L’arrivée fracassante de Guy Nantel--- dans la course à la direction du Parti québécois a fait réagir l’opinion, comme en témoigne le sondage qui paraît aujourd’hui dans nos pages.
Voilà un homme intelligent, aux convictions trempées, avec une grande notoriété et qui veut s’engager pour la plus belle cause qui soit, celle de l’indépendance du Québec.
Les péquistes qui redoutaient la disparition de leur parti le voient comme un homme providentiel. Il deviendra de plus en plus difficile de dire de cette course qu’elle est ennuyante, à la différence de celle qui fait ronfler chez les libéraux.
Certains ont néanmoins confessé leur scepticisme. Peut-on passer d’humoriste à homme d’État, de blagueur à leader ---? La réponse est simple : oui. La vie politique est faite de parcours imprévisibles. Il arrive qu’un homme, dans sa vie, sente ce qu’on appelait autrefois l’appel de la patrie – seuls les sots riront de cette belle formule.
Notoriété
En démocratie, il n’existe pas une liste de professions réservées conduisant à l’exercice des charges publiques. Surtout, dans une époque où la classe politique est déconsidérée, un homme qui arrive avec la réputation d’un transgresseur de l’ordre établi plaît inévitablement aux électeurs. Nantel apparaît comme un rebelle antisystème.
Là où le bât blesse, toutefois, c’est que ce passage doit être complet. Guy Nantel, on le sait, entend mener une course à la chefferie à temps partiel en continuant ses spectacles d’humour.
Cette erreur de jugement pourrait lui coûter cher.
La parole d’un homme public ne peut se dédoubler. Il ne peut multiplier les blagues les plus piquantes le jeudi soir et le vendredi matin tenir un discours sur l’avenir de la nation. Chacune de ses déclarations engage l’homme politique. On ne peut pas avoir deux existences publiques à la fois.
Qu’on le veuille ou non, la politique est un métier. Probablement le plus prenant qui soit. Elle a ses exigences, ses codes. Évidemment, un candidat d’exception peut arriver et briser certaines règles. Il doit quand même en accepter plusieurs.
Guy Nantel devra aussi préciser sa pensée. Veut-il vraiment changer le drapeau du Québec ? Cette proposition est plus explosive qu’il ne le pense. On ne manipule pas ainsi les symboles d’un peuple, et encore moins celui-là, qui nous enracine dans notre plus profonde histoire.
Chacune de ses propositions sera scrutée attentivement.
Les autres candidats, dont la qualité doit être rappelée, accueilleront le sondage d’aujourd’hui avec inquiétude.
Débats
Mais si la notoriété est un avantage en politique, elle est insuffisante. Les débats joueront un grand rôle dans la suite des choses. Que diront les candidats de l’anglicisation de Montréal, de l’avenir du français au Québec, de l’immigration massive ? Comment pensent-ils pousser les Québécois à renouer avec l’indépendance ?
La course commence maintenant. Mais elle se jouera vraiment dans les débats. C’est là qu’elle dépassera le test de notoriété. Les candidats y feront valoir leurs idées et leur vision. Nous pourrons alors trancher.