«... Il ne peut pas plus y avoir deux souverains, à l'intérieur d'une collectivité politiquement organisée, qu'il ne peut y avoir deux généraux en chef à la tête d'une armée....» (Raymond Aron)
La création éventuelle d’un Institut de recherche sur l’indépendance viendra combler un vide au sein du mouvement indépendantiste. L’équipe qui sera chargé d’œuvrer dans cet Institut aura beaucoup de pain sur la planche. Entre autres, le concept de «pays» devrait faire l’objet d’une attention sérieuse par rapport aux concepts d’État-Nation(s) et d’indépendance politique du Québec. C’est tout un discours neuf qui devra voir le jour dans l’optique indépendantiste.
Si le mot pays fait référence à la notion de «nation» et au concept d’«unité politique» dotée de la souveraineté de l’État, il devrait donc, dans ce cas de figure, être question d’indépendance politique au cœur même de la question nationale qui englobe l’identité culturelle ou la notion de nation au sens sociologique, culturel surtout. Cependant, il faudrait être encore plus clair, car il doit s’agir principalement de la nation au sens intégral, c’est-à-dire de l’agir par soi collectif dans tous les aspects politique, économique et culturel. Ce sera LE DÉFI de taille pour tous les travaux de cet Institut.
La déliquescence de la place de la grande histoire du Québec contemporain (de ses origines à nos jours) et des deux nationalismes au Canada devrait faire l’objet d’une réflexion critique sur l’état de notre pensée politique. Car notre situation présente fait partie d’une temporalité historique que nous ne devons pas occulter du revers de la main. Bien sûr, une Constitution, bien sûr un Budget national d’État et, bien sûr aussi, d’un travail essentiel qui devrait porter sur la compréhension des bienfaits fondamentaux de maîtriser par soi, collectivement, sa vie politique, sa vie économique et sa vie culturelle sur la portée cruciale qui doit être accordée au concept de nation indépendante. N’est-ce pas, en fait, le cas de la nation (au sens sociologique, culturel surtout) qui maîtrise comme majorité un État souverain? Dans notre cas, y parvenir ce serait la réussite politique d’une nation et d’une société solidement organisée qui sera parvenue à son terme pour se débarrasser définitivement de son «status» de nation annexée. Le good government ou la gouvernance ne peut se substituer au self-government, car «on ne saurait soutenir qu’une nationalité dominée, annexée politiquement, économiquement… ne subit aucun tort…». Et Maurice Séguin précise aussitôt : «On ne peut prétendre qu’une nation annexée, colonisée n’a qu’un droit «éloignée»… à l’indépendance.» De ce fait, ne pas être maître chez soi et ne pas être présent par soi au monde constituent deux privations essentielles de la liberté collective d’une nation.
Le Parti Québécois doit s’ouvrir clairement autour de telles idées. La population québécoise attend un signal clair des politiques souverainistes et du Parti Québécois pour l’appuyer ouvertement et fermement. Les sondages suivront la courbe du mouvement. Ce fier d’abord aux sondages ne peut que créer des illusions personnelles et collectives et beaucoup d’excitation superficielle.
La proposition de monsieur Pierre Karl Péladeau, candidat à la chefferie du PQ, mérite sérieusement notre attention. Dans les circonstances actuelles, cette création est absolument nécessaire. Ça fait depuis une quinzaine d’années que nous formulons la nécessité de créer un tel organisme ayant pignon sur rue et avoir la crédibilité enfin de supporter lucidement l’action indépendantiste québécoise.
L’histoire a conduit les Québécois-Français là où nous sommes collectivement rendus aujourd’hui en tant que province dans le Canada-Uni. Il faut en prendre acte. Transformer cette situation exigera un sens de l’objectivité, de la sincérité et un respect du bien-fondé de l’action à entreprendre et de la vérité. Voilà ce que nous impose l’élaboration de cette politique publique nationale de l’indépendance politique du Québec.
Contrairement aux habitudes ataviques des péquistes, le devoir d’histoire devient une responsabilité collective pour eux. Ne pourrait-il pas commencer par le post mortem de leurs déboires qui n’a jamais été fait? Ne serait-ce que sous cet angle, la création d’un Institut de recherche sur l’indépendance devient incontournable. Il s’agit plus que de la mémoire ou du souvenir mais de l’histoire. Les indépendantistes doivent apprendre à revisiter leur passé véritable avec lucidité et beaucoup d’abnégation.
Les normes qui permettent de comprendre le fait de l’indépendance concernent en tout premier lieu le sens que l’on veut accorder au terme de nation. Simplement dit : Il faut exister séparément d’abord (avant d’avoir une personnalité collective), soit être distinct avant d’être différent. La personnalité, l’originalité viennent nécessairement après le fait d’exister, soit que la manière sort de l’existence. Cela dit, il faut par ailleurs admettre que la maîtrise de l’agir collectif l’emporte en valeur sur la manière d’agir. Finalement, si l’Institut endosse l’optique indépendantiste, ses dirigeants devront admettre le rôle considérable de l’État pour la nation québécoise souveraine. Ainsi, l’État représente la force politique, c’est la tête. L’accent est mis sur le rôle puissant d’intervention, d’organisation du pouvoir politique, donc c’est la tête capable de penser, de vouloir, de commander, de déclencher l’action.
Le procès du fédéralisme canadien a été fait sur toutes ses coutures. La défense de l’indépendance politique du Québec doit maintenant s’affiner sur les bases de la «vraie» souveraineté qui consiste à agir collectivement, majoritairement à tous les paliers, sur le plan interne, sur le plan régional. Et avec l'indépendance complète, la maîtrise de ses relations selon ses propres fins avec les autres nations et États souverains.
Sur ces prémisses, la constitution québécoise, le budget national, les politiques publiques, etc., doivent s’inscrire dans ce canevas idéologique ou système d’idées propre à la nation indépendante. À cet égard, l’Institut aura à se positionner clairement. Sa crédibilité en dépendra grandement aux yeux des indépendantistes et de toute la société québécoise.
* * *
Quelques références pour alimenter la réflexion
Éditions Atlas 1999
Pays (et aménagement du territoire et collectivités locales)
Voir le fac-similé ci-joint.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/noroi_0029-182x_1999_num_181_1_6932#à
Hypergéo
En format HTML et en PDF disponible
http://www.hypergeo.eu/spip.php?article269
«Le pays et l'espace vécu. Quelles logiques pour quels territoires ?»
Françoise Ardillier-Carras
Département de géographie de Limoges
L'auteur se pose la question : «Si le pays s'accordait avec l'espace vécu ?» (p. 179)
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/noroi_0029-182x_1999_num_181_1_6932#
Commission Bélanger-Campeau sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec
De la DIFFÉRENCE à la DISTINCTION
Mémoire présenté par Bruno Deshaies, historien
Québec, 4 mai 1990
http://www.rond-point.qc.ca/rond-point/histoire/rond-point-histoire-12/
Souveraineté et fédération (Raymond Aron)
Excellente réflexion sur les équivoques de la souveraineté
Le Rond-Point des sciences humaines
http://www.rond-point.qc.ca/rond-point/histoire/rond-point-histoire-11/
INDÉPENDANCE nationale DU QUÉBEC 386
Carrefour de l’indépendance nationale du Québec
Les personnes intéressées à participer au Carrefour de l’Indépendance pourraient me faire parvenir privément leur accord sur cette idée.
Bruno DESHAIES mardi 31 janvier 2012
3 259 visites 31 messages
http://www.vigile.net/Carrefour-de-l-independance
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1 commentaire
Bruno Deshaies Répondre
17 février 2015Bruno Deshaies mardi 17 février 2015 10:29
L’Institut québécois de recherche appliquée sur l’indépendance va avoir du travail à faire. Il ne pourra ni occulter la dimension historique du problème ni l’obligation d’expliquer la nature de l’indépendance politique du Québec, soit «La ″question″ fondamentale» d’Yves Martin (cf. notre chronique précédente).
L’Institut devra se rendre à l’évidence assez vite que les Québécois sont plus divisés qu’on ne peut l’imaginer. «Un mandat pour le pays», c’est bien beau et toutes les souverainetés sectorielles sans l’indépendance politique, c’est un pis-aller.
L’article de Marco Bélair-Cirino du 9 février a suscité une très longue série de commentaires. Celui de Robert Lauzon a finalement été au centre des échanges entre les pour et les contre la séparation du Québec ou entre les pro-fédéralistes et les pro-indépendantistes. Allez-y-voir maintenant comment résoudre cette difficulté qui porte sur l’objectif de l’indépendance réelle du Québec.
L’Institut aura à répondre à la question très simple de ce que c’est que l’indépendance. Pour y arriver, l’équipe de recherche devra avoir recours à l’histoire politique du Québec. Cette histoire concerne le phénomène contraignant dans le temps de l’annexion d’une nation ou d’un peuple par un autre qui dure depuis 1760. Les effets sont identifiables si l’on considère que l’indépendance pour une nation est un bien en soi.
C’est la transformation de la situation qui est le problème fondamental au plan de l’action. L’Institut aura à se donner clairement une ligne de conduite ferme.
Voici un petit dossier qui pourrait faire réfléchir tous les candidats et la candidate dans cette course à la chefferie du PQ.
Robert Lauzon – Abonné Le Devoir
9 février 2015 06 h 24
L'indépendance politique du Québec!
Du projet de souveraineté-association de MSA, ancêtre du PQ, il ne manque que l'indépendance politique. Nous sommes déjà associés dans l'ALENA et plusieurs autres ententes commerciales. Il sera difficile, selon le droit international, de nous en sortir. De plus, côté financier, le Québec envoie annuellement, net de tout retour direct (péréquation et autres), $30 milliards à Ottawa sur lesquels nous perdons tout contrôle. Pendant ce temps, les plquistes-provincialistes pillent tout le Québec à la recherche de 10% de cette somme.
Aujourd'hui, aucune économie, aucun pays au monde ne peut se targuer d'être indépendant économiquement. Tous les pays sont inter-dépendants les uns des autres s'empruntant et se prêtant mutuellement les fonds nécessaires à leurs projets.
L'indépendance politique du Québec est ce dont nous avons besoin pour assumer la pérennité de notre nation. Les politiques spécifiques en matière sociale, culturelle et économique viendront quand nous serons indépendants politiquement.
Nous avons besoin d'expliquer le projet, ses tenants et aboutissants, de le définir clairement dans un projet de constitution pour ce Pays, sa société et ses institutions.
Le Devoir lundi 16 février 2015
http://www.vigile.net/2018-PKP-solliciterait-un-mandat
2018 : PKP solliciterait un mandat pour le pays
Le candidat à la course à la chefferie du PQ veut créer un institut de recherche sur l’indépendance
Marco BELAIR-CIRINO
Le Devoir, 9 février 2015
INDÉPENDANCE
Le projet avant la mécanique, dit le PQ
Les péquistes rassemblés en conseil national veulent cesser de parler d’une date référendaire
Marco Bélair-Cirino à Laval | Québec http://www.ledevoir.com/politique/quebec/431317/independance-le-projet-avant-la-mecanique-dit-le-pq
Le Rond-point des sciences humaines
Histoire du Québec
http://www.rond-point.qc.ca/rond-point/histoire/
Bruno Deshaies
Treize leçons sur l'indépendance et l'interdépendance.
Indépendance nationale du Québec
Bruno Deshaies, © 2012-2014
http://www.rond-point.qc.ca/blog/media/pdf/Treize-Lecons.version_2013-10-02_FINAL.pdf