Derrière les beaux discours de nos dirigeants humanitaires

Bolivie dans la mire de Washington

Se cache parfois la rapacité du vautour

Tribune libre

Le président Évo Morales, lors de son intervention à l’Assemblée générale des Nations Unies, a fait ressortir, entre autres, l’insécurité générée par le nouveau mode d’emploi des Etats-Unis et de l’Otan visant la déstabilisation et le renversement de gouvernements. La crise économique les pousse vers les pays riches en pétrole, minerais et richesses de toute nature.
« … La crise économique du capitalisme n’est pas seulement conjoncturelle, mais surtout structurelle. Alors que font les pays capitalistes ou impérialistes? Ils cherchent n’importe quel prétexte pour intervenir dans un pays pour y récupérer ses ressources naturelles (,,,) ils préparent des interventions lorsque les présidents, les gouvernements, les peuples sont ni pro capitalistes ni pro impérialistes. »
Il est évident que ce qui se passe en Libye met clairement en évidence ce nouveau mode d’emploi qui a été reconnu par le président Obama comme la nouvelle façon de faire. Pour les pays émergents et les observateurs internationaux indépendants, cette nouvelle façon de faire peut se résumer aux points suivants :
1. Infiltrer, dans les pays concernés, les foyers existants de résistance ou, en leur absence, en créer de toute pièce, par mobilisation de mercenaires, de manière à provoquer des soulèvements au sein de la population et de permettre ainsi une première vague d’information internationale visant à discréditer le gouvernement et à dévaloriser le régime. Faire ressortir le mécontentement d’une population devant un gouvernement et un leadeur toujours plus impopulaires.
2. Cette première mise en scène sera suivie par l’armement de ces groupes qui créeront des confrontations amenant le gouvernement à utiliser ses forces policières ou son armée pour contrer ces groupes de contestataires. Ça donnera lieu à une seconde vague d’information qui répercutera sur le plan international, avec photos et vidéos, la violence et la cruauté des dirigeants qui oppriment ainsi leur peuple.
3. Tout cela n’aura été amorcé qu’avec le soutien implicite de certains responsables gouvernementaux et hauts dignitaires politiques prêts à démissionner et à exprimer, le temps venu, leur dissidence avec le gouvernement. Ces nouveaux alliés viendront renforcer la résistance des groupes contestataires. Ainsi une autre vague d’information internationale viendra renforcer cette contestation et donnera une plus grande crédibilité aux mouvementx contestataires.
4. Ce sera à ce moment qu’un comité national de transition (CNT) sera formé, puis reconnu par les pays membres de l’Otan. Il deviendra la face visible des nouveaux responsables du pays et pourra compter sur l’appui des forces de l’OTAN.
5. Tout le reste devient technicité : résolution du Conseil de sécurité pour couverture aérienne, entente entre les pays pour partager les coûts des opérations militaires sans oublier le partage du pouvoir et des richesses. Encore là, une information, subtilement travaillée, occupant tout l’espace des médias écrits et visuels, sera mise au point pour convaincre le monde qu’il s’agit d’une grande opération humanitaire.
Ce schéma, très succinct, apparait en filagramme, dans ce qui s’est passé et se passe toujours en Libye et qui est en opération en Syrie. Les derniers jours nous révèlent qu’elle est également en plein développement en Bolivie et au Venezuela.
BOLIVIE
Voici en quelques mots ce qui se passe actuellement en Bolivie. D’abord il y a eu la mise en chantier, il y a quelques années d’une autoroute reliant Villa Tunari-San Ignacio de Moxos. Le tracé de cette voie passe par le Territoire Indigène et le Parc National Isiboro Sécure ((TIPNIS) lequel relie les départements
de Beni y Cochabamba en Bolivie. Il s’agit d’un parc où vivent plusieurs communautés indiennes. Plusieurs communautés se sont manifestées tout au long de l’été contre le passage de cette route sur leur territoire. Le 15 août dernier, une marche, regroupant près de 600 personnes a été organisée pour protester contre ce projet. Elle avait pour destination la Paz, capitale du pays et siège du gouvernement.
À plusieurs reprises le Président s’est dit ouvert au dialogue et a délégué divers représentants de haut niveau pour entamer des négociations avec les communautés locales et leurs dirigeants. La dernière de ces délégations s’est réalisée la semaine du 20 septembre. Le ministre des Relations extérieures, lui-même indien de source, a dirigé cette délégation.
Il y a eu, alors, un dérapage imprévisible lorsque la délégation gouvernementale, le ministre en tête, a été prise en otage et forcée de marcher en tête de la marche, servant de bouclier humain pour franchir la ligne de protection policière qui était là pour éviter qu’il y ait confrontation avec un autre groupe d’indiens, ceux-là en faveur de la route. Heureusement les otages ont pu être libérés et la confrontation entre les deux groupes opposés a pu être évitée. Cet incident a aussitôt été rapporté à la commission des droits de l’homme de l’Organisation des États Américains (OEA).
Mais voilà que le lendemain, un responsable des forces policières donne l’ordre d’évacuer les indiens contestataires et de prendre les moyens nécessaires pour y arriver. Ce fut une répression qui a soulevé la colère des Boliviens et Boliviennes ainsi que du Président lui-même tenu à l’écart de ces actions. Il a aussitôt dénoncé fortement pareille répression et demandé que toute la lumière soit faite sur ceux qui en sont les responsables. Déjà deux ministres ont donné leur démission et le chef de la police qui avait donné l’ordre, en a fait tout autant.
Devant l’ampleur de cette situation, le président Morales a fait appel à la Commission des droits de la personne des Nations Unies, à celle qui la représente en Bolivie, aux représentants des communautés indiennes ainsi qu’à la secrétaire d’UNASUR de participer à l’enquête devant faire toute la lumière sur cet événement et s’assurer que tous les responsables de ces actes aient à répondre de leurs gestes.
Il faut dire que les fauteurs de trouble sont actuellement en terrain fertile. Déjà le gouvernement avait découvert des liens étroits de certains leaders des communautés dissidentes avec certains représentants du gouvernement USA ainsi que la circulation de fonds visant à les financer.
Le Président sait également que certains de ses collaborateurs ou hauts responsables peuvent être invités à se joindre à l’opération de sabotage et, éventuellement, de renversement du gouvernement. Ne prenant aucune chance, il a aussitôt confié à des organismes hors de tout soupçon d’investiguer ce qui s’est produit et de poursuivre, le cas échéant, les véritables coupables.
Il a également suspendu la construction de l’autoroute et promis que sa reprise sera conditionnelle à une consultation référendaire positive auprès de toutes les populations concernées. Le dernier mot, dit-il, appartiendra au peuple, celui-là même au service duquel je suis.
Entre temps et en dépit des évènements qui avaient marqué la prise en otage de sa délégation antérieure, le Président a délégué une autre délégation de haut niveau, avec pouvoir décisionnel, auprès des communautés dissidentes pour que la bonne foi de tous et de toutes soit au rendez-vous de la paix. Les nouvelles de ce matin confirment que les échanges se font dans un bon climat et qu’un premier document a déjà été signé par toutes les parties sur les sujets à traiter et sur l’esprit avec lequel chacun doit participer.
Évo Morales, président de la Bolivie, coupe ainsi l’herbe sous le pied de ses détracteurs et rend accessible aux populations locales toute l’information pertinente sur les véritables dispositions du gouvernement à leur endroit. En faisant appel, dès les débuts, aux organismes multilatéraux et régionaux il rend plus difficile la manipulation dont ils pourraient faire l’objet de la part des Etats-Unis et de l’Otan.
« Il est impossible de penser que le Président ou le Vice président puissent avoir émis d’autres directives que celles de la sérénité et du dialogue, parce que quand nous étions dirigeants nous avons souffert les tortures. Nous savons ce que c’est.» Le Vice président de l’État, Alvaro García Linera

Oscar Fortin
Québec, le 29 septembre 2011
http://humanisme.blogspot.com

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Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.





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5 commentaires

  • Serge Charbonneau Répondre

    2 octobre 2011

    Bravo et merci pour ce survol Bolivien, Monsieur Fortin.
    Il est clair que la Bolivie ainsi que tous les pays ayant un système politique et économique moins axé sur l'exploitation des populations et des ressources naturelles au profit de quelques riches portefeuilles, sont dans la mire des prédateurs économiques mondiaux.
    Washington mène le bal au nom de cet oligarchie mondiale qui craint comme la peste la prise en main de la démocratie véritable.
    Cette démocratie véritable qui consiste à avoir des élus travaillant pour les citoyens et non pour les intérêts des entreprises privés et des transnationales.
    Cette démocratie véritable qui permet à la population de prendre le contrôle de leurs richesses afin d'en faire profiter le Pays et leurs concitoyens ce qui représente des pertes de revenus notables pour les exploiteurs mondiaux.
    Nous avons encore quelques pas à effectuer afin de parvenir à cette prise de conscience que les Pays d'Amérique latine ont atteint.
    Malgré les attaques de toutes sortes de l'oligarchie mondiale contre ces Pays souverains, je crois que ces populations ont atteint un niveau d'éveil irréversible pour au moins quelques générations.
    Bonne chance à la Bolivie, au peuple Bolivien et au président Morales.
    Hier on manifestait dans les rues de La Paz pour soutenir le président Morales.
    http://fr.euronews.net/nocomment/2011/10/01/des-boliviens-manifestent-en-soutien-au-president-morales/
    Salutations,
    Serge Charbonneau
    Québec

  • Archives de Vigile Répondre

    1 octobre 2011

    M.Perez, vous voilà de retour avec le même vocabulaire, les mêmes mots, le même esprit. Je ne parle de contenu puisque dans votre commentaire, je n'en ai trouvé aucun. Vous affirmez des choses sans les analyser, ne serait-ce que pour le bénéfice de ceux et celles qui vont vous lire. Ma première réaction fut de ne pas réagir, de vous laisser aller avec vos mots en ...ismes. Mais je me suis ravisé pour que vous sachiez que les lecteurs et lectrices de Vigile savent discerner entre l'intelligence d'une réflexion et l'intoxication d'une pensée unique.

  • Jean-Louis Pérez-Martel Répondre

    30 septembre 2011

    Le ‘’socialisme XXIème siècle’’ face à ses propres contradictions
    La crise en Bolivie est la conséquence prévue en raison de la dynamique d’un régime modélisé par Evo Morales, étant conforme à la recette totalitariste Castro-communisme et de la rhétorique du ‘’socialisme XXIème siècle’’, tel qu’exigé par le messianique Hugo Chavez; puisque cette aventure néo-marxiste est financée par les pétrodollars confisqués à l’État vénézuélien.
    JLPM

  • Archives de Vigile Répondre

    30 septembre 2011

    La question que je me pose est celle-ci: est-ce que la population américaine sait que leur pays a des politiques criminelles un peu partout autour du globe? Cette population sait-elle jusqu'à quel point elle est haïe hors frontière? Est-elle si ignorante de ce qui se passe? Comme la réponse sera sans doute positive, comment leur faire savoir? Comme ici, les médias sont contrôlés. Si on a réussi à faire gober à la population la version officielle du 11 septembre, on peut faire croire n'importe quoi à n'importe qui, aussi insensé que cela puisse être. Déprimant!!!

  • Archives de Vigile Répondre

    30 septembre 2011

    Monsieur Fortin,
    Il est certain que l'empire "humanitaire" dont fait partie le Canada ne reculera devant aucune magouille pour obtenir un prétexte pour intervenir "humanitairement".
    Ce qui rend difficile l'appréciation d'une situation ici au Québec, ce sont les médias mainstream qui véhiculent toujours la thèse de l'empire "humanitaire".
    Mais c'est bien de faire partie d'un empire qui se veut humanitaire. Ça donne bonne conscience aux citoyens. Et c'est pour ça qu'on a des premiers ministres au Canada et au Québec qui respirent la sainteté...