Décidément, les immigrants vont encore servir de punching bag dans l’élection en vue. Ainsi en ont décidé le premier ministre Couillard et certains de ses ministres.
Quand Heurtel crie au loup
Après le « populisme d’extrême droite » et le « nationalisme ethnique » voici que la CAQ est accusée de faire « des propositions déplorables » et sommée de rendre public son « test des valeurs » à six mois de l’échéance électorale.
David Heurtel, ministre du MIDI, parle même de « division » et de « chicane ». Il voit dans le test des valeurs, dont on n’a pas encore vu la couleur, un « test d’expulsion », question de faire peur au monde !
Pourtant, la première fois qu’un gouvernement s’est préoccupé de l’impact de l’immigration sur l’harmonie sociale dans une société qui accueille la diversité du monde, c’était en 1989, sous un gouvernement libéral, celui de Robert Bourassa.
La ministre des Communautés culturelles et de l’Immigration d’alors, Monique Gagnon-Tremblay, avait rendu public, en 1990, un énoncé de politique en matière d’immigration et d’intégration qui avait fait consensus et qui demeure, à ce jour, la pierre angulaire de notre politique publique en cette matière.
D’entrée de jeu, le premier ministre Robert Bourassa y associait l’immigration à « la pérennité du fait français » du Québec, à son « redressement démographique » et à sa prospérité économique.
L’immigration : un privilège, pas un droit
Consciente du potentiel de conflits de valeurs qui peuvent surgir dans une société pluraliste comme la nôtre, Monique Gagnon-Tremblay avait accompagné son énoncé politique d’un « contrat moral ».
On y expliquait aux candidats à l’immigration les valeurs communes de la société québécoise et on les invitait à les respecter et à les partager : le français comme langue commune de la vie publique et comme levier d’intégration, l’égalité entre les hommes et les femmes, l’égalité des chances, la participation citoyenne et l’ouverture sur le monde.
Une conception de l’intégration qui partait du principe que l’immigration est un privilège et non un droit. Dès lors, il était légitime pour une société qui veut relever le défi d’accueillir des immigrants venant des quatre coins du monde de leur signifier ses attentes.
Dans une lettre au Devoir, du 18 mars 2005, Monique Gagnon-Tremblay, avait rappelé l’importance « que tous les candidats à l’immigration au Québec soient bien informés » et y affirmait que, dans une société démocratique, « Chacun est libre d’y pratiquer sa religion (mais) si une loi religieuse entre en conflit avec une loi de l’État, c’est la loi de l’État qui doit primer. L’immigration est un privilège. Pas un droit. »
Une telle démarche visait à permettre aux candidats à l’immigration de « décider librement de s’établir ou non chez nous » et de « se conformer à notre droit et d’y vivre selon nos valeurs. Reste alors au Québec à faciliter leur intégration. »
Cette préoccupation, Monique Gagnon Tremblay la portera jusqu’au cœur de l’Afrique francophone, principal bassin de l’immigration au Québec, lors de son passage au Maroc pour l’organisation du XIIe Sommet de la Francophonie. « Il faut aussi considérer qu’immigrer au Québec implique une sorte de contrat moral. Il faut accepter que certaines valeurs ou lois soient non négociables. Par exemple, l’égalité des femmes ou l’illégalité de la polygamie sont non négociables » (L’Économiste.com, 9 juin 2008).
Depuis quand est-il tabou d’informer les nouveaux arrivants de leurs droits et de leurs devoirs en leur transmettant les valeurs de la société québécoise ?