Le moins qu’on puisse dire, c’est que les immigrants sont au cœur des débats actuels. PKP les tient pour responsables du déclin de la souveraineté, Legault veut rendre leur statut conditionnel à la maîtrise du français, Harper exige qu’ils prêtent serment sans niqab…
Le contexte est on ne peut plus propice pour parler de l’impact de l’immigration et des défis d’intégration. Or, justement, un rapport très étoffé financé par le ministère de l’Immigration du Québec a été rendu public jeudi sur le sujet. Il a été remis au ministère en novembre, qui devrait s’en inspirer pour renouveler sa politique.
Intitulée
, l’étude de 181 pages a été réalisée par les économistes Brahim Boudarbat et Gilles Grenier et est parrainée par le CIRANO. Elle décortique nos politiques d’immigration, les compare avec d’autres pays, mais surtout brosse le portrait des effets économiques de l’immigration et des problèmes d’intégration.Premier constat : l’apport économique des immigrants au Québec n’est pas aussi positif qu’on le croit. Selon les nombreuses études passées en revue, « la performance des immigrants récents, peu importe comment on la mesure, est de beaucoup inférieure aux attentes », constatent les chercheurs.
Certains voient dans l’immigration une façon de contrer les effets du vieillissement de la population sur le bassin de main-d’œuvre, entre autres. Or, même si les effets à long terme peuvent être positifs, « il se peut que l’immigration constitue actuellement un fardeau pour les contribuables, du moins à court terme », disent les auteurs. Selon eux, une augmentation de l’âge de la retraite serait une meilleure façon de contrer le vieillissement.
Le rapport constate que l’intégration des immigrants au Québec se fait plus difficilement que dans le reste du Canada. Entre autres, l’écart de taux de chômage entre les natifs d’ici et les immigrants est « anormalement élevé » au Québec.
Tous les chiffres le démontrent : les Québécois d’adoption peinent à trouver un emploi, qu’ils soient bardés de diplômes ou non. Et c’est pire pour les minorités visibles et les femmes.
Par exemple, au Québec, le taux de chômage des immigrants en 2011 était de 11,2 % contre 6,5 % pour les natifs d’ici. En comparaison, le taux ontarien de chômage des immigrants était de 8,6 % contre 8,1 % pour les non-immigrants. Ailleurs au Canada, l’écart immigrant-natif est aussi faible qu’en Ontario, peu importe la statistique utilisée (taux de chômage, taux d’emploi, taux d’activité).
Cet écart se reflète également dans les salaires. Au Québec, le revenu annuel médian des immigrants était de 25 566 $ en 2011, soit 85 % du revenu médian des natifs d’ici. Ce rapport est de 92 % en Colombie-Britannique, 96 % en Ontario et 96 % dans l’ensemble du Canada.
Pourtant, les immigrants instruits sont plus nombreux au Québec qu’ailleurs. Ici, les immigrants ont un diplôme universitaire dans une proportion de 39,1 %, comparativement à 21,5 % pour les non-immigrants, un écart de 17,6 points. En Ontario, l’écart est de 8,1 points (28,6 % pour les immigrants contre 20,5 % pour les natifs du Canada).
« Les difficultés auxquelles font face les immigrants au Québec peuvent être attribuables à une méfiance des employeurs, qui serait plus grande au Québec qu’ailleurs », écrivent les auteurs.
Au Québec, les principaux foyers d’immigration sont la France, Haïti et le Maghreb. Dans l’ensemble canadien, c’est l’Inde, le Royaume-Uni et la Chine.
« Les gouvernements font des efforts en vue d’une meilleure reconnaissance des diplômes étrangers, mais ceux-ci ont tendance à être efficaces surtout pour les diplômes qui viennent de pays développés », écrivent les auteurs.
Face à ces constats, le rapport recommande de ne pas augmenter les admissions annuelles au Québec, mais de les maintenir aux niveaux actuels de 50 000 par an. « Il faut admettre des immigrants à un rythme qui ne diffère pas trop de celui du reste du Canada pour éviter une baisse trop rapide du poids démographique et économique du Québec, entre autres, en ce qui concerne les transferts fédéraux ».
Enfin, pour améliorer l’intégration au marché du travail, les auteurs suggèrent d’imiter la Nouvelle-Zélande, l’Australie et le gouvernement fédéral et de donner un plus grand rôle aux employeurs.
« Ce changement met l’accent sur les besoins immédiats du marché du travail plutôt que sur les compétences générales des nouveaux arrivants […]. Il semblerait que l’accent mis sur l’éducation et les autres caractéristiques du capital humain n’ait pas produit les effets escomptés. »
En somme, il faut une meilleure sélection des immigrants, mais aussi une plus grande ouverture des Québécois et un effort du gouvernement pour éliminer les freins à l’emploi. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à parcourir ce rapport très intéressant.
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