Comme le collègue chroniqueur Philippe Léger, qui abordait le sujet hier, je suis impressionné par le mouvement des professeurs de cégep favorables à l’application de la loi 101 au collégial.
Ils sont depuis jeudi 14 syndicats de professeurs à avoir adopté formellement une résolution sur la question. Le dernier en date étant celui d’Ahuntsic.
Des instigateurs de ce mouvement ont bon espoir d’atteindre très bientôt le chiffre de 20 résolutions, et sans doute plus. Il y a 48 cégeps au Québec, y compris les anglophones.
Au cégep Édouard-Montpetit, sur la Rive-Sud, les profs devraient voter le 30 mars. Une résolution favorable à l’extension de la loi 101 dans cet important établissement aurait sans doute des échos dans l’élection partielle de Marie-Victorin.
Grands syndicats
Du reste, je suis moins impressionné par les grands syndicats qui semblent sourds aux appels de leurs membres.
Ces enseignants, sur le « terrain », qui votent des résolutions, sont à même de voir que dans notre ère Netflix-Gafam-Spotify, l’anglais s’apprend comme par osmose : « Nos jeunes n’ont jamais été aussi bilingues ! », soulignaient deux professeurs de philosophie, Frédéric Belzile et Georges-Rémy Fortin, à mon émission à Qub, jeudi.
Autrement dit : le français a besoin de coups de pouce adaptés à notre époque.
Comme d’autres profs, Belzile et Fortin déplorent l’attitude de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), qui se sont déclarés contre l’application de la loi 101 au Cégep sans jamais avoir consulté leurs assemblées générales.
Les dirigeants syndicaux soutiennent qu’elles ont le devoir de représenter tous leurs membres, y compris ceux des établissements anglophones.
Un prof de Rimouski, Alain Dion, se demandait récemment, dans une publication, « ce que répondent ces organisations syndicales aux enseignantes et enseignants des cégeps francophones qui sont mis en disponibilité parce que l’effectif étudiant se dirige maintenant vers les cégeps anglophones ».
Tradition
Cette attitude de la CSN et de la CSQ contrevient à une tradition syndicale québécoise, me semble-t-il.
Les Michel Chartrand, Fernand Daoust, Claudette Carbonneau et autres se sont démarqués comme des défenseurs du français, comme promoteurs de la francisation.
Pour assurer l’avenir du fait français, faudrait-il diviser ces syndicats comme on le fit avec les commissions scolaires : sur des bases linguistiques ?
Larose
J’ai téléphoné à Gérald Larose, hier, qui non seulement a été président de la CSN de 1983 à 1999, mais a, en 2000-2001, présidé les États généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec.
Son rapport ne prônait évidemment pas l’extension de la loi 101 au collégial. Le gouvernement péquiste n’en voulait pas. Et Larose affirme qu’à l’époque, les chiffres ne l’auraient pas justifié. (Ce que des chercheurs contestent.)
Mais surprise : Gérald Larose se dit aujourd’hui favorable à cette mesure. Sa conversion, a-t-il confié, daterait de « 4 ou 5 ans ».
À l’entendre, les syndicats devraient écouter leurs membres, sinon ils n’auront pas le choix : « Je ne serais pas surpris qu’assez rapidement les grandes organisations se saisissent aussi de cet enjeu-là. »