Édifice de l'Assemblée nationale
Photothèque Le Soleil, Erick Labbé
Au Québec, la politique partisane verse dans les coups bas. Après l'ère du vide, c'est l'ère du dénigrement. Le dénigrement couche avec la médisance, la calomnie, les attaques sournoises, les critiques non fondées. Sans argument, l'attaquant laisse entendre, suggère, insinue, sème le doute. L'auditeur, incapable de discerner, envahi par la multitude des critiques venant de tous les côtés, s'indigne, ne sait plus quel jugement porter, s'en balance et ferme les oreilles. «Ils sont tous pareils !» Voilà le jugement définitif.
Le Québec politique est déshonorant. Le gouvernement ne fait jamais ce que les opposants voudraient qu'il fasse. Les opposants critiquent le gouvernement en ne proposant rien de très sérieux pour mettre à la place. On sait toujours ce qu'il ne faudrait pas faire: on ne sait pas trop ce que l'opposant proposerait, s'il occupait les banquettes ministérielles, pour que la situation s'améliore. On critique ce qui semble le pire: on ne suggère rien qui ferait qu'on aurait le meilleur.
Les partis politiques du Québec devraient cesser de se dénigrer, de plonger dans le monde puant des insinuations, des allégations, des scandales présumés pour se consacrer à faire du neuf, du propre, de l'inédit. Au contraire, ils préfèrent les marécages et les terrains vaseux, visqueux, nauséabonds. Volontairement, ils délaissent les avenues de l'espoir, les chemins du changement durable, les espaces de réenchantement du monde. Les carriéristes politiques s'efforcent de noircir toutes les situations. Ils savent qu'ils gagnent plus dans les boîtes de scrutin en présentant des avenues apocalyptiques qu'en évoquant les corrections à faire pour redresser les égarements de tous.
Les partis politiques préfèrent détruire l'adversaire, exagérer ses travers plutôt que de proposer une alternative crédible. Il est plus facile de faire table rase que d'élever, dans la fraternité, un projet qui cimenterait les citoyens d'aujourd'hui et de demain.
Les derniers sondages placent Jean Charest dans la cave. Pauline Marois atteint le rez-de-chaussée, de peine et de misère. Plus des trois quarts des électeurs ne la voient pas PM. Avec tous les malheurs qui s'acharnent sur le gouvernement actuel, son parti n'atteint pas la barre des 40 %. Les Québécois ne veulent plus du fédéralisme de Jean Charest; ils ne veulent pas davantage l'emmanchure péquisto-nationaliste de Pauline Marois. Les indépendantistes se sentent orphelins. Ils doivent se réfugier, momentanément, ailleurs. Pas étonnant qu'une troisième voie, sans chef, sans programme, rallie une majorité. À force de dire et de se dédire, de semer à tous les vents, le PQ fait le vide autour de lui. Les convictions restent, mais elles ne trouvent plus de terrain où s'exprimer, mener le combat.
Pas étonnant que, le jour du scrutin venu, les électeurs préfèrent rester devant leur écran de télévision. Ils ont le sentiment qu'il ne sert à rien de remplacer les politiciens en place par des gens qui ne se proposent rien d'autre que de faire le ménage dans la maison et plonger par la suite, dans les mêmes travers qu'ils avaient jadis dénoncés. Ils savent, d'intuition, que le supposé ménage terminé, le même mal recommencera.
Au pays du Québec, le «chialage» est le sport national. On critique tout. On n'est content de rien. On ne sait pas quoi faire pour changer les choses. On se gargarise de slogans creux (ex : gouverner autrement, on se donne le vrai pouvoir), mais le temps venu, au pouvoir, on fait comme ce qui se faisait avant.
Et si on faisait réellement autrement...
Nestor Turcotte, Matane
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