Je commente ici un texte de l'économiste Youri Chassin qui a paru dans le Journal de Montréal le 19 avril 2015, page 40, intitulé: « La privatisation d'Hydro One: un projet éclairant » Nous estimons qu'il manque un point d'interrogation au bout de son titre.
Rendu à la fin de son texte, le lecteur conclut à l'inutilité de "l'expérience ontarienne" parce que les inconvénients fragilisent beaucoup le projet de privatisation avant même qu'il soit lancé. C'est comme une idée morte-née. Dans son texte, l'auteur soupèse les inconvénients au nombre de trois qu'il appelle des "réserves" avec les "avantages" qui sont au nombre de quatre, lesquels sont listés de manière idéologique comme étant des évidences.
De plus, nous précisons que Youri Chassin est directeur de la recherche à l'Institut économique de Montréal (IDEM). Même s'il signe ce texte à titre personnel, par la faiblesse de démonstration de ses idées, l'auteur donne une idée de l'Institut pour lequel il travaille: un club de néocapitalistes qui s'adonnent à de la publicité dirigée. Allons voir.
Commençons par la conclusion de l'article de CHASSIN, je cite: «Il est trop tôt pour dire que l’expérience ontarienne doit nous inspirer, mais on peut déjà dire qu’elle devrait nous éclairer.» Il joue sur les mots "inspirer" et "éclairer": si l'un ne fonctionne pas, l'autre prend la relève... Il parle de "l'expérience ontarienne" de privatisation qui n'est pas commencée ce qui nous fait dire qu'il n'y a pas "d'expérience ontarienne".
Du simple fait qu'à la mi-avril 2015, la PM de l'Ontario, Kathleen Wynne, parle de changements chez Hydro One pour passer d'un actionnaire unique, le Gouv. de l'Ontario, vers un sommet de privatisation de l'actionnariat ouvert au public jusqu'à 60% de la valeur de Hydro One estimée à 15 milliards $ à 100% de sa valeur. Avec un tel ballon politique, Chassin s'emballe pour la privatisation d'Hydro-Québec !
Reprenons la même phrase de l'auteur, je cite: «Il est trop tôt pour dire que l’expérience ontarienne doit nous inspirer, mais on peut déjà dire qu’elle devrait nous éclairer.» Si l'expérience inexistante ne peut pas nous "inspirer", CHASSIN estime que l'annonce du début d'une idée de privatisation partielle de l'actionnariat peut nous "éclairer".
La 2e phrase du texte de CHASSIN contient une imprécision dans son effort pour établir un parallèle potable entre Hydro-Québec et Hydro One. Il écrit, je cite: « Hydro One ne produit pas d’électricité. C’est l’équivalent d’Hydro-Québec Distribution;» Chassin omet d'écrire qu'Hydro One transporte aussi de l'électricité et son pendant chez Hydro-Québec est la Division TransÉnergie.
Il conclut sa phrase sur Hydro-Québec Distribution par une insanité, je cite: « ... grossièrement, (Hydro-Québec Distribution) ce sont des fils et des poteaux » utilisés ici pour la distribution de l'électricité vers les 4,2 millions de clients d'Hydro-Québec. Que fait-il du service à la clientèle dont est responsable Hydro-Québec Distribution ? Comme on sait dans le commerce des poulets rôtis, le livreur dans sa petite auto surmontée d'un coq est aussi important que le rôtisseur resté devant ses fourneaux.
CHASSIN revient sur son questionnement de l'amour des Québécois pour les poteaux d'Hydro-Québec dans sa 1ère phrase du sous-titre "Avantage". Citation: « Mais si les Québécois sont attachés sentimentalement à la Manic, à la Baie-James et aux grands barrages, sont-ils pour autant attachés aux poteaux de distribution? » Ma réponse est "OUI". Les camions lettrés au nom de "Hydro-Québec" gris ou bleu ou blanc sont une présence notoire et quotidienne auprès de l'ensemble de la population et participent à la fierté de la réalisation et du succès qu'est Hydro-Québec dans son ensemble.
Un summum de poésie ou d'irrationalité est atteint par CHASSIN dans la phrase suivante, je cite: « Plus encore, Hydro-Québec Distribution n’appartient pas vraiment aux Québécois, il appartient au gouvernement du Québec.» On voit ici la signature d'une personne effectuant une démarche idéologique-marketing quitte à tronquer l'histoire et les lois du Québec. CHASSIN peut aussi être classé parmi les idéologues du néolibéralisme. Malheureusement, ces gens sont plus des démolisseurs et des prédateurs que des constructeurs du bien commun.
S'en tenant assez proche du texte de CHASSIN, reconnaissons qu'il fait un effort pour énumérer des "réserves", suivies des "avantages". Au chapitre des réserves, nous lisons les points suivants: - le but de l'exercice de réduire le déficit du gouv. de l'Ontario ne sera pas atteint; - les revenus et la valeur d'Hydro One risquent d'être affectés « par le contrôle des tarifs » par la Commission de l'Énergie de l'Ontario et 3ièmement: la limite de propriété à 10% par actionnaire est une autre source de baisse de valeur.
Ces 3 réserves sont des entraves majeures qui fragilisent les avantages d'une privatisation. Du côté des "avantages", l'auteur fait cour sans explication dans l'énumération de quatre lieux communs chers aux néo-libéraux. Je cite: « Privatiser une partie d’Hydro-Québec Distribution pourrait être un moyen de:
a) recentrer la société d’État sur sa mission,
b) l’affranchir de l’ingérence politique,
c) la rendre plus efficace,
d) finalement mieux la mettre au service des Québécois.»
Un petit mot sur c) "la rendre plus efficace". Le premier outil d'efficacité affectionné par les gestionnaires "sans coeur" est le licenciement d'employés à court terme. C'est une forme d'austérité imposée d'en haut. Sauf, qu'on n'aide pas l'ensemble d'une économie nationale en créant des chômeurs. Mais le gestionnaire "sans coeur" s'en fou; il veut son bonus de fin d'année en coupant dans la masse salariale.
Par hasard, on lit aujourd'hui, 3 juin 2015, en page B 1 du quotidien Le Devoir la nouvelle suivante: " Élimination de la dette: Le Québec fait fausse route" (Éric Desrosiers). Et s'ajoute cette phrase, je cite: « L'austérité est une politique nuisible pour la plupart des pays, peut-on conclure à la lumière d'une étude du FMI.»
Il est vrai que notre PM Philippe Couillard n'a pas suivi de cours en économie publique durant ses cours intensifs en neuro-chirurgie mais il connaît le bistouri. Devant un auditoire de hauts fonctionnaires du Québec, il leur a fortement recommandé son livre de chevet écrit par deux économistes de la revue néolibérale anglaise The Economist intitulé: The Fourth Revolution. Les politiciens Thatcher et Reagan ne sont pas allés assez loin dans la déréglementation des politiques économiques nationales et internationales.
Compte tenu de la création d'Hydro-Québec le 14 avril 1944, Hydro-Québec d'aujourd'hui a plus de 70 ans d'existence. Voici ce qu'on peut lire d'Hydro-Québec sur un site internet international: « Depuis sa fondation, Hydro-Québec joue un rôle déterminant dans le développement économique du Québec, par la taille et la fréquence de ses investissements, par le développement d'une expertise reconnue, notamment dans le domaine du génie-conseil, de la gérance de grands projets d'infrastructures et de transport de l'électricité, ainsi que par sa capacité à produire une grande quantité d'électricité à bas prix.»
Ce texte très élogieux est extrait du site international "wikipedia", source: http://fr.wikipedia.org/wiki/Hydro-Qu%C3%A9bec . Qu'avons-nous besoin des lieux communs de l'idéologue Youri Chassin pour améliorer le sort des employés actuels d'Hydro-Québec qui est en harmonie avec le sort du bien commun de tous les Québécois ?
Des quatre "avantages" énumérés ci-haut, je retiens en priorité le d) « finalement mieux mettre Hydro-Québec au service des Québécois.» Cet objectif garde toujours sa pertinence et il y a place pour amélioration dans la motivation de tous(tes) les employés(ES) actuels d'Hydro-Québec pour encore mieux servir toute la population du Québec ainsi que leurs clients à l'exportation.
Du côté de l'approche de Youri Chassin et de ses disciples néolibéraux, ils ne souhaitent qu'une chose: enrayer le plus possible une société d'État qui fonctionne bien depuis plus de 70 ans au profit de tous. Devant tout projet de privatisation d'Hydro-Québec, il est important de rappeler que plus de 40% des 7-8 milliards $ dépensés chaque année par Hydro-Québec sont versés à des entreprises privées qui agissent à titre de mandataires. Ainsi, nous affirmons qu'Hydro-Québec est déjà privatisé à la hauteur de 40%. Qui dit mieux ?
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3 commentaires
Archives de Vigile Répondre
5 juin 2015Institut Économique de Montréal
présidente du conseil d'administration
HÉLÈNE DESMARAIS
pas besoin d'en dire plus je crois
http://www.iedm.org/fr/1242-conseil-dadministration
François A. Lachapelle Répondre
5 juin 2015Même si Chassin conclut à l’inutilité de l’expérience ontarienne pour le cas d’Hydro-Québec, il ne conclut pas pour autant à l'inutilité d'une privatisation "partielle" d'Hydro-Québec. Revenir sur le ballon politique de privatisation d'Hydro One par le PM de l'Ontario, Kathleen WYNNE est un prétexte pour mousser l'idée de privatisation "partielle" d'Hydro-Québec.
Rappelons qu'on parle d'une "privatisation partielle", non jusqu'à 60% comme l'idée ontarienne, mais jusqu'à 10%. Au-delà de ce 10%, un impôt fédéral vient s'ajouter lequel impôt est inexistant à 10% et moins de privatisation de l'actionnariat.
L'argumentaire de Chassin en faveur de la privatisation comprend quatre "avantages" qui peuvent tous être réalisés chez Hydro-Québec sans privatisation.
Avec la nomination d'Éric Martel à titre de nouveau p.-d.g. d'Hydro-Québec, rappelons que ce gestionnaire au début de la cinquantaine, présente un CV exclusivement vécu dans le PRIVÉ: Rolls-Royce, Kraft, Procter & Gamble, Pratt & Whitney et Bombardier.
C'est un gestionnaire "bon à tout faire" incluant les jobs "sans coeur" où les dimensions sociale et humaine sont sacrifiées aux profits de la satisfaction des actionnaires. On voit ici tout le fossé qui existe entre le PUBLIC et le PRIVÉ.
Ce gestionnaire "bon à tout faire" n'a pas pris le temps de défaire ses valises qu'il parle en date du 3 juin 2015, je cite: « Le changement de culture vers une plus grande transparence, ...» ( Le Devoir, 4 juin 2015, p.B 1) Connaît-il vraiment la culture existante chez Hydro-Québec avant d'annoncer publiquement qu'il fera un changement de culture ?
La dernière question est posée naïvement si ce jeune gestionnaire dans la jeune cinquantaine a signé des engagements envers sont patron politique, le ministre Pierre Arcand, engagements qui ont été rédigés par le Ministre lui-même dans une marche forcée d'Hydro-Québec vers une privatisation imposée par le style avant de consacrer le tout dans une loi.
Dans un tel contexte, il faut savoir ce qui s'en vient dans la haute direction d'Hydro-Québec: ceux qui ne voudront pas appuyer la nouvelle orientation du Min. Arcand par Éric MARTEL interposé, quitteront Hydro-Québec. Ces départs volontaires permettront alors au loup dans la bergerie de nommer de dociles petits louvetaux tout aussi affamés que le "grand loup".
Et hop, la Grand-Mère Arcand aura assouvi son appétit néolibéral. Si les syndicats d'Hydro-Québec se taisent par servilité corporatiste, les Québécois ne verront rien comme lorsque Philippe Couillard maraudait ses intérêts à l'Île Jersey ou dans des conseils d'administration avec peu d'éthique.
Archives de Vigile Répondre
4 juin 2015Merci de remettre à l'ordre, les pensées de Chassin. J'étais enragé de lire son article. Je suis heureux de voir que je ne suis pas seul à Croire à Hydro.
Merci