L’avocat Aziz Hussain s’est fait connaître du public il y a quelques mois en comparant la loi 21 aux lois nazies de Nuremberg lors du procès de celle-ci. Pour son excellent travail, il a été récompensé par Justin Trudeau, qui vient de le nommer juge à la Cour supérieure du Québec.
Cette nomination est moins surprenante qu’il n’y paraît. Hussain a aussi comparé la loi 21 à la ségrégation raciale américaine. En 2013, alors qu’il était chef libéral, Trudeau avait fait la même chose avec la Charte des valeurs du gouvernement Marois. Rappelons que cette période dramatique de l’histoire américaine a mené notamment à 4075 lynchages entre 1877 et 1950. Il y a visiblement une communauté d’esprit entre le juge et le premier ministre.
Ce dernier fait par ailleurs du court packing en nommant une pléiade de juges opposés à la laïcité. C’est le cas, par exemple, de Mahmud Jamal, choisi pour siéger à la Cour suprême l’été dernier. Il faisait partie de l’Association canadienne des libertés civiles, qui est actuellement en cour contre la loi 21.
La même chose vaut pour Nicholas Kasirer. Nommé au plus haut tribunal en 2019, celui-ci est membre de la Lord Reading, un lobby anti-loi 21 qui est aussi impliqué dans les démarches judiciaires contre celle-ci. Ajoutons à cela Sylvain Lussier, propulsé par Trudeau à la Cour supérieure du Québec en 2018, un autre militant de la Lord Reading, une organisation à laquelle sont liés de nombreux magistrats.
La présence de ces juges partisans, chargés de nous imposer le bilinguisme et le multiculturalisme canadien, est l’une des raisons pour lesquelles la clause de dérogation est si souvent invoquée par le Québec. Celle-ci empêche en partie ces petits soldats d’Ottawa d’invalider nos lois en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés, qui, on ne le rappellera jamais assez, nous a été imposée en 1982.
Le paradoxe, ici, est que c’est précisément parce que nous utilisons la clause dérogatoire qu’Hussain a fait un parallèle avec le nazisme et la ségrégation raciale américaine. Pour lui, la disposition de dérogation est incompatible avec la démocratie et l’état de droit. C’est exactement ce que dit la Coalition Inclusion Québec, l’organisation dont il fait partie et qu’il représente en cour.
Comme beaucoup de juristes et bien-pensants, M. Hussain communie à l’autel de la Charte. À ses yeux, les demandes de certaines minorités relèvent nécessairement de droits fondamentaux, immanents et inaliénables. On ne saurait les refuser. Quand la nation québécoise refuse cette approche par la voie démocratique, en se dotant d’une loi sur la laïcité, le régime la lui impose en recourant de façon autoritaire à ses juges non élus. Ceux-ci jouent en l’occurrence un rôle politique et antidémocratique. Si Hussain cherche à blâmer des gens qui violent la démocratie, il n’a qu’à se regarder dans le miroir pour savoir qui pointer du doigt.
En réalité, nous sommes ici devant une opération de réingénierie sociale. L’idée est de rendre le Québec, mais aussi le reste du pays, toujours plus politiquement correct. C’est ce qu’a si bien décrit l’historien américain Christopher Lasch dans La révolte des élites et la trahison de la démocratie.
Parce qu'ils ont osé défier les injonctions des élites multiculturalistes canadiennes, Hussain prête à une majorité de Québécois (qui appuient la laïcité) les pires mobiles. Il incarne totalement la réaction des bien-pensants telle que décrite par Christopher Lasch. Quand ces gens sont contredits, «ils affichent la haine venimeuse qui se dissimule sous le visage souriant de leur bienveillance... L’opposition les amène à oublier la vertu libérale qu’ils affirment préconiser. Ils deviennent irascibles, outrecuidants et intolérants». Complétons cette phrase en disant que ces bien-pensants, quand ils vivent au Canada, versent dans le Québec bashing et deviennent juges au service du régime.