Pierre Sévigny a entretenu une liaison avec Gerda Munsinger de 1959 à 1961, alors qu'il était ministre associé de la Défense nationale dans le gouvernement conservateur de John Diefenbaker. Originaire de l'Allemagne de l'Est, Mme Munsinger était décrite comme une prostituée, voleuse et espionne à ses heures... (Archives PC)
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Cherchez la femme fatale. Dans l'histoire politique canadienne, vous n'en trouverez que deux: Gerda Munsinger et Julie Couillard.
D'autres ministres que Maxime Bernier ont payé le prix pour leurs liaisons dangereuses. En 1907, un ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick, Henry Emmerson, a démissionné comme ministre des Chemins de fer du gouvernement Laurier pour avoir été surpris dans un hôtel de Montréal avec une prostituée. Ainsi le voulaient les moeurs de l'époque.
En 1978, Francis Fox a dû quitter le Conseil des ministres du gouvernement Trudeau après avoir signé le nom du mari d'une amie enceinte pour lui permettre de se faire avorter. La raison de son départ: étant solliciteur général, il ne pouvait pas se permettre d'agir comme partie prenante dans une fraude. Mais qu'à cela ne tienne, deux ans plus tard, il revenait au gouvernement comme ministre des Communications. Depuis trois ans, il siège au Sénat.
Gerda Munsinger
Au Canada, il n'y a que Gerda Munsinger et Julie Couillard qui peuvent rivaliser avec Mata Hari, en France, ou Christine Keeler, la prostituée britannique qui a mis fin, en 1963, à la carrière de John Profumo.
Ce dernier, secrétaire d'État à la Guerre, avait dû démissionner parce qu'il entretenait une relation avec Mme Keeler en même temps qu'elle couchait avec l'attaché naval russe à l'ambassade de l'Union soviétique.
De son côté, Gerda Munsinger a atteint la notoriété, en 1966. On apprit alors que Pierre Sévigny, entre 1959 et 1961, alors ministre associé de la Défense nationale dans le gouvernement conservateur de John Diefenbaker, avait entretenu une liaison avec cette femme venue de l'Allemagne de l'Est.
Après des semaines de tourmente aux Communes, le premier ministre Pearson avait nommé un juge de la Cour suprême du Canada, Wishart Spence, pour présider une commission d'enquête. Le juge, dans son rapport, décrivit Munsinger comme une prostituée, une voleuse et une espionne à ses heures. Il considéra que Pierre Sévigny avait mis à risque la sécurité nationale et blâma Diefenbaker qui, mis au parfum en 1961 par la Gendarmerie royale, n'avait pourtant pas congédié le ministre téméraire.
On y voit d'évidents parallèles avec Julie Couillard dans sa relation avec Maxime Bernier. Les deux cas mettent en vedette une très belle femme au passé trouble. À chaque nouvelle révélation, à chaque rappel, on avait publié une photo de la belle séductrice, ravissant ainsi le public.
Comme dans le cas de Gerda Munsinger, l'histoire de Julie Couillard se déroule quotidiennement aux Communes, depuis plusieurs semaines, dans un contexte de partisanerie et de démagogie délirantes, alors que le gouvernement est minoritaire.
Mais les différences sont, aussi, marquantes. L'affaire Munsinger s'est déroulée au milieu de la guerre froide, quand tous craignaient l'imminence d'un conflit nucléaire. Pearson venait alors d'accepter, à la demande des Américains, que les missiles Bomarc basés en sol canadien soient armés de têtes nucléaires. De son côté, Munsinger avait déjà trempé dans des affaires d'espionnage et Pierre Sévigny avait accès à tous les secrets militaires.
À l'opposé, dans le climat actuel, l'ex-ministre des Affaires étrangères Maxime Bernier possède peu de secrets dignes des dieux. Si quelques secrets étaient révélés, cela pourrait causer de l'embarras au Canada, mais sans aucunement mettre le pays en danger. Et Julie Couillard, même si elle a fréquenté des bandits, ne donne vraiment pas l'impression de constituer une menace à la sécurité nationale.
Cela va de soi, Maxime Bernier a manqué de jugement en fréquentant Julie Couillard. Sa pire erreur a été de la présenter au président George Bush. Voilà qui met vraiment le Canada dans l'embarras. Mais Maxime Bernier, comme Francis Fox, pourra sans doute retourner un jour au Conseil des ministres, dans un poste moins névralgique et plus adapté à ses compétences indéniables.
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William Johnson
Journaliste, M. Johnson est l'auteur du livre «Stephen Harper and the Future of Canada» (McClelland & Stewart).
D'une Mata Hari à l'autre
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"L'affaire Maxime Bernier"
William Johnson53 articles
William Johnson, a Quebec journalist, is a former president of Alliance Quebec
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