(Québec) Les Conférences régionales des élus (CRE), mises en place en 2004, sont dans la ligne de mire du gouvernement Marois. Québec compte mettre au pas ces organismes qui dépensent plus de 120 millions par année, sans reddition de comptes rigoureuse.
Un tableau présentant les coûts d'administration des CRE et leurs budgets, obtenu par La Presse, illustre l'absence complète de normes. Dans la région de la Côte-Nord, les coûts liés à l'administration et aux salaires atteignent 3 millions, soit plus de la moitié du budget total de 5,5 millions en 2012. Dans d'autres CRE aussi éloignées, les frais d'administration sont plutôt de l'ordre de 10% des budgets.
Selon Patrick Hamelin, directeur général de la CRE de la Côte-Nord, «dans une région comme la nôtre, l'administration inclut les frais de déplacement. Il y a environ 200 000$ pour assumer les coûts des billets d'avion nécessaires, puisqu'on fait de la concertation». Cette CRE, qui emploie 23 personnes, dépense 1,7 million en salaires et en charges sociales; une autre somme de 1,3 million va à l'«administration générale».
La CRE du Saguenay n'a que 15 employés et celle de la Mauricie, 14. On compte 13 employés dans les Laurentides, mais 31 en Gaspésie. «C'est très variable en fonction des dossiers de la région. Ici, on a quelqu'un d'engagé sur la persévérance scolaire, ailleurs ce n'est peut-être pas le cas», a expliqué Patrick Hamelin.
Mais au ministère des Affaires municipales, on se prépare à une opération de nettoyage en règle. Ces budgets d'«administration générale» couvrent des activités disparates, du coût du loyer jusqu'à l'organisation d'une réunion. On promet que les règles comptables des CRE seront bientôt normalisées pour assurer une reddition de comptes plus transparente.
«Les budgets des CRE viennent du Fonds de développement régional, c'est du niveau supramunicipal et il n'y a pas de normes», a expliqué Caroline Saint-Pierre, porte-parole du Ministère.
À la fin de janvier, La Presse a fait état du tableau hétéroclite des traitements des élus qui siègent à ces organismes - certains le font bénévolement, d'autres obtiennent 250$ par séance.
Écartées des plans
Les CRE seront d'ailleurs laissées sur la voie de garage dans le projet de loi que Québec déposera au printemps sur une nouvelle structure, la Banque de développement économique.
Celle-ci passera, en région, par les Conseils locaux de développement ou par des bureaux régionaux.
Les CRE ne font guère partie des plans du gouvernement péquiste, qui y voit de nombreux sympathisants du Parti libéral du Québec. Par exemple, au Saguenay, l'ancien président de la CRE Georges Simard était candidat libéral aux dernières élections. En Outaouais, Paulette Lalande était proche du député libéral Norman MacMillan.
Cette instance est apparue en 2004, à l'instigation de la ministre des Affaires municipales de l'époque, Nathalie Normandeau. Québec avait préféré la nouvelle structure, formée d'élus municipaux, aux Conseils régionaux de développement, où les membres de la «société civile» étaient majoritaires.
En 2011, le Vérificateur général du Québec a attaché le grelot au manque de cohérence dans l'administration des fonds publics dans ce réseau. D'une CRE à l'autre, l'administration et la planification diffèrent énormément. Du point de vue de l'éthique, beaucoup de travail restait à faire, selon le Vérificateur. Il avait observé que sur 75 dossiers étudiés dans un échantillon, 10 prévoyaient des subventions versées à un organisme où siégeait un administrateur de la CRE. Dans sept de ces dossiers, en regardant les procès-verbaux, on ne trouvait pas de trace concernant l'attitude adoptée par ces administrateurs quand le dossier a été traité au conseil.
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