Saint-Laurent, mais aussi chez les écologistes. Ces derniers appellent plutôt à agrandir la zone de protection de l’estuaire, un projet qui stagne depuis plus de 15 ans.
« L’augmentation du trafic maritime dans ce secteur n’est pas une bonne nouvelle, résume Robert Michaud, un chercheur qui étudie le béluga depuis plus de 30 ans. C’est étonnant de voir qu’une telle annonce, quelques mois après le tollé suscité par le projet de TransCanada, n’est pas faite avec davantage de délicatesse et de retenue. »
Le scientifique se questionne d’ailleurs sur la teneur de « l’évaluation des impacts » menée par le gouvernement Couillard avant d’évoquer l’idée de transformer le secteur en pôle industriel de calibre international. « Il faut se demander qui a été consulté, quels experts ? Sinon, est-ce que le gouvernement du Québec se comporte de la même façon que TransCanada, donc pas nécessairement de façon responsable, en lançant un projet sans avoir fait ses devoirs ? TransCanada n’avait pas fait ses devoirs, et ça lui a coûté très cher. Est-ce que le gouvernement du Québec vient de faire la même chose ? »
Le président du Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins rappelle qu’un avis scientifique de Pêches et Océans a déjà conclu qu’une augmentation du trafic maritime à proximité de Cacouna « représenterait une augmentation importante de l’exposition au bruit » pour les femelles bélugas. Or, la circulation des navires et le bruit que cela provoque constituent une source de dérangement majeure pour l’espèce, qui ne compte plus que 880 individus et poursuit son déclin.
Attirer des entreprises
Robert Michaud estime par ailleurs qu’il serait nécessaire de « dresser un portrait global » de la croissance attendue du trafic sur le Saint-Laurent dans le cadre de la stratégie maritime. Tout indique en effet que celle-ci entraînera une hausse de la circulation sur le Saint-Laurent.
Cela vaudrait aussi pour le secteur de Cacouna, si celui-ci devient une « zone industrialo-portuaire », comme l’a évoqué lundi le ministre responsable de la stratégie, Jean D’Amour. Les documents de la stratégie maritime indiquent en effet qu’une telle zone « permet aux entreprises qui s’y implantent un accès facilité à leurs intrants et un transit accéléré de leurs marchandises vers les marchés nord-américains et internationaux ». Le gouvernement entend d’ailleurs en faire la « promotion » dans le but d’attirer « des investissements à l’international ».
Ces mêmes documents visent clairement « le béluga » dans les objectifs de protection de la biodiversité et des écosystèmes. Le gouvernement ne fait toutefois aucune mention du projet de zone de protection marine (ZPM). Celui-ci est évoqué depuis plus de 15 ans. Cette zone de plus de 6000 km2 est d’ailleurs déjà désignée comme « site d’intérêt » par Pêches et Océans Canada, notamment parce qu’elle « correspond à l’aire de répartition estivale du béluga ».
Si le projet de ZPM se concrétisait, il engloberait le secteur de Cacouna, qui fait partie de l’habitat essentiel de l’espèce. Le hic, c’est que le gouvernement fédéral n’a toujours pas désigné officiellement cet habitat, même s’il aurait dû le faire il y a de cela trois ans. Le directeur général de Nature Québec, Christian Simard, a donc pressé mardi le gouvernement « d’agrandir le territoire du parc marin du Saguenay—Saint-Laurent en le prolongeant pour protéger une fois pour toutes l’habitat critique du béluga de l’estuaire du Saint-Laurent ».
ZONE INDUSTRIALO-PORTUAIRE À CACOUNA
L’annonce de Québec suscite de «vives inquiétudes»
Les écologistes appellent le gouvernement à agrandir la zone de protection de l’estuaire
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