Domenico Lucano, maire du village de Riace en Calabre, est soupçonné d'aide à l'immigration clandestine. La Ligue des droits de l'Homme dénonce "un nouveau pas" du ministre de l'Intérieur italien, Matteo Salvini.
Il fait figure de modèle pour les défenseurs de l'accueil des migrants en Italie. Le maire du village calabrais de Riace, dans le sud de l'Italie, a été arrêté, a annoncé ce mardi 2 octobre le parquet local, qui le soupçonne d'aide à l'immigration clandestine. Domenico Lucano est également soupçonné d'irrégularités dans l'octroi des financements pour le ramassage des ordures de son village, selon un communiqué des autorités judiciaires.
Dans le dossier des migrants, l'élu est accusé d'avoir organisé des mariages de convenance entre des habitants de son village et des femmes étrangères afin d'obtenir à ces dernières un titre de séjour. Le communiqué cite des extraits d'écoutes téléphoniques dans desquelles il semble agir en connaissance de cause contre la loi en vigueur, qu'il qualifie de "stupide". "Je vais vous faire la carte d'identité, je suis hors-la-loi, je suis hors-la-loi car pour faire la carte d'identité je devrais avoir un permis de séjour encore valable. En plus vous devriez démontrer que vous résidez à Riace, que vous avez une habitation à Riace, (...) j'assume la responsabilité et je vous dis que ça va", dit-il ainsi à une femme étrangère dans une conversation enregistrée par les enquêteurs, selon le parquet.
Dans une seconde conversation citée, il suggère à une Nigériane un mariage de convenance : "Vous savez quelle est selon moi la seule possibilité ? Que vous vous mariiez, comme a fait Stella. Stella a épousé Nazareno, je suis responsable de l'état civil, le mariage avec un citoyen italien je le célèbre tout de suite".
La LDH dénonce "un nouveau pas du ministre de l’Intérieur italien"
Dans les années 2000, ce maire de gauche a été l'un des premiers à parier sur l'accueil des réfugiés pour redonner vie à son village de 1.800 habitants. "Le repeuplement de Riace nous a sauvés. Nous étions condamnés à la
disparition, nous avons lancé un message d'espoir…", confiait-il à Marianne dans un reportage publié cet été. Distingué en 2010 comme troisième "meilleur maire du monde", cité parmi les 100 personnalités les plus influentes par le magazine Fortune en 2016, Domenico Lucano, surnommé "Mimmo", a inspiré un docu-fiction de Wim Wenders et un téléfilm qui doit être diffusé en février en Italie.
En fin de journée ce mardi, la Ligue des droits de l’Homme a diffusé un communiqué exigeant la libération du maire. La LDH dénonce "un nouveau pas du ministre de l’Intérieur italien, Matteo Salvini, qui déclarait, il y a quelques semaines de cela, qu’il irait à Riace lorsque Mimmo Lucano n’en serait plus le maire".
"Après la fermeture des ports italiens aux migrants secourus en mer, le leader d’extrême droite poursuit dans la voie de la criminalisation de leur accueil", conclut l'ONG qui "demande au président de la République d’intervenir auprès du gouvernement italien pour la libération immédiate de Mimmo Lucano".