Mon vieil ami Richard, je vous entends.
Je ne suis pas vraiment surpris par vos propos car, dans le présent contexte et à des degrés divers, nous oscillons tous intérieurement entre notre soif de fondamental et les exigences du compromis réaliste. Mais votre shift de paradigme m’apparait genre inopiné.
La Realpolitik, selon la définition qui structure votre texte, demeure un exercice périlleux d’arbitrage entre ce que l’on considère « l’utopie » et ce que l’on perçoit comme étant les forces de la réalité.
On peut en invoquer le principe avec aplomb pour asseoir rationnellement une orientation ou décision, mais, en définitive, rien n’est jamais incontestable dans une analyse. C’est d’ailleurs l’Histoire qui, en définitive, décerne aux compromis le prix de la clairvoyance ou de la myopie sinon pire, le prix citron de la compromission.
Je vous connais depuis assez longtemps pour exclure absolument toute possibilité de compromission et je sais que vous n’êtes pas myope politiquement. Mais j’ai le sentiment que votre exercice est périlleux.
Périlleux par l’effet combiné du moment choisi, de l’urgence alléguée et, surtout, des conséquences stratégiques possibles de votre orientation sur le mouvement citoyen indépendantiste en plein ascension.
Affirmer à l’instant présent que le PQ est "le seul choix possible" m’apparaît aussi audacieux que de miser au Poker les économies familiales avant d’avoir toutes les cartes en main. Mais peut-être les avez-vous.
Si le PQ est élu et que "la faim de l’indépendance vient en mangeant", vous serez qualifié de grand visionnaire. Mais s’il s’avérait que le PQ se fasse laver comme le BQ, non seulement vous pourriez y perdre votre chemise, mais - surtout - c’en sera fait pour un bon bout du mouvement citoyen indépendantiste dont vous êtes l’une des icônes.
[En passant, puisque vous êtes président du R.I.N., pourquoi ne pas en avoir fait conjointement l’annonce avec le réseau Cap sur l’indépendance ?]
Urgence ! Urgence ! Que d’urgences successives depuis les années où l’Union Nationale clamait l’urgence de défaire le gouvernement Taschereau, corrompu par les puissances d’argent et soumis à la prédominance des trusts.
Pourtant, plus on avance, d’une élection à une autre, plus la corruption s’incruste en profondeur. Tout comme le pillage des ressources et les mouvements migratoires d’ailleurs. Nous ne sommes pas les seuls : le phénomène est mondial et il s’accélère avec la décomposition terminale du système financier.
Alors, la question demeure ouverte : un gouvernement provincial péquiste sera-t-il plus outillé que ceux des pays souverains pour faire face à ces enjeux majeurs ?
En sous-question, (en paraphrasant à nouveau Pierre Cloutier), si un gouvernement du parti Québécois n’est pas plus outillé que les pays souverains pour faire face aux enjeux majeurs et qu’il veut vraiment un pays, ne devrait-il pas plutôt avoir le courage minimal de ses convictions indépendantistes et les mettre sur la table, à la 1ère occasion raisonnable, c’est-à-dire, lors de la prochaine élection ?
En opposition aux vues courantes de la gouverne traditionnelle (quelle qu’en soit la saveur) sont apparues récemment chez les jeunes des idéologies de remplacement fondées sur l’agir citoyen. Des idéologies structurantes et enthousiasmantes que partage un segment non négligeable de la jeunesse indépendantiste.
Pour ceux-ci, la réingénierie politique et fonctionnelle du Parti Québécois apparait invraisemblable après tant d’années de lente déliquescence. Alors, disent-ils, ‘ça prendra le temps que ça prendra’. Mais pas question de se remettre au travail partisan traditionnel avec ou au bénéfice d’un vieux parti dont vous disiez vous-même, il n’y a pas si longtemps, qu’il était en train de s’Union-nationaliser.
"Faire avec le PQ", sera toute une douche froide.
Vient un moment, dites-vous, où il faut savoir ce qu’on veut. Vient aussi un moment où l’on sait clairement ce que l’on ne veut plus.
Comme indépendantiste, mon seuil d’aveuglement volontaire et de reniement n’est déjà pas loin d’être atteint. Pour paraphraser Pierre Cloutier, Il y a des niveaux où je ne pourrai plus m’abaisser.
En espérant que le choix ne se résume pas aux seules options Cap sur l’Indépendance utopique ou cap sur la gouvernance réaliste,
En toute amitié et dans le style Stanislas,
Jean-Pierre Bélisle
Réplique à "Devant la gravité de la situation, le PQ demeure le seul choix réaliste " de Richard le Hir
Ça prendra le temps que ça prendra!
la réingénierie politique et fonctionnelle du Parti Québécois apparait invraisemblable après tant d’années de lente déliquescence
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4 commentaires
Jean-Claude Pomerleau Répondre
15 juillet 2011Sans attendre la souveraineté. L'État du Québec actuel a les pouvoirs pour mettre fin au déclin démographique et au pillage systématique de l'État.
Dans la vrai vie un seul parti peut y mettre fin:Le Parti Québécois. A condition d'avoir la volonté politique de le faire, ce qui n'est pas évident actuellement.Dans un premier temps c'est là son défi;Mettre fin au déclin démographique; et au saccage de notre État.
Les personnes qui peuvent former l'équipe pour agir avec détermination existent:
Pierre Curzi sonne l'alarme sur l'immigration:
http://www.vigile.net/Curzi-juge-la-cible-trop-elevee
Et sur la volonté politique de reprendre en mains la propriété collective de nos richesses,il y en a au moins un qui a la détermination pour agir. Mme Marois le connait, elle n'a qu'a lui ouvrir la porte et ne pas l'entraver. Et la confrontation avec les réseaux affairistes qui squattent notre État sera assumer de la même manière que René Lévesque l'a fait avec les ''Trusts'' a l'époque de la nationalisation de l'Électricité: Une collision frontale.
Faut prendre acte que la souveraineté suppose un rapport de force entre l'État du Québec et l'État canadien. Et que donc nos chances d'établir un rapport de force favorable sans lequel il n'y a pas de changement de statut, reposent sur les potentialités de notre État. En fait il faut comprendre que l'enjeu, c'est l'État.
Il faut donc le reprendre en main de toute urgence pour arrêter son saccage. Nous ne sommes pas ici dans la corruption habituelle. Sur le dossier Hydro Qc et celui de nos ressources, dont les enjeux portent sur des centaines de milliards, Charest a traverser la ligne rouge de la corruption a la trahison de l'intérêt nationale.Et Legault est au service des mêmex réseaux; tant qu'a Qs il est leur allié objectif.
Donc il ne reste que Le PQ comme choix politique pour reprendre en main notre État; et encore j'attends les signes que la volonté politique sera au rendez vous. Réponse, fin Août.
JCPomerleau
Archives de Vigile Répondre
15 juillet 2011Il y a le temps de l'histoire....et le temps des élections....ce ne sont pas les mêmes, loin s'en faut. A ceux qui veulent continuer à voter pour le PQ ou pour un nouveau mouvement + indépendantiste ou qui imaginent une stratégie différente hors-référendum (constituante, etc.) je répondrais que de toute facon l'indépendance du Québec en tant qu'entité distincte du Canada est inévitable mais pour des raisons qui n'ont rien à voir a ce qui a été évoqué jusqu'a présent.
Le Canada et les Etats-Unis sont des espaces géographiques immenses dont l'intégrité territoriale, l'organisation politique et économique, les communications terrestres ou autres n'ont été possible que par l'utilisation d'une énergie abondante sans limite, tout au moins le pensait on, le pétrole (on pourrait ici ajouter d'autres matières premières égalemment).
Cette période, au temps de l'histoire touche à sa fin et dans un délai court (- 30 années) on va assiter à la dislocation progressive et inéluctable de ces vastes entités politico-géographiques. Les premières questions à se poser c'est à quelle vitesse et dans quelle conditions ? Quelle seront les blocs qui vont être capable de continuer à fonctionner (espace géographique plus restreint, impact écologique supportable, mode de production et de fonctionnement local opposé à des visions continentales, etc.).
Les travaux sur les civilisations ou entités géographiques plus anciennes ("Collapse" - Jared Diamond) montrent que l'écroulement de ces sytèmes peuvent être très rapides. La crise financière actuelle est un accélérateur de cette histoire, un accident de parcours, nous sommes en train de passer d'une société de l'abondance à une société frugale, même si cela n'est pas encore trop apparent.
Nous assistons déjà à ce mouvement, de dislocation, dans le sud des Etats-Unis avec l'immigration hispanique qui ne fait que reconquérir des territoires (Arizona, Nouveau-Mexique) qui leur appartenait déjà sans que la puissance tutélaire actuelle puisse faire quoi que ce soit.
Quel sont pour le Québec les conditions nécessaires pour survivre (l'emploi de ce terme ici n'est pas gratuit) à ces dislocations qui sont inévitables, les modèles économiques et d'organisations actuels étant insoutenables.
1) protection des éco-systèmes et des terres arables proches des villes à ce titre l'étalement urbain de Montréal est un désastre et à ceux qui se plaignent que Montréal s'anglicise je répondrais qu'il faudrait arrêter cet étalement urbain, pour ramener les populations francophones sur l'île de Montréal (tant pis pour la mégalomanie du maire de Laval...).
2) revoir les conditions d'utilisation du territoire québécois et là aussi la viabilité des régions éloignées (Gaspésie, nord-québécois, etc.) est pour le moins problématique et il faudra probablement penser à abandonner des parts de ce pays ou il ne sera plus possible de vivre...en tout cas dans des conditions de vie qui les ramèneront au 19 ième siécle...
3) produire localement, et ici les besoins alimentaires sont prioritaires, pas les avions de Bombardier qui ne pourront plus voler...et que l'on ne sera plus capable de fabriquer...
4) maintenir une population suffisante dont les habitus sont communs, entre autres population dont la langue est le francais, expérience culturelle commune, etc. ici il faut s'intéresser à l'immigration entre autre, mais pas seulement.
5) mettre en place des moyens de transport collectif, le rail surtout, pas la construction de nouveaux ponts.
etc
Est-ce la vision du PQ ? J'en doute....
Est-ce la vision du PLQ ? Le Plan Nord ici, est un exercice futile, car les moyens nécessaires à son déploiement, bientôt n'existeront plus (énergie).
Est-ce la vision de QS ? En partie seulement...
Pour conclure je pense que tous ces éléments doivent faire part d'un projet global nécessaire à la préparation du Québec pour un futur qui ne vas ressembler en rien à ce que nous avons connus jusqu'a présent. Est-il nécessaire d'imaginer un nouveau parti politique pour porter ce projet ? Faire accepter et expliquer à la population ce qu'il est nécessaire de faire ? Probablement....
Le temps de l'histoire pas celui de la prochaine élection.
Yves Rancourt Répondre
15 juillet 2011Monsieur Bélisle,
Vous me paraissez, par vos propos, une personne très réfléchie mais je vous dirai, en tout respect, que je donne personnellement raison à monsieur Le Hir quant à l'urgence de la situation. Alors qu'on effacera probablement dans les prochaines semaines trois comtés francophones de l'Est du Québec pour les remplacer par trois comtés dans la grande région de Montréal qui reçoit annuellement plus de 50 000 immigrants( l'équivalent de plus d'un comté nouveau par an !), des immigrants qui se définissent pour la plupart comme canadiens d'abord, je considère qu'il y a urgence de prendre des dispositions pour mieux encadrer notre immigration et s'assurer que l'on stoppe le déclin de la langue française à Montréal et au Québec. Tout cela sans oublier que ce gouvernement est en train de vendre nos ressources naturelles à vils prix à des investisseurs étrangers ou de chez nous proches du régime.
Laisser le gouvernement Charest au pouvoir pour un autre terme de 5 ans placerait, selon moi, le Québec dans une situation de non-retour et compromettrait à tout jamais notre rêve de réaliser le pays du Québec.
Mes salutations respectueuses.
Rhéal Mathieu Répondre
15 juillet 2011Monsieur Bélisle,
Il y en a beaucoup qui pensent que le camp indépendantiste a tout le temps devant lui pour reprendre en main la situation, c'est-à-dire :
- se payer le luxe de perdre la prochaine élection provinciale, aux mains des Libéraux ou des Legault/Sirois/ADQ,
- survivre à la démoralisation d’un quatrième mandat fédéraliste,
- se ressaisir et se refaire un moral,
- se rebâtir un nouveau parti indépendantiste,
- se présenter éventuellement à une autre élection provinciale,
- possiblement, passer un autre 5 ans sur les banquettes de l’opposition.
Pour quel résultat finalement ? Pour revenir au pouvoir sous un autre nom et constater :
- que la corruption a complètement gangréné tout l’appareil gouvernementale,
- que tous les actifs des Québécois (Hydro-Québec, fonds de pension, ressources naturelles) sont passés sous le contrôle du privé,
- que l'environnement est pourri par le gaz et les énegies polluante,
- que l’effet combiné de la démographie et de l’immigration ont fait du Québec une Louisiane du Nord et
- que l’État du Québec n’est plus qu’une chiffe molle incapable de mener quelque combat que ce soit contre l’État fédéral.
S’il y a un quatrième mandat fédéraliste, que ce soit le résultat de la division du camp indépendantiste, ou d’une vague orange irrationnelle, ceux qui, actuellement, divisent le camp indépendantiste vont pointer tout le monde sauf eux. Mais il sera trop tard.
Le texte de Richard Le Hir devrait les ramener sur terre. Dans 15 ans, le sort en aura été jeté du destin de la nation québécoise.
Il ne restera qu'à fermer les livres.
Le fédéral le sait, Charest le sait, la 5ième colonne le sait, mais les "plus catholique que le pape" et les gérants d'estrade de l'indépendance font semblant de ne pas le savoir.
Rhéal Mathieu.