L’affaire des guichets automatiques clandestins montre à quel point il ne faut pas se fier aux apparences. Ni à ce que les grands hérons de la bureaucratie racontent aux politiciens quand ils sont mal pris...
Dans cette histoire, l’Autorité des marchés financiers s’est traîné les pieds; n’en retenez pas autre chose. L’AMF porte un titre ronflant et des habits sur mesure, mais c’est une organisation fonctionnarisée qui se distingue surtout par l’opacité de ses opérations.
Revenons en arrière pour comprendre ce verdict sévère.
Pas une priorité
Au milieu des années 2000, les guichets clandestins se sont mis à pulluler au Québec et, devant ce fléau, le gouvernement décida d’exiger un contrôle strict pour en expurger le crime organisé.
Les lois sont modifiées en conséquence et l’AMF obtient le mandat de mettre de l’ordre. L’AMF s’y engage en 2013. Mais, de toute évidence, ce n’était pas vraiment sa priorité.
Pourtant, ces satanées machines ruinent parfois les moins nantis. On les trouve souvent là où l’alcool est en vente. Et les gens intoxiqués dépensent plus que de raison.
Les propriétaires d’établissements trouvent d’ailleurs que ces bidules sont beaucoup plus payants qu’une valideuse de cartes de crédit.
Ils sont tellement faciles à gérer qu’ils le font eux-mêmes. Ils les remplissent d’argent comptant, souvent sans savoir que l’AMF aurait quelque chose à dire.
L’AMF avait espéré d’emblée que les propriétaires demanderaient eux-mêmes leur certificat d’autorisation. Encore aurait-il fallu qu’ils en connaissent l’existence.
Mafia
Des gens liés à la mafia, à Montréal, en Abitibi et ailleurs, des criminels notoires ont donc pu facilement se procurer ces petites merveilles. Quelle aubaine! Les remplir avec l’argent du trafic de drogues pour le recycler ensuite dans l’économie légale.
Voilà pourquoi c’est souvent dans les bars des quartiers pauvres qu’on les retrouve. Dans les endroits où la mafia a toujours été présente.
Ça pourrait expliquer la nonchalance de l’AMF. Nommé à l’été 2013 par Pauline Marois, le président Louis Morrisset est un avocat de haut vol qui brilla un temps sur la place financière de Londres.
Me Morrisset préside maintenant un organisme public et empoche plus de 8000 $ par semaine. Entre autres avantages, il dispose d’une automobile «convenant à son poste». Il serait compréhensible que les guichets clandestins n’aient pas été le premier de ses soucis.
Mais, trois ans après l’adoption d’une loi visant à encadrer ces soi-disant guichets bancaires, il est incroyable que l’AMF n’ait pas une idée précise de la situation.
Leitao a mal paru
À l’Assemblée nationale, l’AMF a fait très mal paraître le ministre des Finances, Carlos Leitao. Une première!
Comment aurait-il pu savoir que des proches de la mafia avaient de tels guichets puisque l’AMF ne le savait pas non plus?
Avec un nom comme le sien, l’Autorité ne voulait croire qu’elle-même. Jusqu’à ce que Le Journal dévoile les noms de mafieux agissant dans l’ombre d’entreprises ayant des guichets dûment accrédités. Le ministre Leitao a dû se rendre à l’évidence: l’AMF, comme on dit, l’avait échappé...
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