Québec — En permettant au gouvernement fédéral de contester la validité de la loi 99, le premier ministre Stephen Harper a répondu favorablement à l’exhortation du Comité spécial pour l’unité canadienne (CSUC) et d’un de ses députés de l’Ouest, Peter Goldring.
En décembre dernier, au nom du CSUC, un organisme porté à bout de bras par l’ancien chef du Parti égalité, Keith Henderson, le député d’Edmonton Est, Peter Goldring, a signé une lettre avec ce dernier et trois autres membres de ce comité pour convaincre Stephen Harper de la nécessité d’invalider la loi 99, adoptée en 2000 par le gouvernement de Lucien Bouchard pour répliquer à la Loi fédérale sur la clarté. La Cour supérieure doit entendre la cause de Keith Henderson qui conteste la constitutionnalité de la loi 99. Cette loi affirme que le peuple du Québec est le seul maître de son destin et qu’un référendum se gagne avec 50 % des votes plus un.
« Cette illusion peut et doit être démystifiée. Il est dans votre pouvoir, Monsieur le Premier Ministre, de dissiper les confusions qui, depuis plus d’un demi-siècle, ont faussé au Québec la compréhension de la sécession », peut-on lire en anglais dans cette lettre dont Le Devoir a obtenu copie.
Au moment d’envoyer cette lettre au premier ministre, Peter Goldring, qui devait se défendre d’une accusation d’avoir refusé de se soumettre à un éthylotest, siégeait comme député indépendant après avoir été exclu du caucus conservateur. Acquitté depuis, il fut réintégré par Stephen Harper en juin dernier.
La loi 99 « menace l’unité nationale et la paix, l’ordre et le bon gouvernement », estiment les auteurs de la lettre. Cette illusion qu’on peut quitter le Canada avec un vote de 50 % plus un « vivifie le séparatisme, le rendant plus motivé et plus menaçant. Elle nourrit l’espoir et la passion des séparatistes en les convainquant que l’indépendance est à la portée de la main », sans qu’il y ait de conséquences, comme la partition du territoire québécois. Ils demandent au premier ministre de s’adresser à la Cour suprême pour obtenir un renvoi sur la constitutionnalité de la loi 99 ou encore que le Procureur général du Canada se joigne à la contestation judiciaire intentée en Cour supérieure par Keith Henderson contre la loi 99. C’est la voie, moins expéditive, qu’a choisie Stephen Harper.
En 1994, le Comité spécial pour l’unité canadienne avait demandé à Jean Chrétien qu’il fasse appel à la Cour suprême pour juger de la constitutionnalité de l’Avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec présenté par Jacques Parizeau en vue de la tenue du référendum de 1995. Le premier ministre libéral avait refusé. « Nous espérons que votre gouvernement ne fera pas la même erreur », écrivent Peter Goldring et consorts.
Marois «estomaquée»
La première ministre Pauline Marois s’est dite « estomaquée » par la décision d’Ottawa de se joindre à la contestation de la loi 99. « Le peuple québécois a le droit à l’autodétermination et seul lui a le pouvoir de choisir son destin », a-t-elle déclaré dans un point de presse à Montréal, tout en rappelant que le gouvernement Harper avait reconnu que les Québécois formaient une nation. « À l’évidence, les masques sont tombés et on reconnaît là, malheureusement, le fédéralisme qui est pratiqué depuis des années. »
Dans deux entrevues radiophoniques qu’il a accordées lundi matin, le ministre conservateur Denis Lebel avait affirmé qu’il était d’accord avec la règle du 50 % plus un, une affirmation qu’il a refusé de répéter plus tard. « Je suis un ministre du gouvernement fédéral. Le dossier est devant la cour, qui va juger. Moi, là-dedans, je ne peux pas me dissocier de mon rôle de ministre », a dit Denis Lebel en marge d’une allocution au Conseil des relations internationales de Montréal.
Pour le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et à la Gouvernance souverainiste, Alexandre Cloutier, le ministre conservateur induit la population en erreur. « Il ne peut pas prétendre devant un auditoire important au Québec qu’il est d’accord avec le 50 % plus un alors que son gouvernement est en train de dire exactement l’inverse devant les tribunaux », a-t-il déclaré au Devoir.
De son côté, le ministre conservateur Maxime Bernier n’a pas voulu donner son avis sur la question. « Je garde mon opinion pour moi », a-t-il dit à Ottawa. « Le gouvernement canadien est là pour défendre l’interprétation de la Constitution canadienne et cette interprétation se passe devant les tribunaux, c’est le forum approprié, et elle ne se passe pas dans le forum populaire, politique. »
Avec Hélène Buzzetti, Marie Vastel et La Presse canadienne
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