Les statistiques sont alarmantes, En pleine période de pénurie de main d’oeuvre en enseignement, jusqu’à un aspirant prof sur deux abandonne ses études en cours, une proportion qui est en hausse dans certaines universités.
Selon la doyenne de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, Anabelle Viau-Guay, «une des pistes d’explication, c’est la durée des études qui s’allonge chez nos étudiants notamment en raison de la conciliation travail-études. Parmi la plus récente cohorte d’étudiants en enseignement, 10% sont toujours inscrits à l’université six ans après le début de leur baccalauréat de quatre ans». Le taux de diplomation à l’Université Laval, tous programmes confondus, est de 64% comparativement à 79% il y a trois ans, et un scénario à peu près semblable ressort dans les autres universités du Québec.
Or quoique perçus de facto comme bénéfiques pour la formation des futurs enseignants, certains experts du réseau scolaire préconisent la rémunération des stages en enseignement, un facteur qui contribuerait, selon eux, à freiner le nombre d’abandons parmi les aspirants enseignants qui, pour plusieurs, doivent se dénicher un emploi à temps partiel pour payer l’épicerie.
En bref, l’attractivité et la rétention eu égard aux études menant à la carrière d’enseignant ont un prix. Primo, la durée du baccalauréat en sciences de l’éducation doit être réduite au minimum compte tenu que les cours de didactique n’abordent que les notions théoriques inhérentes à la profession d’enseignant. Et secundo, les stages, qui incarnent la facette pratique des notions didactiques, doivent être rémunérés, les étudiants étant confrontés aux mêmes tâches qu’un enseignant, notamment à la préparation et la prestation de cours en plus de la correction.
Deux poids, deux mesures
D’entrée de jeu, les fonctionnaires des ministères et organismes ont obtenu la même base d’augmentation de salaire que les employés du Front commun syndical, à savoir 17,4% sur cinq ans.
Or à compter du 1er avril, les fonctionnaires ayant accumulé trois années consécutives d’ancienneté dans le même ministère et qui auront fourni un «rendement satisfaisant» toucheront un montant forfaitaire de 300$. Et la prime atteindra 800$ lorsque le fonctionnaire aura travaillé au même endroit pendant cinq ans ou plus le 1er avril de chaque année. «C’est une prime de remerciement que le gouvernement verse tous les 1er avril pour dire aux gens: merci beaucoup d’être restés chez nous. Parce qu’on sait qu’au bout de cinq ans dans un même poste, une personne est beaucoup plus productive qu’après six mois», argue le président de la centrale syndicale, Christian Daigle.
Par ailleurs, l’un des points qui achoppent actuellement dans les négociations avec les infirmiers et infirmières de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) tourne autour de la mobilité des syndiqués. À titre d’exemple, une infirmière pourrait être appelée à se déplacer de l’oncologie à l’urgence ou la neurologie du jour au lendemain sans aucune formation.
En termes clairs, d’un côté, le gouvernement Legault favorise la rétention en versant une prime annuelle de fidélité aux employés qui demeurent à leur poste, et de l’autre, il propose d’insérer la mobilité dans la convention collective...De toute évidence, on fait face à une politique du deux poids, deux mesures.
Henri Marineau, Québec
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2 commentaires
François Champoux Répondre
5 septembre 2024Rebonjour M. Marineau,
Désolé de ne pas partager votre point de vue. Quand on est un étudiant, notre travail c’est d’apprendre; et si par chance, on peut bénéficier d’un stage, il ne doit pas être rémunéré.
La non-rémunération favorise une prise de conscience adéquate de la vraie responsabilité d’un métier : la rémunération lors du décrochage officiel d’un poste comme responsable d’une classe auprès d’enfants est dans l’ordre des choses : la responsabilité donne la mesure de la rémunération; la rémunération donne la mesure de la responsabilité. Sans responsabilité, la rémunération n’est pas justifiée et elle biaise l’intention de rendre à la société notre SOI constructif à celle-ci. Il y a un effort à consentir et à convenir.
S’il faut tout payer, aussi bien ne plus rien faire, car nous ne sommes pas infiniment riches. L’argent ne doit pas être la mesure de tout en tout; il y a une dimension humaniste, une considération à l’humanité qui ne doit pas se perdre. Actuellement nous la perdons. L’actuelle démesure financière en trop d’aspects humains érode notre humanisme : les salaires exagérément élevés de certaines personnes nous interpellent toutes et tous.
Évidemment, notre système de justice sociale n’est pas parfait; mais il faut se garder de succomber à la facilité de tout payer.
En enseignement au primaire, il devient de plus en plus réaliste que les professeurs titulaires de classe soient appuyés et accompagnés d’une deuxième personne dans la classe où souvent plus de 30 cerveaux en ébullition demandent une discipline personnelle à inculquer. Cet apprentissage de la discipline personnelle fait partie de l’éducation à donner à ces enfants de moins de 12 ans. L’«apprenti sage» dirait Gilles Vigneault, mais la sagesse, il faut la chercher notre vie durant, et d’abord l’enseigner aux apprentis.
François Champoux, Trois-Rivières
François Champoux Répondre
4 septembre 2024Au Québec, à n’en point douter, nous avons un grave problème de société : nous ne savons plus aimer. Nous avons cru le savoir, mais un déséquilibre s’est orchestré à notre insu. Et quand on est déséquilibré, il y a risque de chute.
Lentement, cette chute se profile à l’horizon; il va falloir revenir aux valeurs humaines de base : aimer, s’aimer.
L’amour est don; l’amour est «prendre soins», m’a dit une amie; l’amour est bienveillance, ajouterais-je. Sois d’abord, évidemment, avec justesse. Mais il y a celles et ceux qui abusent avec leur rétribution personnelle démesurée; ça cré déséquilibre, jalousie et, l’injustice croît. D’où le goulot d’étranglement, l’étouffement. Le chacun pour soi, au lieu du «aime ton prochain comme toi-même».
Le syndicalisme comme le coopératisme qui réclamaient chacun la solidarité et l’égalité semblent s’être joué un vilain tour : un abus de pouvoir de l’intérieur. On a oublié que l’amour doit être mutuel, dans les deux sens. On a oublié qu’on n’impose pas la solidarité, on n’impose pas la coopération; ils doivent être proposés jamais imposés.
Grâce à l’immigration, ces dimensions de l’amour prennent vie auprès des personnes qui ne sont pas nées au Québec : les Québécois de souche n’ont plus la fibre d’antan! Mais les pauvres qui acceptent des conditions «ordinaires» de travail ne sont pas bien vus par les Québécois maintenant plus nantis, trop nantis.
On décroche des valeurs humanistes et l’on cesse de s’aimer. Il faudra réapprendre nos leçons d’amour.
François Champoux, Trois-Rivières