Lucien Bouchard a raté une « occasion en or » de tenir un troisième référendum en 1996, estime son ancien proche conseiller, le député Jean-François Lisée.
Comme il aime le faire, M. Lisée a choisi de prendre la plume, jeudi, rédigeant un long billet de blogue pour faire l’autopsie de la défaite référendaire de 1995. Réagissant aux propos de Lucien Bouchard, qui s’est exprimé la veille en marge du visionnement de presse du documentaire à son sujet, M. Lisée a déclaré être en désaccord avec l’ex-chef péquiste, qui proclame que l’échec de 1995 « a cassé [définitivement] un ressort ».
« Il y avait clairement une fenêtre ouverte en 1996, le ressort était tendu, et M. Bouchard n’a pas voulu saisir l’occasion », déplore M. Lisée. Se replongeant dans cette période postréférendaire, le député de Rosemont estime qu’une majorité de Québécois étaient alors favorables à la souveraineté, « comme s’ils avaient été surpris de se trouver si nombreux à avoir voté Oui en octobre 1995 ». Il y avait un effet d’entraînement.De plus, le gouvernement fédéral de Jean Chrétien peinait à « livrer la marchandise » promise aux Québécois durant la campagne, analyse dans son blogue M. Lisée, mentionnant entre autres l’ajout à la constitution « purement symbolique sur le caractère distinct du Québec » et un transfert « incomplet de la responsabilité de la main-d’oeuvre ».
« Je l’ai dit et redit à M. Bouchard, il y avait une embellie en 1996, pour une rare fois, une majorité de Québécois étaient favorables à la tenue d’un référendum, et ils auraient dit oui… mais cette période charnière n’allait pas durer, il fallait agir vite », explique M. Lisée, en entrevue au Devoir. Selon ses observations, le gouvernement Bouchard disposait de 12 mois pour « saisir l’histoire à bras-le-corps ». Pourquoi le premier ministre n’a-t-il rien voulu savoir ? Il estimait que le climat économique morose maintenait une incertitude au sein de la population et qu’il fallait atteindre le déficit zéro avant de tenir un autre référendum, répond M. Lisée. Le ressort péquiste, alors très tendu, s’est peu à peu étiré, pour finir par se ramollir.
Une fin prématurée
S’il admet que la tenue d’un référendum aujourd’hui ne servirait strictement à rien, tout comme le croit M. Bouchard, M. Lisée s’avoue dérangé par cette annonce « prématurée de la fin de l’histoire » souverainiste.
Il aurait été préférable d’agir quand le sentiment indépendantiste était fort, dit-il, mais le Parti québécois peut profiter de l’attachement canadien des Québécois qui est en déclin. « Les jeunes sont immensément moins canadiens que leurs parents et grands-parents l’étaient… Ils sont plus Québécois, mais pas plus souverainistes. Il y a là un paradoxe qu’on doit comprendre et changer », affirme-t-il.
Éviter le sauveur
M. Lisée, qui n’a pas encore confirmé s’il se présentera comme candidat à la course à la chefferie du PQ. « Je suis encore en réflexion », fait-il valoir. Ce dernier croit qu’il faut un ou une chef charismatique pour relancer le parti, mais qu’il ne faut pas non plus « se rabattre sur un sauveur ». Partageant la même opinion, le député péquiste de Lac-Saint-Jean, Alexandre Cloutier, estime qu’il faut plutôt que le PQ définisse un projet collectif dans lequel les gens se retrouvent. « Ce n’est pas un seul individu qui peut faire adhérer les gens à ce projet, il faut des idées claires qui permettent de comprendre ce que la souveraineté va changer dans notre vie », dit-il.
M. Cloutier ajoute que les propos de Lucien Bouchard selon lesquels la séparation n’est plus possible n’ont rien de surprenant. « La déception et le défaitisme peuvent être compréhensibles pour une personne qui a consacré toute sa vie à la cause souverainiste », témoigne-t-il.
SOUVERAINETÉ
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