CHRONIQUE

Au diable l’honneur!

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« Une sorte de lâcheté collective »

À la notable exception de Pierre Moreau, les membres de l’Assemblée nationale se sont ralliés en bloc derrière leur président, Jacques Chagnon, qui en a surpris plus d’un par sa détermination à défendre les droits et privilèges des parlementaires dans l’affaire Guy Ouellette.



Ce sont les tribunaux qui devront vraisemblablement décider si le contenu du téléphone cellulaire de M. Ouellette peut être associé à des documents auxquels l’UPAC n’aurait pas eu accès s’ils s’étaient trouvés dans son bureau.



Il est sans doute essentiel que les élus puissent s’acquitter de leur tâche en toute sérénité, mais il est tout aussi impératif que l’immunité dont ils jouissent s’accompagne d’un sens des responsabilités qui semble parfois difficile à concilier avec la partisanerie qui teinte les débats.



Quand Yves Michaud s’est adressé à la Cour supérieure, puis à la Cour d’appel pour obtenir réparation de la motion de blâme dont il avait été l’objet le 14 décembre 2000, il s’est fait répondre qu’en vertu du principe de la séparation des pouvoirs, le judiciaire ne pouvait pas intervenir. La Cour suprême n’avait même pas voulu entendre sa cause.



Cela ne signifiait pas que la requête de M. Michaud était sans fondement. Dans ses commentaires, le juge Jean-Louis Baudouin, de la Cour d’appel, avait cité l’adage latin Summum jus, summa injuria. Le comble du droit peut être le comble de l’injustice.



Une nouvelle pétition en faveur de M. Michaud a été mise en ligne sur le site de l’Assemblée nationale pour faire en sorte que son cas soit examiné par une commission parlementaire. À 87 ans, les chances que justice lui soit rendue avant sa mort s’amenuisent rapidement. Par une sorte de lâcheté collective, on semble attendre que le vieil enquiquineur emporte son honneur flétri dans la tombe.




 


Alors que le débat sur l’identité fait pleuvoir les accusations d’intolérance et de racisme, l’affaire Michaud demeure pourtant d’une grande actualité et démontre à quel point les risques de dérapage sont élevés. On peut même penser que le climat actuel constitue un obstacle à sa réhabilitation



Le jour où le député libéral de D’Arcy-McGee s’est levé à l’Assemblée nationale pour réclamer qu’elle dénonce « sans nuance » les « propos inacceptables » envers la communauté juive, qu’il avait présumément tenus lors de son témoignage aux États généraux sur la langue, aucun des députés présents, pas même M. Bergman, ne savait ce qu’il avait dit exactement. La condamnation a pourtant été unanime.



Quand on a finalement connu les paroles exactes prononcées, c’est l’ancien chef du Parti Égalité, Robert Libman, devenu entre-temps président de la section québécoise de B’nai Brith, qui a souligné que les propos de M. Michaud avaient été « incroyablement déformés » pour mieux l’accabler. En réalité, citant Lionel Groulx, il avait plutôt donné le peuple juif en exemple.



Il a pourtant fallu des années avant que ses accusateurs commencent à faire amende honorable.



Dans leurs commentaires, les députés péquistes avaient été les plus virulents. Trente-cinq ans après avoir élu une première fois comme député libéral de Gouin, M. Michaud avait décidé de faire un retour et il visait l’investiture péquiste dans Mercier, avec l’intention bien arrêtée d’amener le gouvernement Bouchard à démontrer plus de vigueur dans la défense du français. Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage. Quoi de mieux pour écarter ce trublion que de l’accuser d’antisémitisme ?




 


En décembre 2010, Amir Khadir avait présenté une motion par laquelle l’Assemblée nationale aurait reconnu son erreur. Les libéraux étaient prêts à en débattre, mais pas pour s’excuser. Jean-Marc Fournier, alors ministre de la Justice, comptait plutôt en profiter pour dénoncer « les vieux démons du nationalisme ethnique », qui, selon lui, hantaient toujours le PQ. Le PQ s’était prudemment opposé à la présentation de la motion.



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