La perspective de voir S & P retirer le AAA aux Etats-Unis provoque de fortes secousses. Cacophonie dans les milieux politiques
Luis Lema - Une douche froide? Un avertissement? Plutôt un baril d’essence versé sur le débat déjà incandescent de la dette américaine, comme le notait mardi un responsable démocrate: la perspective de voir l’agence de notation Standard & Poor’s retirer le AAA aux Etats-Unis provoque de fortes secousses à Wall Street. Mais à Washington, elle pourrait avoir pour seule conséquence de crisper encore les positions.
Officiellement, le calme règne. «No risk», répondait hier le secrétaire au Trésor Timothy Geithner à ceux qui lui demandaient si le triple A était menacé. Geithner, comme les autres responsables de l’administration, tentait mardi de rassurer les marchés et les investisseurs. Un compromis politique est probable sur cette question «au cours des deux prochains mois», disait-il en substance, en soulignant le fait que «le monde continue de faire confiance aux Etats-Unis pour assurer ses engagements et ses obligations».
Au même moment, pourtant, le chef de Geithner, Barack Obama, était lui sur la route. Pendant trois jours, le président va multiplier les réunions avec les Américains afin de défendre le plan de réduction du déficit budgétaire qu’il vient de présenter et qui, précisément, semble avoir fini d’alarmer l’agence de notation sur la capacité des responsables américains de trouver un terrain d’entente afin d’assainir les finances américaines.
De fait, les premières réactions de part et d’autre ne faisaient que confirmer les perspectives dessinées par S & P. Augmenter les impôts des plus riches, défendre le système de santé et les retraites en attendant une reprise plus solide: le président Obama, qui vient en réalité de lancer sa campagne de réélection, a retrouvé des accents combatifs et un moyen de rallier autour de lui des troupes démocrates un peu clairsemées. Or en face, les républicains n’en démordent pas: les seules mesures envisageables consistent à réduire immédiatement les dépenses de l’Etat plutôt qu’à accroître ses revenus. Un débat éternel, certes, mais qui ne fera sans doute que se durcir dans la perspective des élections de 2012.
Dans l’immédiat, la menace de S & P s’inscrit dans la négociation qui vise à accroître le plafond autorisé de la dette américaine – et qui s’élève aujourd’hui à 14 290 milliards de dollars – afin que l’Etat puisse continuer d’emprunter et donc de fonctionner. Au rythme actuel, ce plafond devrait être atteint autour du 16 mai, et le Congrès pourrait passer au vote ces prochaines semaines. Mais l’issue du vote est loin d’être certaine, alors que les républicains contrôlent la Chambre des représentants et que les possibles candidats aux prochaines élections rivalisent aujourd’hui de pureté idéologique: «Il est clair que ce relèvement du plafond doit s’accompagner de réformes budgétaires sérieuses», notait Eric Cantor, l’un des ténors républicains. En insistant: «C’est de manière immédiate qu’il faut réduire les dépenses fédérales et cesser d’enfoncer notre nation dans la dette.»
Donald Trump, qui a pris ces jours le rôle de candidat le plus en vue pour briguer la candidature républicaine, rappelait hier qu’il ne veut pas entendre parler d’un relèvement du plafond de la dette. En réalité, personne n’aurait pris au sérieux l’avis du milliardaire aux mèches blondes il y a encore quelques semaines. Mais, au sein d’un camp républicain qui ne sait plus à quel saint se vouer, plus de la moitié des sympathisants conservateurs se disent aujourd’hui insatisfaits de leurs leaders et se déclarent séduits par ce genre de candidats hors norme et, en grande partie, parfaitement imprévisibles.
Après les menaces sur sa dette, Washington tente de rassurer
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