Des centaines de migrants illégaux entrent par le Québec

De nombreux Haïtiens traversent la frontière chaque jour à Saint-Bernard-de-Lacolle

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Et c'est sans compter tous ceux qui entrent au Canada ailleurs





Confrontés à un afflux toujours grandissant de migrants illégaux, les douaniers canadiens ont dû se résoudre à installer en début de semaine un poste temporaire avec tentes, chaises et toilettes à Saint-Bernard-de-Lacolle.


Les chiffres sont éloquents : de janvier à juin, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a intercepté 3350 personnes au Québec, soit plus des trois quarts des interceptions au pays.


Et de ce nombre, une grande partie provient d’un passage irrégulier notoire sur le rang Roxham, à Saint-Bernard-de-Lacolle.


« Ce matin, on a arrêté une quarantaine de personnes, c’est moins que d’habitude », nous renseigne un agent qui parle de 200 migrants en moyenne par jour.


« Sans précédent »


Selon le Syndicat des douanes et de l’immigration, on a atteint des sommets la fin de semaine du 24 juillet, avec près de 400 personnes qui ont quitté les États-Unis pour entrer illégalement au Canada.


« Nos troupes sont fatiguées et dépassées par la situation », insiste Jean-Pierre Fortin, le président du syndicat. On avait vu une augmentation en début d’année avec l’arrivée de réfugiés syriens, mais depuis deux semaines, c’est sans précédent. »


La GRC a installé lundi deux tentes, une trentaine de chaises et des tables au bout du rang Roxham, et a ajouté hier des éclairages et même deux toilettes mobiles. « C’est pour le confort de nos policiers et des gens qui arrivent », dit Érique Grasse, porte-parole de la GRC.


Avant cela, les policiers étaient confinés jour et nuit à leurs autopatrouilles.


Du côté de la municipalité, on dit faire confiance aux autorités. « Des citoyens se plaignent du passage des véhicules des policiers, mais on préfère qu’ils interceptent les gens à la frontière plutôt que dans les champs », dit Daniel Striletsky, directeur général de Saint-Bernard-de-Lacolle.











Deux toilettes mobiles ont été installées hier à côté du point de passage des migrants pour leur confort et celui des agents en poste.<br>




Photo Matthieu Payen


Deux toilettes mobiles ont été installées hier à côté du point de passage des migrants pour leur confort et celui des agents en poste.





 


Haïtiens


Le Journal est resté quatre heures sur place hier et a vu passer une vingtaine de nouveaux arrivants. Parmi eux, 10 Haïtiens, dont deux bébés et une fillette de 6 ans (voir autre texte).


« Les Haïtiens, c’est tout nouveau », constate Adam Ponette qui réside à quelques dizaines de mètres du lieu de passage illégal.


Pour cet observateur privilégié, il n’existe qu’une solution : venir en aide aux pays des migrants. « Au lieu de chialer, il faut agir, aller là-bas, faire de l’humanitaire et tenter d’améliorer leur sort pour qu’ils y restent », croit celui qui ira en septembre rénover une école au Guatemala.


Ils ont peur de Trump


Épuisés après de longues heures de transport, les migrants que nous avons rencontrés hier se disaient néanmoins heureux d’arriver au Canada.


Carole Rene fait partie de la vague d’Haïtiens qui fuient les États-Unis par crainte du discours de fermeté du président Donald Trump à l’égard des immigrants.


« Je suis heureuse, je n’ai plus peur », dit la femme de 34 ans qui vient de passer irrégulièrement la frontière sur le rang Roxham, à Saint-Bernard-de-Lacolle.


Cette infirmière de Port-au-Prince souhaitait une vie meilleure en débarquant, début juillet, en Pennsylvanie, avec sa fille de 6 ans, Yvica. Mais elle a vite compris qu’elle ne pouvait y exercer son métier et ses amis l’ont informée qu’elle risquait l’expulsion.


Elle a alors rempli son unique valise et pris un taxi vers le Canada.


Malgré les mises en garde des douaniers, elle n’hésite pas à passer la frontière.


Sur un ton ferme, mais poli, les agents lui disent ses droits, puis fouillent ses affaires et vérifient son identité. « Les policiers sont gentils ici », nous dit-elle après coup.


Fin des visas


Jean-Heoude Feon, intercepté au même endroit, est du même avis.


Cet agronome de 35 ans espère pouvoir s’installer au Canada. « Aux États-Unis, il n’y a que l’argent qui compte. Ici, je crois qu’on donne plus d’importance aux gens », dit-il.


M. Feon a travaillé plusieurs années illégalement dans une laverie de Brooklyn, à New York.


Au printemps, il a vu sur Facebook que Trump voulait mettre fin aux visas de protection temporaire accordés aux Haïtiens en 2010 après le tremblement de terre. Il a aussi vu que Justin Trudeau s’opposait à la politique de Trump.


« J’ai compris que le Canada est un pays plus accueillant », dit-il.




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